Après des mois d'une guerre judiciaire et médiatique contre la Fédération française de taekwondo, la Québécoise Marlène Harnois doit s'avouer vaincue. Celle qui s'était exilée en France à l'âge de 19 ans, celle qui a remporté une médaille de bronze à Londres sous les couleurs tricolores a finalement décidé de plier bagage et de rentrer au Québec.

Elle ne sait pas encore si elle pourra porter les couleurs canadiennes en taekwondo. Le Comité international olympique (CIO) prévoit un délai de trois ans pour un changement de nationalité, à moins d'une entente entre les deux pays. Elle ne sait même pas pour l'instant si elle souhaite continuer le sport de haut niveau.

«Ce serait un super beau projet de me dire: je retourne aux sources et la prochaine médaille sera pour le Canada. Mais en même temps, j'ai déjà une médaille olympique, je me suis accomplie dans mon sport, peut-être qu'il serait temps de passer à autre chose, a expliqué l'athlète de 26 ans. Les deux se défendent. Je veux être certaine de mon choix, parce que peu importe ce que je décide, je serai lancée à 100 %.»

La décision de rentrer au pays s'est imposée d'elle-même. Le bras de fer entamé contre sa fédération semble bel et bien perdu. Exclue de l'équipe de France en avril dernier en raison d'une prise de bec avec son entraîneuse, Harnois a tout fait dans les coulisses pour être réintégrée. Mais devant les refus de sa fédération, elle s'est adressée aux médias. Dans une série d'entrevues, elle a accusé l'entraîneuse Myriam Baverel de harcèlement. Elle a également soutenu qu'on lui avait demandé de contracter un mariage blanc afin d'obtenir la nationalité française.

Poursuivie pour diffamation

Après une enquête, le ministère des Sports a déposé un rapport lundi. Il conclut que Marlène Harnois a «bénéficié d'une prise en charge satisfaisante lui permettant de construire avec succès son double projet», mais également que «l'organisation fédérale mise en place autour d'elle n'avait pas toujours été au niveau de ce qui est attendu en termes d'accompagnement des athlètes».

La Fédération a répondu hier en attaquant Harnois en justice. Elle poursuit la Québécoise pour diffamation, l'accuse d'injures et de diffamations publiques. Ce sont 40 000 euros qui lui sont réclamés.

«C'est dans la continuité de l'acharnement. Ils m'ont mise à l'écart du système. Ensuite, ils m'ont retiré ma licence sportive pour une période de deux ans, détaille Harnois. Et après, ils m'ont attaquée. À la base, je demandais juste à être réintégrée et à pouvoir changer d'entraîneur.»

«Quand j'ai finalement décidé de faire ma sortie, mon but était qu'on puisse avoir des critères de sélection établis, qu'on puisse avoir des recours, qu'il y ait des critères pour l'aide financière; qu'on soit encadrés différemment, poursuit Harnois. Le but de mes dénonciations, c'était de faire évoluer le système, non d'entrer dans une guerre à n'en plus finir.»

Marlène Harnois a grandi à Brossard avant de partir pour la France à la demande de Myriam Baverel, qui voyait en elle une athlète capable d'atteindre l'élite mondiale. Elle a intégré l'équipe de France après avoir obtenu la nationalité française. Son sacre a eu lieu à Londres, où elle a décroché à l'été 2012 une médaille de bronze.

Mais le temps est bel et bien venu de tourner la page. Marlène Harnois compte rentrer au Québec vers la fin octobre. «C'est sûr que je rentre au Québec. Je commence à organiser mon retour: je dois vendre ma voiture, mes affaires... Je me dirige pour rentrer à Montréal. Après, ce que je ferai, je ne le sais pas. Mais je vais quitter la France, ça, c'est sûr.»

«Est-ce que le taekwondo, c'est le projet dans lequel j'ai le goût de rebondir? Ou est-ce que je ne préfère pas profiter de mon nouveau départ au Québec pour me lancer dans autre chose de complètement différent? On verra.»