Le conglomérat chinois Wanda a signé un accord mardi à Pékin pour le rachat du studio hollywoodien Legendary Entertainment, producteur de Jurassic World et Godzilla, pour 3,5 milliards de dollars, nouveau signal des ambitions de son patron Wang Jianlin, première fortune de Chine.

L'accord représente «la plus grande acquisition internationale de la Chine dans le secteur de la culture à ce jour», a assuré Wanda dans un communiqué.

«Les entreprises américaines du cinéma sont à la tête de l'industrie cinématographique mondiale», a déclaré mardi M. Wang, 61 ans, lors d'une conférence de presse dans la capitale chinoise, ajoutant que l'acquisition allait «changer cette situation».

«Je pense que c'est un miracle pour une entreprise chinoise d'acquérir une si grande et puissante entreprise américaine», a ajouté l'homme d'affaires.

Wang Jianlin a rejeté l'analyse selon laquelle ce rachat - qui intervient quelques semaines après l'acquisition du journal hongkongais South China Morning Post par le géant chinois du commerce électronique Alibaba - était destiné à renforcer l'influence culturelle de Pékin.

«Le soft power du gouvernement appartient à un autre domaine», a-t-il assuré mardi lors de la signature de l'accord en compagnie de Thomas Tull, PDG de Legendary. «Je me concentre surtout sur les intérêts commerciaux».

Les films produits par le studio américain ont généré plus de 12 milliards de dollars de recettes au box-office dans le monde, selon Wanda. Ce sont majoritairement des films d'action à gros budgets - comme Pacific Rim ou la trilogie Batman -, dont le public chinois est friand.

Stratégie de diversification

Wanda possède plus de 200 centres commerciaux, cinémas et hôtels de luxe dans toute la Chine.

Le groupe était initialement spécialisé dans l'immobilier mais s'est diversifié ces dernières années dans le cinéma et plus récemment dans le sport, alors que la deuxième économie mondiale, en plein réajustement, montre des signes de ralentissement.

Le rachat de Legendary intervient ainsi après celui de la société qui organise les courses extrêmes d'endurance Ironman, du groupe suisse de marketing sportif Infront ou encore de 20% du club de football espagnol Atletico Madrid.

L'achat en 2012 de la chaîne américaine de cinémas AMC Entertainment, pour 2,6 milliards de dollars, avait déjà permis à Wanda de prendre pied dans la production cinématographique.

Fils d'un capitaine de l'ancienne Armée rouge chinoise, M. Wang, ex-militaire lui-même, a fondé Wanda dans les années 80, y instaurant une discipline militaire.

Sa fortune en fait la 15e personne la plus riche du monde, selon un classement Bloomberg qui évaluait mardi sa richesse à 31 milliards de dollars.

En octobre, Wang Jianlin avait confirmé que le beau-frère du président Xi Jinping avait détenu, puis vendu, des actions dans son entreprise, alors que l'homme d'affaires est régulièrement accusé par ses détracteurs d'utiliser ses liens politiques pour développer son entreprise.

Le conglomérat chinois a assuré lundi avoir enregistré en 2015 une hausse de près de 20% de son chiffre d'affaires, en dépit de l'essoufflement du secteur immobilier.

«Rien ne changera»

Thomas Tull, l'actuel PDG de Legendary, restera à son poste après le rachat, a assuré Wanda dans un communiqué.

«Nous avons pris la décision il y a plusieurs années que la Chine, c'était l'avenir», a déclaré M. Tull à la presse.

Il a assuré qu'il gérera l'entreprise «comme nous avons toujours fait, avec de plus gros muscles derrière nous», ajoutant que «sur le front de la création, rien ne changera au point (de toucher) la production et le contrôle».

Seuls 34 films étrangers peuvent être diffusés dans les cinémas de Chine continentale chaque année, en vertu d'un système de quota mis en place par Pékin.

Mais Wang Jianlin a promis que les films de Legendary, considérées désormais comme des coproductions sino-américaines, ne seraient pas concernés.

Tous les films diffusés en Chine sont soumis à un système officiel de censure visant à retirer tout contenu jugé politiquement ou sexuellement sensible.