Le lutteur québécois de renommée internationale Maurice «Mad Dog» Vachon a été cloué au tapis pour une dernière fois, jeudi. Il est décédé à son domicile d'Omaha, au Nebraska, à l'âge de 84 ans.

Il serait mort dans son sommeil, vers quatre heures du matin.

Maurice Vachon a résumé sa carrière sur le ring en une phrase. «J'ai tout fait pour être haï et je n'ai pas réussi.»

Vachon est devenu lutteur professionnel après une brillante carrière amateur. Il a terminé septième chez les 78 kg en lutte gréco-romaine aux Jeux olympiques de Londres, en 1948, avant de remporter la médaille d'or aux Jeux de l'Empire britannique (devenus les Jeux du Commonwealth) en 1950.

Il a ensuite gagné sa vie comme videur de boîte de nuit et personne ne lui résistait, malgré sa petite stature. «Un jour, Fernand Payette, un homme fort et lutteur, m'a dit que personne ne pouvait me battre aux poings, mais que quelqu'un allait me descendre un jour, a rappelé Vachon à Ronald King dans La Presse en novembre 2009. Il m'a recommandé de changer de métier et de faire de la lutte professionnelle.»

Les conseils de Payette ont été entendus; Vachon est passé aux rangs professionnels au début des années 50 et on lui a attribué un surnom. Don Owen, un promoteur de Portland, en Oregon, lui a accolé celui de «Mad Dog» après que le Montréalais, fou de rage, s'en soit pris à son adversaire, à l'arbitre et à un policier.

«À mes débuts, je dois admettre que j'étais beau garçon, chevelu et que j'avais des dents impeccables, a dit Vachon, pince-sans-rire. Je me suis vite aperçu que les bons garçons n'étaient pas les gagnants.»

«Mad Dog» s'est trouvé un style de dur un peu fou. Il sautait à la façon d'un kangourou pour s'échauffer, crachait le sang de ses adversaires dont il venait de s'abreuver, essayait d'arracher les yeux de ses rivaux, utilisait la prise du marteau-pilon pour mettre fin à ses combats.

«Maurice était le plus fort d'entre nous, a avoué Abdullah The Butcher, de son vrai nom Laurent Robert Shreve, à Ronald King dans La Presse. Dans la vraie vie, ils nous auraient tous plantés. Dans l'arène, il était professionnel. C'était un homme d'affaires qui faisait son travail. Mais si on faisait quelque chose qu'il n'aimait pas, il nous rappelait qui il était.»

Vachon a livré des combats épiques à Verne Gagne et à Larry Moquin. Les combats duraient souvent une heure dans les années 50 et 60.

En équipe, il s'est adjoint son «petit» frère Paul pour faire la loi. Selon la légende, les Vachon auraient été invaincus pendant quelques années...

Photo Paul-Henri Talbot, archives La Presse

Maurice «Mad Dog» Vachon (à droite) durant un combat contre Jacques Rougeau en 1974.

Les Vachon ont livré des combats mémorables aux «frères» Jos et Paul Leduc, deux bûcherons qui n'avaient aucun lien de parenté. Les quatre hommes ont attiré 17 000 spectateurs en 1972.

«À une certaine époque, on était plus populaires que les joueurs du Canadien», a dit Maurice Vachon à Réjean Tremblay en septembre 2006.

Deuxième enfant d'une famille nombreuse, Vachon a amené son frère Paul et sa soeur Viviane à la lutte.

Le style de Maurice a inspiré d'autres mauvais garnements tels George «The Animal» Steele.

Cependant, Vachon condamnait la lutte pratiquée dans la WWE de Vince McMahon. «Ça n'a rien à voir avec la lutte, a-t-il déjà affirmé. L'argent domine tout, il force à faire de vilaines choses. Tout ce sexe et toute cette violence.»

Amoindri, Vachon a quitté la scène en septembre 1986, au Centre Paul-Sauvé. «J'ai quitté la lutte, mais c'est aussi la lutte qui m'a quitté, a-t-il dit. Regardez mes bras. Ils ne s'ouvrent ni se ferment plus complètement. La mécanique n'est pas neuve mais, en général, en bon état.»

Paradoxalement, Vachon a subi sa plus sérieuse blessure une fois sa carrière terminée. En 1987, dans son Iowa d'adoption, il a été happé par un chauffard qui a pris la fuite. Sa jambe droite a été amputée au-dessus du genou.

«Je m'en suis sorti, mais j'ai passé un mauvais quart d'heure, dans mon lit d'hôpital, avec une jambe en moins, a-t-il confié au journaliste Jean-Paul Soulié dans La Presse en décembre 1994. Tu ne sais pas si demain tu vas être encore là.»

Dans l'épreuve, Vachon s'est nourri des témoignages de sympathie. «J'ai reçu un message du premier ministre du Canada. Je n'aurais jamais pensé ça. J'ai aussi été appuyé par tout le Québec!»

Mad Dog a aussi souffert de paralysie de la jambe gauche vers la fin de sa vie.

De sa vie bien remplie, Vachon a exprimé un regret. «J'ai trop voyagé, j'ai trop travaillé, j'aurais voulu être plus souvent avec mes enfants, avec ma famille, a-t-il avoué à Réjean Tremblay. Mais quand il y avait 25 000 personnes qui t'attendaient le samedi soir, tu y allais. Mais je regrette de ne pas avoir eu plus de temps pour mes enfants. J'en ai six. Vous savez, on finit toujours par ramener la facture avec soi quand la vie avance.»

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> Maurice Vachon a participé aux Jeux olympiques de Londres en 1948 en lutte gréco-romaine. Il est passé à la lutte professionnelle quelques années plus tard.

> Il a initié son frère Paul et sa soeur Viviane à la lutte professionnelle. Il a longtemps formé équipe avec Paul.

> Il a prétendu avoir participé à 13 000 combats en carrière, dont certains ont duré plus d'une heure.

> Il a subi l'amputation de la jambe droite, au-dessus du genou, en 1987 à la suite d'un accident de la route.