À l'occasion de leurs multiples altercations verbales et même physiques, ces derniers mois, Jean Pascal et Bernard Hopkins se sont livré à un duel qui ressemble à une valse «entre la certitude et le doute».

C'est la phrase que lance d'emblée Richard Monette, entraîneur en préparation mentale, quand il analyse la relation tendue qu'il semble y avoir entre le champion du monde WBC des mi-lourds et celui qu'on considère comme l'un des meilleurs boxeurs de sa génération.

Monette, qui vit en Alberta depuis qu'il a quitté Montréal il y a 18 ans, a suivi la carrière de Pascal de loin. Le fondateur de l'entreprise InnerWarrior, qui offre notamment des services-conseils à des athlètes professionnels et olympiques, a toutefois regardé attentivement les vidéos des conférences de presse et émissions de télé auxquelles Pascal et Hopkins ont participé.

«Ce que j'ai observé, c'est une danse entre la certitude et le doute de la part des deux athlètes», a souligné Monette, vendredi depuis Banff, au cours d'un entretien téléphonique avec La Presse Canadienne.

«Je pense que c'est parti d'une certaine planification visant à faire le spectacle. Je ne pense pas que ç'a commencé de façon intuitive, mais je pense que c'est tombé dans la haine personnelle assez rapidement.

«Il faut expliquer qu'à la base, les athlètes doivent avoir une double pensée. Ils doivent avoir une certitude complète à l'égard de leurs propres capacités et de leur plan de match. Mais en même temps ils savent, au fond d'eux-mêmes, qu'il y en a un qui va perdre. Il faut tout le temps qu'ils se convainquent eux-mêmes.»

Selon Monette, Pascal est celui qui a semblé le plus à fleur de peau lors des échanges avec Hopkins. Sauf qu'il semble également avoir réussi à sortir l'ancien champion de 46 ans de sa zone de confort.

«Souvent, on a vu Pascal qui réagissait émotivement à quelque chose que Hopkins faisait. Dans ces moments-là, j'ai remarqué que Pascal, après une première réaction de doute et de surprise, passait à l'action. C'est comme s'il se disait «OK, il faut que je fasse quelque chose pour ne pas m'en laisser imposer et, en même temps, il faut que je réaffirme ma certitude que je vais gagner'.

«Hopkins, lui, a l'attitude de quelqu'un qui n'a rien à perdre, a avancé Monette. Mais il aussi l'air d'avoir une bonne façade. Il a l'air de jouer un rôle. Il veut intimider, c'est son plan et il le fait, avec peut-être un petit sourire en coin.

«Mais lui aussi, j'ai vu des moments où il était en colère, vraiment émotif. Moins que Pascal, par contre.»

Dans le ring

Selon Monette, Pascal devra avoir chassé tous les doutes au moment de commencer le combat.

«Ce qui est important, quand Pascal va entrer dans le ring, c'est qu'il ait cette certitude en ses capacités. Parce qu'il semble parfois devenir un peu émotif, c'est possible qu'il s'éloigne de son plan de match. J'ai l'impression que Hopkins va essayer pas mal de choses pour essayer d'en profiter.

«Ce serait le seul doute (à propos de Pascal) que j'aurais. Et j'ai remarqué aussi un peu de colère, de frustration de sa part. Si ça produit dans le ring, là aussi ça va le sortir de son plan de match, ça va le faire sortir du moment présent.

«Le danger, justement, c'est de sortir du moment présent. Dans le ring, tu n'as pas le choix. Il faut que tu sois complètement impliqué dans le moment, il ne faut pas que tu aies d'autres pensées que de réagir à ce que tu vois. Et ça, ça se passe au niveau de l'inconscient. Alors si tu laisses des émotions, des mots ou des idées intervenir dans ta tête et que tu commences à être en colère, ça peut te faire sortir du moment présent.

«Il faudra donc que les hommes de coin de Pascal utilisent les bons mots-clés, ou les bonnes stratégies, pour ramener Pascal à son plan de match si jamais il sort du moment présent et tombe dans l'aspect émotif.

«Sortir du plan, ce n'est pas la fin du monde. Mais ne pas revenir dans le plan peut signifier la défaite.»

Le défaut de ses qualités

Bien que Hopkins semble avoir réussi à exploiter une faiblesse de Pascal, ces derniers mois, il a peut-être aussi fait naître chez son opposant une qualité insoupçonnée. C'est ainsi que, selon Monette, le boxeur lavallois semble animé d'une intensité bien canalisée.

«J'ai eu l'impression de voir dans ses yeux une colère qui était véritable, a déclaré Monette. Parfois, le fait d'être intimidé verbalement et même physiquement par un adversaire, ça peut mettre du doute et de la peur dans la tête de quelqu'un. Mais je pense qu'avec Pascal, ça l'a mis en beau maudit. Et ça, ça pourrait entrer en ligne de compte dans les moments cruciaux.

«Par exemple, si ça va à sept, huit ou neuf rounds, alors que la fatigue se fait sentir, ça pourrait lui donner une énergie supplémentaire.»