Malgré la baisse des ventes, malgré la conversion des consommateurs au Blu-ray plus lente que ne l'imaginaient les studios, malgré la télé à la carte, malgré le téléchargement (légal ou illégal), malgré la consommation sur support numérique, le DVD et son jeune frère (ennemi?) le Blu-ray ont encore de belles années devant eux, une situation différente de celle du CD.

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«Il y a une grande différence entre la consommation de films et celle de musique», explique Awnish Srivastava, vice-président marketing chez Warner Home Entertainment Canada, rencontré à Toronto.


«Votre musique, poursuit-il, vous la mettez dans votre iPod parce que vous la voulez avec vous dans la voiture ou sur votre lieu de travail, quand vous faites votre jogging ou votre promenade à pied. Mais pour les films que vous consommez ailleurs qu'au cinéma, l'appareil de visionnement privilégié reste la télévision.» Bien sûr pourvue d'un lecteur de DVD ou de Blu-ray.


Il y a pourtant eu, l'an dernier, une diminution des ventes et de la mise en marché dans le secteur du divertissement à domicile: selon The Digital Entertainment Group (DEG, un groupe à but non lucratif qui étudie cette industrie), on parle, pour le marché états-unien, d'un recul des ventes de 3,2% pendant le troisième trimestre de 2009 et d'une diminution, pour 2009 au complet, de 6% de la mise en marché.


Pour Mathieu Daoust, rédacteur en chef du site DVDenfrancais.com, la diversification de l'offre (DVD, VOD, téléchargement, visionnement en ligne) explique ce ralentissement. Awnish Srivastava montre du doigt la récession. Selon lui, il est même possible que les effets de la crise économique se fassent encore sentir cette année et que la reprise n'ait lieu qu'en 2011.


Mais pour Warner et les autres studios américains, ces effets négatifs se reflètent non pas sur les nouveautés, mais sur les titres au catalogue. «En cette période où vous devez faire des choix, allez-vous acheter The Hangover et le nouveau Harry Potter ou une nouvelle édition d'un vieux film que vous aimez? Les deux premiers, c'est ce que disent nos chiffres», souligne Awnish Srivastava.


Marché à maturité


C'est pour cela que les studios ne s'inquiètent pas trop. «Le marché arrive à maturité, mais nous n'avons pas encore atteint la saturation, croit Mathieu Daoust. Et le support physique va continuer à exister.» Ne serait-ce que grâce aux nombreux collectionneurs.


Sauf que le support en question va changer: autant à ses yeux qu'à ceux d'Awnish Srivastava, le Blu-ray est appelé à remplacer, à moyen terme, le DVD. Exactement comme celui-ci a pris la place du VHS... qui avait éliminé le Beta.
Ce, même si le dernier-né des supports de films prend son envol plus lentement que prévu, selon les studios. À cause de la récession, mais surtout, indique Mathieu Daoust, parce que même si le prix des lecteurs Blu-ray a beaucoup baissé, les disques eux-mêmes restent plus chers que les DVD.


Awnish Srivastava mentionne quant à lui un fait qui peut sembler anecdotique pour les technophiles mais qui n'en est pas moins véridique: «Beaucoup de gens n'ont pas encore assimilé le fait que le lecteur Blu-ray peut lire les DVD - donc, qu'ils ne perdront pas leur collection en changeant de technologie.» Comme cela s'est fait lors du passage du VHS au DVD.


Mais on est loin de désespérer: l'an dernier, selon John Grant, directeur général de Warner Home Entertainment Canada, le Blu-ray a représenté presque 20% de leurs ventes - ce qui est deux fois plus qu'en 2008 et, aussi, plus qu'aux États-Unis, où la transition est plus lente encore.


Et Awnish Srivastava d'ajouter que les ventes de lecteurs Blu-ray sont actuellement au même niveau que l'étaient celles de lecteurs DVD quand ce support avait la même ancienneté sur le marché, que celle qu'a aujourd'hui le Blu-ray.


Les studios mettent par contre au point des stratégies pour inciter les acheteurs potentiels à se convertir. Les «combos» en sont un exemple: on retrouve, dans un même boîtier, des versions DVD, Blu-ray et numérique d'un même film - l'ensemble revenant à 50 à 70% du prix que coûterait l'achat des supports séparément.
«C'est quelque chose qui marche très bien pour les films familiaux et pour les enfants, note Awnish Srivastava. Vous avez une copie pour la télé, une copie pour le lecteur portable dans l'auto et une autre pour l'ordinateur.» Il le dit lui-même, «l'important, peu importe la manière dont ils le font, c'est que les gens continuent à consommer des films. Nous leur présentons différents moyens de le faire, c'est à eux de choisir.»