La soeur de la jeune femme qui accusait Nate Parker de viol avant de se suicider a qualifié de «perverse» l'idée d'avoir mis une scène d'agression sexuelle dans Birth of a Nation, le très attendu premier film du réalisateur noir.

Parker et son coscénariste Jean Celestin ont été accusés d'avoir violé en 1999 une étudiante quand ils étaient colocataires à l'université Penn State.

«En tant que soeur, ce qui me fait le plus de peine est qu'en racontant l'histoire de la révolte d'esclaves menée par Nat Turner, ils ont inventé une scène de viol», écrit Sharon Loeffler dans le magazine sur l'industrie du spectacle Variety.

«Le viol de la femme de Turner est utilisé comme raison pour justifier la rébellion de Turner» et «c'est de la fiction», argumente-t-elle.

«Je trouve terrifiant et pervers que Parker et Celestin incluent une scène fictive de viol au coeur du film et que Parker joue le rôle d'un héros qui venge» cette agression, ajoute-t-elle.

Parker, 36 ans, a été acquitté en 2001, et Jean Celestin a été condamné à six mois de prison dans cette affaire avant de voir sa condamnation annulée en appel, quand son accusatrice, dont l'identité n'a jamais été formellement révélée, a refusé de témoigner à nouveau.

Cette affaire, que Parker pensait appartenir au passé, a rejailli sur le devant de la scène en août quand Variety a révélé que la jeune femme s'était suicidée en 2012 dans un centre de désintoxication.

Fox Searchlight a acheté The Birth of a Nation pour la somme record de 17,5 millions de dollars au Festival de Sundance en janvier, où il a gagné le grand prix du jury. Il s'est aussitôt retrouvé propulsé comme l'un des favoris dans la course aux Oscars, à une période où l'Académie qui remet ces prestigieux prix est sous pression pour diversifier sa sélection, accusée d'être «trop mâle, trop blanche».

Le film a également été programmé au festival de Toronto en septembre, l'une des antichambres des Oscars, et sortira en Amérique du nord le 7 octobre.

Parker a donné sa première entrevue télévisée sur l'affaire dans la célèbre émission 60 Minutes, refusant de s'excuser pour avoir été «faussement accusé», rappelant qu'il avait «gagné» au tribunal.

Pendant l'entretien, qui sera diffusé dimanche, le journaliste-vedette Anderson Cooper lui demande s'il pense avoir fait quelque chose de moralement répréhensible en 1999, et sa réponse est ambigue.

«J'ai 36 ans maintenant et ma foi (chrétienne) est très importante, alors en regardant en arrière à travers ce prisme, je pense en effet que ce n'est pas le prisme que j'avais à 19 ans».

Il affirme que Nat Turner «vu ce qu'il a fait dans l'Histoire, est plus grand que moi. Il est plus grand que nous tous».