Après Pollock, qui lui a valu des éloges en tant qu'acteur, mais aussi en tant que cinéaste, Ed Harris propose aujourd'hui un western sans rien céder à la modernité. Pour ce faire, il s'est entouré de gens qu'il aime: Viggo Mortensen, Renée Zellweger et Jeremy Irons. 

«Si Viggo n'avait pas accepté de jouer dans mon film, je ne suis pas certain que je l'aurais fait.» Cette déclaration traduit bien l'état d'esprit dans lequel Ed Harris a conçu Appaloosa, un western classique dont l'intrigue s'articule autour d'une amitié entre deux hommes. Dans son deuxième long métrage en tant que réalisateur, Harris prête ses traits au shérif d'une petite ville du Nouveau-Mexique encore soumise à la loi du Far West. Mortensen joue le rôle de son adjoint. Les choses se compliquent lorsque sévit la bande d'un dangereux hors-la-loi (Jeremy Irons), et encore plus quand arrive dans le décor une jeune veuve aux motivations ambiguës (Renée Zellweger). 

«Comme l'intrigue est basée sur une relation d'amitié entre de vieux complices, je trouvais essentiel de faire appel à un comédien avec qui je peux me faire comprendre sans parler», expliquait Harris au cours d'une conférence de presse tenue dans le cadre du Festival de Toronto, le mois dernier. 

«Ed m'a d'abord fait parvenir le roman de Robert B. Parker, duquel il a tiré son scénario. Nous nous étions bien entendus, lui et moi, sur le plateau de History of Violence et j'ai trouvé le roman particulièrement bien écrit. C'est un univers à la fois très cru dans lequel on retrouve quand même une certaine délicatesse dans la peinture des sentiments. Ce qui est rare pour un western. En fait, je l'ai vu un peu comme un Jules et Jim de l'Ouest!» lance-t-il en riant, faisant ainsi écho au fait que les deux amis tombent amoureux de la même femme. 

Mortensen ne cache pas que dans son esprit, la plupart des westerns sont «terribles». «Mais quand ils sont réussis, ils sont vraiment bons, ajoute-t-il. Je pense notamment à des films comme Man in the West (Anthony Mann, 1958), The Missouri Breaks (Arthur Penn, 1976) ou, plus récemment, Open Range (Kevin Costner, 2003).» 

Fidèle au genre 
Prenant toujours plaisir à camper un personnage issu d'une autre époque, Viggo Mortensen explique ainsi la renaissance ponctuelle d'un genre souvent considéré comme moribond. «Jouer dans un western fait indéniablement appel à notre part d'enfance», dit-il. 

De son côté, Harris s'est donné pour mandat d'être fidèle à un genre intrinsèquement américain, qui a marqué l'imaginaire du cinéma. 

«Pour les besoins de la cause, j'ai revu plein de classiques du genre, de Liberty Valence jusqu'à Unforgiven, en passant par High Noon, My Darling Clementine et tant d'autres. Je me suis immergé complètement dans ces univers, car en tant que cinéaste, je voulais que mon film soit authentique, qu'il reste fidèle à l'époque et au genre. Je ne voulais surtout pas moderniser mon approche pour rendre le film plus séduisant aux yeux d'un certain public.» 

Cette approche sans concessions explique sans doute les difficultés qu'a rencontrées Harris pour financer son film, mais son obstination lui a toutefois donné raison. Déjà sorti aux États-Unis, Appaloosa obtient en effet là-bas un beau succès critique.
Appaloosa est présentement à l'affiche en version originale anglaise.