Présenté hier en compétition officielle, le premier long métrage de François Péloquin susciterait maintenant l'intérêt des programmateurs d'autres festivals.

C'était hier le grand jour pour l'équipe du film québécois Le bruit des arbres. Sélectionné dans la compétition officielle du 50e Festival de Karlovy Vary, le premier long métrage de François Péloquin a été présenté dans le magnifique «Grand Hall» de l'hôtel Therma. On notait peu de sièges vacants dans cette salle de 1146 places. Et toujours aussi peu à la fin de la projection. Dans le cadre d'un festival, cela est généralement bon signe. Des applaudissements sincères se sont fait entendre dès l'apparition du générique de fin.

On ne parlera pas ici de triomphe ni de coup de coeur intempestif, mais Le bruit des arbres a fait l'objet d'une écoute attentive de la part des festivaliers. Qui lui ont réservé un accueil très respectueux.

Sur scène, le cinéaste était flanqué de ses plus proches collaborateurs: le producteur Ziad Touma, la coscénariste Sarah Lévesque, ainsi que les deux vedettes du film, Antoine L'Écuyer et Roy Dupuis.

«Depuis le début de ce projet, il y a sept ans, nous nous sommes dit que nous voulions faire un film qui ressemblerait à un film qu'on aimerait voir nous-mêmes, a-t-il déclaré. Je regarderai ce long métrage une fois de plus avec plaisir, mais cette fois avec vous!»

Se posant plus du côté de la chronique sociale à la Démantèlement que de celui de la chronique décalée à la Tu dors Nicole, Le bruit des arbres évoque un moment décisif dans la vie d'un jeune homme de 17 ans. Dans le petit village gaspésien de Saint-Ulric, où il vit désormais seul avec son père Régis (Roy Dupuis), Jérémie (Antoine L'Écuyer) préfère de loin les virées avec ses amis au travail à la scierie paternelle. Le jeune homme aime aussi sa bagnole, la mécanique et la vitesse. Il rêve tout autant de culture hip-hop et d'urbanité. Bref, Jérémie sent bien que les limites imposées par son cadre de vie commencent à devenir bien étroites.

Une approche très fine

Le «mal-être» masculin québécois a déjà été beaucoup exploré dans notre cinéma, mais le scénario de Sarah Lévesque et François Péloquin emprunte une approche très fine à cet égard. Dans cet environnement de gars, où le langage ne passe pas exclusivement par la parole, on se tient toujours dans le concret des choses. Parce que «dans le bois», la vie est ainsi faite.

Antoine L'Écuyer et Roy Dupuis modulent d'ailleurs avec brio une partition qui, tout en évoquant l'âpreté du mode de vie des personnages, distille une infinie délicatesse. Dénué de tout sentimentalisme, Le bruit des arbres fait aussi écho à la difficulté de l'existence à l'extérieur des grands centres urbains. Et la fracture générationnelle qui la caractérise.

Lors d'une conférence de presse tenue au beau milieu de l'après-midi, assez peu fréquentée (une vingtaine de journalistes au rendez-vous), les deux acteurs ont notamment rappelé leur passé commun. Il y a quelques années, ils avaient en effet déjà formé un tandem père-fils dans la série télévisée Les rescapés.

«Quand j'ai quitté Antoine, il était encore un enfant, a déclaré Roy Dupuis. Là, je le retrouve. Et j'ai un homme en face de moi. Le rapport père-fils dans Le bruit des arbres est aussi très différent. Contrairement au personnage des Rescapés, un policier très rigide, Régis voit presque son fils comme un ami. Il a même parfois des comportements qu'on associerait davantage aux jeunes et aux ados. J'aime jouer avec Antoine. Je pense qu'on travaille bien ensemble.»

Autant en conférence de presse que lors de sa présentation avant la projection officielle, François Péloquin a justement tenu à souligner l'apport créatif de ses comédiens.

«Tous les deux ont une présence physique très forte. Ils peuvent exprimer beaucoup de choses sans rien dire. Les questions qu'ils posaient, les discussions que nous avons eues, ont aussi beaucoup aidé à la mise en scène.»

Évoquant son admiration pour des cinéastes comme Carlos Reygadas, Joachim Lafosse ou John Cassavetes («un maître»), le cinéaste ne revendique aucune influence directe dans ce cas-ci. À un journaliste qui lui demandait à quoi ressemblait son travail en publicité, le cinéaste a préféré évoquer surtout un apprentissage technique.

«Je ne renie pas mon travail en publicité, mais cela n'a rien à voir avec le tournage d'un film pour le cinéma. Le tournage du Bruit des arbres, pour moi, c'était comme déballer un cadeau de Noël. Tout le temps!»

De l'intérêt

Quelle est maintenant la suite des choses? Le producteur Ziad Touma n'était pas encore en mesure de confirmer quoi que ce soit hier, mais le film aurait suscité de l'intérêt auprès de programmateurs de festivals importants, venus ici en éclaireurs.

Autrement dit, la carrière du Bruit des arbres sur le circuit des festivals internationaux ne devrait en principe pas s'arrêter ici. Le service des ventes internationales commencerait aussi à s'activer.

L'équipe du film, déjà emballée par cette sélection à Karlovy Vary, savourait surtout le moment, soulagée par l'accueil favorable que lui ont réservé les festivaliers.

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Le bruit des arbres est présentement à l'affiche au Québec.

Les frais de voyage ont été payés par le Festival de Karlovy Vary.