Intuitif et résolument cynique, Le candidat montre une semaine charnière dans la vie de Michel Dedieu, candidat de dernière minute au deuxième tour d'une élection présidentielle. Un premier film et une brillante leçon de manipulation, expliquée par son scénariste et réalisateur, Niels Arestrup.

À 58 ans, après avoir joué dans une soixantaine de films et une vingtaine de pièces, Niels Arestrup se prête à de nouveaux plaisirs. Il y a d'abord l'Amérique du Nord, où, pour la première fois, Niels Arestrup pose les pieds. Il y a ensuite son premier film, qu'il accompagne au festival Cinémania.

Avec Le candidat, écrit et réalisé par ses soins, Niels Arestrup s'est découvert, un peu malgré lui, un nouvel amour. «Je ne voulais pas écrire un film. J'avais beaucoup de complexes par rapport à l'écriture, assure-t-il. C'est une démarche qui est née de l'ennui. Ce n'était pas une démarche volontaire, c'est une chose touristique, accidentelle.»

En 2003, Niels Arestrup est en vacances. Il s'ennuie. Il commence à écrire, par bribes, une histoire, née d'une image, celle d'une limousine noire roulant sur un petit chemin de campagne. « Et petit à petit, les choses prennent une importance particulière. Vous vous prenez au jeu. Vous mettez ça en forme. Vous rentrez à Paris et on vous dit que vous faites un scénario «, dit-il.

Dans Le candidat, la voiture noire qui sillonne la campagne est celle de Michel Dedieu (Yvan Attal). La voiture s'avance à travers les champs de blés jusqu'aux grilles d'un domaine de campagne. Dans la maison s'active l'équipe de campagne d'un candidat: Dedieu.

Entre les deux tours, Michel Dedieu remplace au pied levé le candidat du premier tour de l'élection présidentielle, évincé pour cause de cancer. Entre l'ombre et la lumière, ses conseillers en communication le formatent-ils ou le manipulent-ils?

«J'avais envie de parler de manipulation. J'avais envie de parler du fait qu'une image est plus importante qu'une parole. J'avais envie de parler de ma propre paranoïa par rapport à la politique, explique-t-il. Le pouvoir n'est pas là où on croit.»

Le candidat se déroule dans un non-lieu, une maison bourgeoise, à la campagne, sans référence explicite au contexte français. Certes, le candidat sans charisme n'est pas sans rappeler Lionel Jospin, candidat malheureux à la présidentielle de 2002. Certes, la manipulation autour d'un bulletin de santé n'est pas sans rappeler François Mitterrand.

«Le thème n'est pas un thème français. C'est une métaphore par rapport à tout, et pas seulement à la politique. C'est une fable», estime Niels Arestrup. Une fable, oui, mais qui se montre drôlement visionnaire. On ne peut s'empêcher de sourire en voyant les rapports difficiles du candidat avec sa propre femme, qui disparaît, comme une certaine Cécilia, entre les deux tours.

En politique, dit Niels Arestrup, « il ne faut pas être naïf, c'est impossible. Il faut devenir un loup «. Considère-t-il son film comme cynique? «Oui, il est cynique, mais pourquoi pas?» demande-t-il. Et lui, croit-il que la politique peut changer la vie? «Je n'ai jamais voté de ma vie. Je n'ai jamais eu de cartes d'électeur. Je n'y crois pas. Je n'y ai jamais cru.»

Pour son deuxième scénario, Niels Arestrup se penche sur le fanatisme religieux des chrétiens, au Moyen-Âge. «Le fanatisme religieux, ça m'impressionne et ça me fait peur» plaide-t-il. Car oui, il y aura un deuxième film. «Je suis mordu, je suis accro à ça. Et maintenant, j'ai plus de plaisir à écrire qu'à jouer.»