Le réalisateur Émile Proulx-Cloutier (il a cosigné Les petits géants avec Anaïs Barbeau-Lavalette) est à Locarno avec son troisième court métrage, La vie commence, un film sombre, mais porteur d'espoir tourné en 2007. Également comédien, il est aussi de la distribution de la nouvelle série de TVA, Toute la vérité, ainsi que de Sophie Paquin. On le retrouvera en outre au théâtre à l'automne.


Q La vie commence amorce officiellement sa carrière au Festival de Locarno?


R Oui, le film commence sa vie de festivals. Je pars là-bas pour l'accompagner, pour profiter du lieu et rencontrer des gens. On a souvent parlé en bien de cet endroit consacré au bon cinéma d'auteur.


Q Comment est né ce film?


R La source est assez sensorielle. D'un côté, il y avait des petits bouts, des petits moments, des idées de tableaux qui me trottaient dans la tête, qui se rapprochaient des sensations de solitude, de passage de l'adolescence quand on ne sait pas où s'enraciner. Il y avait ces actions toutes simples, et des impressions qui me venaient de paysages. Quand je circulais en voiture autour de Montréal, certains paysages de banlieue avaient une sécheresse, créant une sensation en moi. Je retrouvais l'espèce de néant intérieur que l'on peut ressentir à l'adolescence. Il y a quelque chose qui m'a donné envie de laisser ces lieux se raconter. Je voulais une trame assez ténue, assez simple, rattachée à une sensation de solitude.


Q Le film insiste sur le silence et l'isolement d'un père et de ses fils, qui vivent côte à côte, mais ne se parlent pas, n'est-ce pas?



R Il y a une impression de famille éclatée. Pour moi, la mère n'est pas là. Dans cette maison, chacun vit un peu de son côté. Le père et les deux frères se connaissent peu. Les frères n'ont pas grand-chose en commun, du moins, c'est ce qu'ils pensent. L'un est retenu, il semble très sage dans son costume de collège; l'autre est plus vieux, mais il est pris dans un travail qui le frustre. Ce que je voulais, c'est avoir accès à des personnages avec le moins de mots possible. Je voulais que l'on comprenne tout de suite qui ils sont et d'où ils viennent. Je voulais faire parler les lieux et les visages, comme dans un haïku. C'était mon défi: que chaque plan soit un haïku.


Q Comment avez-vous choisi Maxime Dumontier pour le film?


R Le film a été tourné en septembre 2007. On sait depuis longtemps que Maxime est un très bon acteur. Le regard qu'on a sur lui a pris une ampleur importante avec la sortie de Tout est parfait, en 2008. Je l'avais rencontré pendant le tournage du Ring d'Anaïs Barbeau-Lavalette. En audition, j'ai vu qu'il portait beaucoup. Il y a aussi un rapport de contraste qui s'installe avec Vincent Proulx-Hébert. Le contraste entre les frères est très important. Dès que j'ai choisi Vincent, Maxime s'est imposé, avec son visage massif, très beau, mais des traits durs et un peu ravagés. C'est quelqu'un de très précis et de très bon.


Q Il s'agit de votre troisième court métrage. Vous avez déjà réalisé un long métrage documentaire avec Anaïs Barbeau-Lavalette (Les petits géants). Avez-vous d'autres projets?



R Nous écrivons ensemble un autre long métrage documentaire. J'ai fait beaucoup de fiction, je joue beaucoup, mais le documentaire, cela m'a beaucoup intéressé. Même si on maîtrise ce que l'on raconte, en documentaire, on n'est pas le seul maître à bord.