L'édition 2010 des 24 Heures du Mans, placée en concurrence directe avec l'ouverture du Mondial de football et bouclée dimanche par un triplé Audi, face à Peugeot, a montré que l'endurance automobile est en train d'entrer dans un nouvel âge d'or.

Comme dans les années 70 avec Porsche, Ferrari, Matra et Ford, comme à l'époque du championnat du monde des voitures de sport, cette 78e édition, sur la piste, a ravi les connaisseurs: 240 000 sur le circuit, des millions dans le reste du monde. Le spectacle a été intense, le rythme infernal, la course palpitante, et le triomphe allemand est aussi incontestable que mérité.

 

Le plus important est ailleurs, dans une foule de petits détails montrant que la plus grande course d'endurance au monde, parfaitement gérée par un club automobile de province qui a fait sa révolution culturelle, a désormais les moyens d'imposer sa marque - et pas seulement son label - sur d'autres continents, plusieurs fois par an.

 

La venue au Mans de Jean Todt, président de la Fédération internationale de l'automobile (FIA), était lourde de sens, et pas seulement parce qu'il a dirigé Peugeot Sport et Ferrari. Comme son tour de circuit, avant le départ, à bord de la voiture de sécurité pilotée par François Fillon, premier ministre français.

 

Plus rien ne s'oppose aujourd'hui à ce que le sceau «Championnat du monde FIA», indispensable pour un constructeur comme Audi ou Peugeot, soit bientôt ajouté au label «Le Mans» que l'Automobile Club de l'Ouest a déjà fait prospérer en Europe, en Amérique du Nord et, plus difficilement, en Asie. De quoi créer un sérieux concurrent pour la F1 et le rallye, qui ont plus de mal à s'organiser.

 

Car l'endurance a des atouts que ses concurrents n'ont pas, comme l'ont rappelé au Mans Didier Miraton, cogérant de Michelin, ou Jurgen Pippig, pape de la communication chez Audi. Il y a la concurrence entre manufacturiers de pneus, absente en F1, et il y a l'aspect technologie/écologie, intimement lié au résultat final: victoires de moteurs diesel, à la fois plus performants et plus économes.

 

Un autre ingrédient est fondamental, le casting du spectacle. Celui de l'endurance auto est impeccable. Il y a un empereur magnanime, le Dr Wolfgang Ullrich, également surnommé le Seigneur des anneaux, face à un rival loyal et passionné, Olivier Quesnel, le patron de Peugeot Sport. Il y a aussi des vassaux dévoués, comme Hugues de Chaunac (Oreca), ou plus rebelles et rusés, comme David Richards (Aston Martin). Il y a un grand barbu et favori du peuple, Henri Pescarolo, souvent victime du mauvais sort. Il y a surtout 165 pilotes prêts à en découdre, au lieu de 24 en F1 et une poignée en WRC.

 

L'ACO étendra encore davantage sa marque en 2011 avec sept courses au programme de l'Intercontinental Le Mans Cup: deux épreuves de série Le Mans à Spa (Belgique) et Silverstone (Angleterre), deux autres en American Le Mans à Sebring (Floride) et Petit Le Mans (Géorgie) et deux autres en Asie, au Japon et en Chine. Les 24 Heures du Mans restent évidemment l'épreuve phare et compteront pour le double de points au championnat.