Danièle Thompson raffole des plateaux de tournage conviviaux. Elle s'est fait plaisir à plein avec Le code a changé, où elle suit les chassés-croisés intimes de 10 personnages disparates, rassemblés pour un dîner, prétexte idéal pour aborder en filigrane l'épineux sujet de «la dictature des apparences».

En entrevue au Soleil, alors qu'elle venait tout juste d'arriver à Montréal pour présenter son quatrième long-métrage au Festival des films du monde, la réalisatrice de La bûche et de Fauteuils d'orchestre, deux autres films choraux, parle avec enthousiasme des dessous de sa nouvelle offrande, coécrite avec son fils Christopher.

Dix personnages, donc, issus de milieux et de professions différentes, qui tenteront, le temps de deux dîners tenus à un an d'intervalle, de jouer le jeu des conventions et de faire bonne figure devant les autres, malgré leurs états d'â­me. Le secret : suivre le bon code. Plus facile à dire qu'à faire. Résultat : sur le chemin du retour, les masques tombent et les couples lavent leur linge sale...

«C'est un choix de sortir, le soir, pour aller à une réception, alors qu'on a eu une journée merdique, avec le travail, le stress, les enfants, les problèmes de couple et de santé, explique la fille du célèbre cinéaste Gérard Oury. Alors, le plus souvent, on met un masque. Les couples en chicane font semblant de s'aimer. C'est la moindre des choses de ne pas montrer ses soucis devant les autres. À cet égard, mon père avait une jolie maxime : Il est poli d'être gai.»

L'âge du changement

Les personnages du Code a changé sont avocats (Karin Viard et Christopher Thompson), médecins (Marina Foïs et Patrick Bruel), homme au foyer (Dany Boon), écrivaine en devenir (Emmanuelle Seigner), petit comédien (Patrick Chesnais)... Pour la plupart âgés dans la quarantaine, une période charnière, que ce soit au travail ou dans la vie sentimentale. La réalisatrice se défend d'avoir voulu tracer un portrait sombre de la génération des fortysomething.

«Dans la quarantaine, on est encore jeunes et séduisants. Tout est encore possible, mais c'est vrai que c'est un moment clé dans la vie de couple. On se remet en question. La lassitude amoureuse ou la fin de la passion peuvent s'installer. Ça passe ou ça casse. À cet âge, le changement est encore possible.

«Il y a des couples qui sont faits pour durer, d'autres pas, ajoute-t-elle. Dans le film, la rupture s'avère la meilleure solution pour Sarah (Emmanuelle Seigner) et Lucas (Christopher Thompson), alors que pour Marie-Laurence (Karin Viard) et Piotr (Dany Boon), on devine qu'ils vont savoir repartir (sur de nouvelles bases). La solution n'est pas la même pour tout le monde. Je crois qu'il faut avoir une vision lucide du couple, mais je demeure pleine d'espoir. Moi-même, je suis avec le même homme depuis 35 ans. Il faut beaucoup d'intelligence et de travail pour arriver à ce que ça marche.»

Mot-clé : l'écriture


Forte d'une distribution comptant de grosses pointures, Danièle Thompson s'emballe en repensant aux moments «jouissifs» d'avoir eu à sa disposition «autant de merveilleux acteurs».

«C'est quelque chose de très exaltant, confie-t-elle. Pour un chef d'orchestre, c'est toujours plus agréable de jouer avec 20 musiciens que seulement trois. (...) Mon ingénieur du son a travaillé comme un fou pour les scènes de repas. Il a fallu refaire les scènes de multiples fois. Je voulais pouvoir choisir tout ce que je voulais. Ç'a été assez rock'n roll...»

On peut dire que Danièle Thompson est allée à la bonne école. À seulement 24 ans, en 1966, elle commençait à travailler avec son père sur ce qui allait devenir un classique du cinéma français, La grande vadrouille. Neuf autres scénarios (dont Les aventures de Rabbi Jacob, encore une fois avec Louis de Funès) sont nés de cette collaboration père-fille. D'où son amour des mots et des dialogues. Encore aujourd'hui, à la veille d'entreprendre le tournage de son cinquième film, elle se sent davantage interpellée par le récit.

«Je me considère d'abord com­me une scénariste. J'ai le réflexe de penser au prochain film que je vais écrire, plutôt qu'à celui que je vais tourner. Le mot-clé, c'est l'écriture. C'est là que je sais si j'ai un film ou pas.»

Le code a changé prendra l'affiche en salle vendredi prochain.