Son premier long métrage, Continental, un film sans fusil, avait fait le circuit des festivals internationaux et remporté les plus prestigieux prix Jutra en 2008 (meilleur film, réalisation et scénario). Stéphane Lafleur termine présentement le tournage de son deuxième long, En terrains connus, avec la même équipe de production et la même fascination pour l'inquiétante étrangeté du monde ordinaire.

«Ce film-là, c'est une drôle de bibitte», lance Stéphane Lafleur, bien en peine d'avoir à le décrire. En terrains connus met en vedette Fanny Mallette et Francis La Haye dans les rôles d'une soeur et d'un frère, Maryse et Benoît, qui doivent se rendre au chalet familial pour récupérer une pelle mécanique... La présence d'un homme qui prétend connaître le futur oriente un peu leur chemin, paraît-il.

Raconté comme cela, impossible d'avoir une idée précise du ton qui sera donné, mais si l'on se fie à l'atmosphère de Continental, un film sans fusil, on sait qu'En terrains connus sera tout sauf banal. Ou plutôt, sera peut-être banal jusqu'à l'absurde. D'ailleurs, la visite de plateau des médias lundi s'est déroulée dans un centre commercial quelque peu glauque et kitsch de l'arrondissement de Saint-Laurent.

«Le petit côté science-fiction sera plus assumé, explique le réalisateur. J'aime que cet élément fantastique soit filmé de façon réaliste, alors que la vie dépasse souvent la fiction, et même, la science-fiction! Le titre fait référence aux lieux communs que sont la famille, les relations frère et soeur, la vie ordinaire...» Et dans lesquels il s'amusera sûrement à nous déstabiliser.

Sans vouloir faire de mauvais jeux de mots, Stéphane Lafleur se dit effectivement «en terrain connu» puisqu'il s'est entouré de la même équipe de production que son premier film. Après tout, la collaboration a été fructueuse. Quant au trac causé par les attentes d'un milieu qui a très bien reçu Continental, un film sans fusil, il ne s'en fait pas trop.

«Je n'y pense pas du tout, en fait, dit-il. Je trouve ça nombriliste de s'en faire pour ça. Et puis, nous avons commencé le tournage alors que le séisme en Haïti venait tout juste d'arriver, alors ça relativise les choses...»

Anthropologue

«Stéphane est un peu comme un anthropologue qui regarde les êtres humains vivre; il est très observateur, note Fanny Mallette, qui collabore de nouveau avec le réalisateur, en prêtant ses traits à Maryse. Son premier projet depuis son retour d'un congé de maternité - un troisième enfant pour la comédienne - qu'on a vue dernièrement dans Les sept jours du talion de Podz. «Eh oui, ça fait du bien d'être en terrain connu, car on ne change pas trop d'univers, ajoute-t-elle. Avec Stéphane, il faut apprendre à ne pas trop jouer, à rester sobre dans l'interprétation. Il faut plutôt être habité.»

«Benoît est un personnage attachant, un ado attardé qui n'a pas toujours fait les bons choix dans la vie, d'où sa frustration et la peine qu'il porte, explique Francis La Haye. Il aura l'occasion de s'ouvrir au contact de sa soeur.» Le comédien avait travaillé au bruitage sur Continental, un film sans fusil.

«Je connais bien le travail de Stéphane pour l'avoir décortiqué et apprécié. C'est un plus pour moi. Quand je suis sorti de l'école de théâtre il y a cinq ans, j'aurais voulu ce rôle que je ne l'aurais pas eu; je suis content d'avoir cette occasion maintenant.» Le jeune homme de 33 ans a plusieurs cordes à son arc, étant aussi musicien et danseur - on l'a vu dernièrement dans le spectacle Un peu de tendresse bordel de merde de Dave St-Pierre.

«L'absurde, qui est plutôt rare au cinéma, peut être perçu comme du drame, mais au fond c'est une comédie», croit le comédien Sylvain Marcel, qui joue Alain, le mari de Maryse dans le film. «Mon personnage ne sait pas trop comment dealer avec les situations, il est super maladroit. Son principal hobby, c'est de faire le Tour de France dans son salon, sur un vélo stationnaire!»

En terrains connus, produit par micro-scope et distribué par Les films Christal, devrait prendre l'affiche à l'automne, il met aussi en vedette Michel Daigle, Suzanne Lemoine et Denis Houle.