Fort et original, Valse avec Bachir, où l'Israélien Ari Folman met en images d'animation la première guerre au Liban, faisait figure de favori mardi à mi-parcours du Festival de Cannes, dans une compétition toutefois très ouverte, émaillée de fictions au ton sombre.

Président du jury, l'acteur-réalisateur américain Sean Penn n'en a pas fait mystère dès le premier jour de cette 61e édition (14-25 mai) : la Palme 2008 sera politique, car elle ira à un cinéaste «conscient du monde qui l'entoure».

Un voeu qui semble facile à exaucer au vu d'une sélection émaillée de fictions réalistes, au ton grave, souvent proches du documentaire.

«Le cinéma a beau être un lieu de fantasmes et parfois de plaisirs illicites, la réalité (...) finit toujours par y faire irruption, que ça nous plaise ou non», jugeait lundi le quotidien américain New York Times.

Mardi alors que 12 des 22 films en lice pour la Palme d'or ont été dévoilés, Valse avec Bachir semblait devoir figurer au palmarès comme un an plus tôt un autre film d'animation singulier, Persepolis, couronné du Prix du jury.

«C'est une entreprise très étonnante, formellement très audacieuse, éligible à plus d'un titre» à la Palme, affirmait à l'AFP Emmanuel Burdeau, rédacteur en chef des Cahiers du cinéma.

«Humain, profond, sensible», ajoutait le monsieur cinéma de la chaîne Canal+, Laurent Weil, se disant «bouleversé» par Valse avec Bachir.

Un avis partagé par la dizaine de critiques du monde entier dont les avis sont compilés au quotidien par le magazine professionnel américain Screen.

Toutefois, ceux-ci plaçaient aussi parmi leurs favoris trois films fort appréciés à Cannes 2008 : Les trois singes du Turc Nuri Bilge Ceylan, 24 City du Chinois Jia Zhangke et Le silence de Lorna des Belges Dardenne.

Très applaudi mardi matin, The Exchange de Clint Eastwood est «trop classique pour Cannes», a déclaré à l'AFP Jean-Luc Wachthausen, du quotidien Le Figaro.

Quoi qu'il en soit la lutte était serrée, la plupart des oeuvres ayant été bien reçues, excepté Serbis du Philippin Brillante Mendoza souvent jugé voyeuriste et gratuitement choquant et, dans une moindre mesure, Blindness.

«La qualité générale des films est plutôt bonne... certains sont vraiment très bien réalisés», a dit à l'AFP Kirk Honeycutt, critique principal du Hollywood Reporter, mettant en avant deux chroniques sociales : Linha de passe des Brésiliens Walter Salles et Daniela Thomas, ainsi que l'Italien Gomorra, une puissante peinture de la mafia signée par Matteo Garrone.

Souvent sévères pour les productions nationales - ils avaient laminé les trois oeuvres montrées à Venise en 2007 - les critiques italiens étaient du même avis: Gomorra était ainsi le favori du quotidien La Repubblica.

Premier des trois films français en lice pour la Palme, Un conte de Noël d'Arnaud Desplechin a été chaleureusement accueilli... surtout par la critique française, relevait avec malice Hollywood Reporter.

En ce qui concerne les possibles prix d'interprétation, côté femmes l'Argentine Martina Gusman (Leonera), la Kosovare Arta Dobroshi (Le silence de Lorna) et l'Américaine Angelina Jolie (The Exchange) ont marqué.

Côté hommes, la prestation des comédiens de Gomorra était saluée, mais les festivaliers attendaient avec impatience Benicio Del Toro dans Che de Steven Soderbergh, montré mercredi.