L'ennemi numéro un de la droite américaine, Michael Moore, strikes back! Avec l'excellent Capitalism : A Love Story, le célèbre cinéaste pamphlétaire assène cette fois un coup de poing dévastateur à Wall Street et à tous les responsables des magouilles bancaires qui ont mené des millions de ses concitoyens à la rue.

Plus cinglant que Sicko, et surtout moins nombriliste que Captain Mike America Across America, ce dernier brûlot s'inscrit en ligne droite dans le documentaire engagé à la sauce Moore, à la fois instructif, divertissant et délicieusement ironique.

Dès le début, Moore frappe fort, appuyé par les images d'un péplum hollywoodien. À ses yeux, les États-Unis d'aujourd'hui ont toutes les allures de l'empire romain. Et si rien n'est fait, la chute est inévitable. Comme à l'époque de César, la disparité entre les riches et les pauvres est devenue trop criante.

À Flint, au Michigan, son patelin natal, il retourne sur les lieux de l'ancienne usine GM avec son père, un ex-travailleur de l'empire déchu. Des villes comme Flint, ravagées par la crise économique, les États-Unis en comptent maintenant des milliers, constate-t-il avec indignation.

Le documentariste a la mémoire longue. Et une façon bien à lui de recouper les événements pour illustrer ses thèses. À ses yeux, le premier responsable de ce fiasco s'appelle Ronald Reagan.

Au début des années 80, l'ex-acteur devenu président a ouvert la porte à la déréglementation des marchés et refilé le contrôle du pays aux grandes corporations. Pendant que le Dow Jones explose, les citoyens payent le gros prix : augmentation des faillites, mises à pied, primes d'assurance santé... Les riches s'en mettent plein les poches, les pauvres boivent la tasse.

Vingt ans plus tard, la situation a empiré. Wall Street est devenu un Las Vegas où tous les investisseurs parient sur n'importe quoi, sans devoir rendre de compte à personne. Et Moore de s'insurger. Avec raison. Comme nous.

Les magouilles des banques pour faire des millions sur le dos des petits épargnants font dresser les cheveux sur la tête. Quelques tours de passe-passe avec les compagnies d'assurances et le tour est joué. Ni vu ni connu.

Le plan de sauvetage des banques américaines par le Congrès, à coups de milliards pigés dans les poches des contribuables, est descendu en flam­mes par Moore. «Une opération digne de la CIA orchestrée aux plus hauts niveaux», juge-t-il.

Au passage, Moore ne peut résister à la tentation de décrocher quelques flèches à sa tête de Turc favorite, George W. Bush. Pas trop, heureusement. On sent que le clou est usé.

Fidèle à sa réputation de mouche du coche, Moore n'hésite pas à louer un camion blindé pour aller récupérer l'argent des contribuables aux grandes ban­ques new-yorkaises. Et de guerre lasse, en guise de symbole, d'installer un ruban jaune de scène de crime autour d'un édifice...

On pourra dire ce que l'on voudra de Moore et de son style particulier, il n'en demeure pas moins qu'il reste l'un des rares cinéastes à monter aux barricades pour défendre les gagne-petit et les sans-voix.

En cela, un film comme Capitalism : A Love Story est un film essentiel qu'il faut voir pour mieux comprendre ce qui cloche dans un système où la cupidité règne en roi et maître.

Et surtout, pour conserver intact notre sentiment d'indignation.

*** 1/2 Capitalism : A Love Story, de Michael Moore. À l'affiche le 2 octobre