Son nom était sur toutes les lèvres au festival de Sundance. Rajesh Ji, détective privé et danseur du dimanche, est le personnage principal d’un documentaire irrésistible, qui offre une vision décalée et originale de la classe moyenne indienne.

The Bengali detective du Britannique Philip Cox, en compétition au 27e festival du cinéma indépendant, a bénéficié d’une belle cote d’amour auprès des festivaliers dans les montagnes de l’Utah .

Philip Cox a installé sa caméra à Calcutta, dans les bureaux de Rajesh, l’un des innombrables détectives privés exerçant en Inde. «Toutes les classes utilisent les services de détectives, car personne en Inde n’a confiance dans la police», explique Philip Cox à l’AFP.

«Les riches peuvent payer, peuvent verser des pots-de-vin, mais la grande majorité de la classe moyenne fait appel à des détectives». «Mon but était aussi de montrer l’Inde à travers ses classes moyennes et pas à travers l’extrême pauvreté ou les milliardaires», poursuit-il.

«Le film, pour moi, est un espace dans la société qui me permet de découvrir ou d’apprendre des choses que les gens ne partagent normalement pas». «Aller voir un détective, c’est comme aller au confessional, à l’église. Les gens dévoilent des choses», poursuit-il.

Si le film est un confessional, alors Rajesh est un prêtre plutôt original. Car outre ses activités de détective, il est également passionné de danse, au point d’inscrire toute son escouade de fins limiers jeunes, vieux ou ventrus à un concours de télé-réalité, et de leur faire prendre des cours de danse. «Rajesh n’est pas un très bon détective.

Mais c’est un homme pris dans l’oeil du cyclone, qui doit faire face à ses problèmes personnels à ce qui l’entoure», observe M. Cox. «On l’aime comme il est. Il a ce rêve de devenir danseur, mais ce n’est qu’une fuite, pour échapper à la dure réalité». Car Rajesh est aussi un mari et un père inquiet, qui voit décliner impuissant la santé de son épouse «un mariage d’amour», tient-il à souligner et qui élève son fils dans la glorification de son métier de détective.

«Rajesh se considère comme un héros dans la société indienne. Mais mon travail était de révéler l’envers du décor. On réalise alors qu’il y a beaucoup de choses qu’il ne contrôle pas. Il est un peu naïf et innocent», observe-t-il.

S’il n’est pas le plus talentueux des Sherlock Holmes, Rajesh n’en a pas moins de très nombreux clients, et ses enquêtes constituent le fil rouge du documentaire: une entreprise de cosmétiques qui traque les contrefaçons de ses produits, une femme qui soupçonne son mari d’adultère, et une famille qui veut faire la lumière sur un mystérieux triple meurtre, «la plus grosse affaire criminelle à Calcutta depuis des années», souligne le cinéaste. «Nous ne savions pas (qui était le coupable).

Cela pouvait être la femme qui se tenait devant nous. Le cameraman me suppliait: «Ne me laisse pas seul dans cette maison, je t’en prie!».

Nous ne savions jamais ce qui se passerait le jour suivant. C’est excitant, mais pour un cinéaste, c’est aussi épuisant, car vous ne savez jamais si vous allez pouvoir boucler l’histoire», dit-il.

Le potentiel du film n’a pas échappé aux studios hollywoodiens qui, en quête de sang frais, se pressent à Sundance chaque année.

La Fox, qui rêve d’un nouveau «hit» indien après le succès de son film Slumdog millionaire, a racheté les droits du documentaire pour en faire un film de fiction. Philip Cox fera partie du projet, mais n’a pas l’intention de le réaliser. «J’ai toujours été attiré par le réel. Je pense que si on allie le réel à l’esthétique cinématographique, on obtient des choses formidables. Mais je reste un documentariste», conclut-il.