«Si je rentre en Iran, je suis sûr qu'on ne m'autorisera pas à tourner», affirme le cinéaste Bahman Ghobadi, décidé à s'exiler après avoir dénoncé la répression qui frappe les jeunes musiciens de son pays avec son film Les chats persans, présenté au Festival de Cannes.

«Je suis venu à Cannes deux ou trois fois avec joie, mais là je me demande ce que je fais ici», dit ce réalisateur qui fait l'ouverture du Certain regard (hors compétition pour la Palme d'or) avec un film-évènement, jeudi soir.

Les chats persans montre sous un jour inédit une jeunesse iranienne en quête de liberté.

Ghobadi l'a coécrit avec sa compagne, la journaliste irano-américaine Roxana Saberi, accusée d'espionnage par Téhéran et condamnée à huit ans de prison avant d'être libérée lundi, après avoir vu sa peine ramenée à deux ans avec sursis. Espérée à Cannes, la jeune femme n'est finalement pas venue.

Malgré l'excellent accueil réservé aux Chats persans sur la Croisette par critiques de cinéma et distributeurs, Ghobadi est pour le moins mélancolique.

«Je suis triste, si triste, à propos de ma vie, mon travail, ma situation. Je ne sais plus quel est mon pays. Je ne peux pas retourner en Iran, mais où vais-je aller ... en Grande-Bretagne? Aux Etats-Unis?», demande-t-il.

«Si je rentre en Iran, je suis sûr qu'on ne m'autorisera plus à tourner. On va me contrôler, on ne me laissera plus jamais faire un film underground comme celui-là», dit-il.

«J'ai 39 ans, j'ai besoin d'aller quelque part où je pourrai faire des films. C'est si dur, tout est sombre pour moi aujourd'hui», dit le réalisateur qui en 2000 avait remporté la Caméra d'or décernée au meilleur premier film, avec Un temps pour l'ivresse des chevaux.

Tourné dans l'urgence en 17 jours, sans autorisation, Les chats persans suit à Téhéran, deux jeunes musiciens à peine sortis de prison, Ashkan (Ashkan Koshanejad) et Negar (Negar Shaghaghi) en quête d'un visa pour l'Europe.

Au long d'un film aux allures de documentaire, où tous les acteurs jouent leur propre rôle, Ghobadi lève le voile sur l'extraordinaire bouillonnement culturel, clandestin car vigoureusement réprimé, de la jeunesse iranienne.

??la recherche de musiciens pour monter un groupe de rock, les héros croisent des jeunes qui trompent la censure en répétant dans des studios de fortune aménagés dans sous-sols et même dans une grange, au milieu des vaches.

Interdiction d'enregistrer un disque, de donner un concert ou même de répéter, sous peine de lourdes amendes, de coups de fouet ou de prison : face à la dureté de la censure, nombre de jeunes Iraniens se résignent à l'exil.

«Si je n'avais pas fait ce film, vous ne sauriez pas ce qui se passe en Iran», dit Bahman Ghobadi. «Je pourrais faire cent films sur ces groupes, il y en a bien plus que je ne pourrais en montrer».

Les deux jeunes acteurs du film, Ashkan Koshanejad et Negar Shaghaghi, ont affirmé à l'AFP ne pas avoir non plus l'intention de rentrer en Iran.

«Nous ne faisons pas de politique, nous ne voulons pas changer le pays, nous voulons juste faire de la musique», a affirmé Ashkan Koshanejad.

«90 % du film est la réalité. Il y a un an et demi, j'ai été emprisonné pendant trois semaines pour avoir donné un concert de rock», a-t-il ajouté.

Cancans de Cannes

> Les Arts et Lettres pour Johnnie To

Le cinéaste et producteur hong-kongais Johnnie To sera fait officier dans l'Ordre national des Arts et des Lettres lundi à Cannes, par la ministre de la Culture Christine Albanel. Johnnie To est en compétition officielle avec son dernier film, Vengeance, qui aura été présenté la veille, en présence de son interprète principal Johnny Hallyday.

> Coppola n'aime pas quitter sa famille

On le savait, mais il l'a redit lui-même jeudi sur la Croisette. Francis Coppola n'aime pas quitter sa famille. C'est donc entouré de son épouse Eleanor et de son fils Roman que le cinéaste, chemise jaune et célèbres rondeurs, est venu présenter son dernier film, Tetro, qui évoque lui-même des histoires de famille. «Je suis très attaché à ma famille et je n'aime pas en être séparé pendant des mois pour tourner mes films», dit le réalisateur du Parrain. «Depuis que mes enfants sont petits, je leur fais faire l'école buissonnière pour les emmener sur les tournages, comme celui de Apocalypse Now, ils y ont acquis le savoir et l'expérience réelle du cinéma. Quant à ma femme, j'avais envie qu'elle soit là, sur les tournages. Je lui ai acheté une petite caméra en espérant qu'elle ne la jetterait pas !». Depuis, dans la famille Coppola, la mère fait des documentaires, la fille Sofia, on le sait, des films, et le fils Roman a été notamment le chef de la seconde équipe de Tetro.

> Studio 37 (France Telecom) a «une affection particulière» pour Forest Whitaker

L'acteur américain Forest Whitaker, connu notamment pour son interprétation magistrale de Charlie Parker dans le Bird de Clint Eastwood, jouera dans deux films coproduits par Studio 37 : My own love song d'Olivier Dahan, un road movie sur une musique de Bob Dylan, avec Renée Zellweger, et Lullaby for Pi, un long métrage de Benoît Philippon sur un chanteur de jazz qui a du mal à se remettre du décès de sa femme. La sortie en salle des deux films est prévue au 1er semestre 2010. «On s'est rendus compte qu'on avait une affection particulière pour Forest Whitaker. C'est une question de relations humaines», a déclaré la directrice générale de Studio 37, Frédérique Dumas, jeudi à Cannes.

> Audigier sur l'Octopuss

Avant une fête au VIP Room avec les présences confirmées de Prince, Fifty Cent et Lenny Kravitz, le styliste français Christian Audigier, nouvelle coqueluche du showbiz américain, a trouvé une table à sa mesure pour son dîner d'anniversaire, le 21 mai : en baie de Cannes, il sera l'hÈte du milliardaire Paul Allen, le cofondateur de Microsoft, à bord de l'Octopuss, l'un des plus beaux yachts du monde, long de 126 m et disposant d'un terrain de basket et d'un sous-marin privé.