À 25 ans, Daniel Radcliffe a déjà une quinzaine d'années de carrière et une bonne vingtaine d'apparitions au grand et au petit écran. Depuis la fin de la franchise Harry Potter, il alterne entre la scène et les films indépendants. Le voici dans The F Word de Michael Dowse, qui est sa première comédie. «Et mon premier rôle contemporain», soulignait-il dans l'entrevue qu'il a accordée à La Presse.

«Harry Potter était dans son propre monde. Puis, il y a eu The Woman in Black, qui se déroulait au début du XXe siècle, et Kill Your Darlings, dans les années 40», résume-t-il. En fait, sa relation avec les films d'époque remonte même à son premier rôle, alors qu'il jouait David Copperfield dans le téléfilm homonyme et se poursuit jusqu'à demain, puisqu'il vient de terminer le tournage de Frankenstein, que l'on découvrira l'an prochain.

C'est une des raisons qui l'ont poussé en direction de The F Word. Avoir la chance d'être «plus [lui] devant la caméra». En mots, bien sûr.

«Mais aussi dans l'attitude, il y a une manière différente de bouger associée aux personnages d'époque. Cette fois, c'était agréable et relax d'être plus moi-même», fait-il avec ce débit rapide et cette énergie qui sont, aussi, très très «lui».

La contemporanéité du scénario, donc. Mais aussi, le scénario comme tel - qu'il a reçu, accompagné d'un mot du réalisateur canadien Michael Dowse.

«C'était un genre de profession de foi en moi. Il me disait qu'il avait un rôle formidable à mon intention et combien il voulait que je sois de ce projet.» C'était flatteur, il l'admet. Et c'était aussi un moyen habile d'attiser sa curiosité.

Il a donc lu le scénario. A découvert Wallace («J'ai «compris» ce gars dès la deuxième page»), qui est en peine d'amour depuis un an, a quitté ses études en médecine et opté pour un job ennuyeux au possible. Lors d'un party, il rencontre Chantry (Zoe Kazan), avec qui il se découvre des atomes crochus. Sauf qu'elle a un copain, un chouette type avec qui elle vit depuis cinq ans. Elle lui propose son amitié. Il accepte.

Là est le «F word» du titre. Ils seront friends. Juste ça. Du moins, ils vont essayer. «J'ai trouvé le scénario drôle et intelligent, charmant, mais aussi, impertinent. Ce n'est pas évident de combiner tous ces ingrédients et que ça marche.» Quand ça marche, ça donne des When Harry Met Sally, des (500) Days of Summer, des Nick & Norah's Infinite Playlist, des Spectacular Now.

Il a donc plongé dans cette histoire «traditionnelle, qui n'a rien de révolutionnaire mais qui se distingue par son exécution».

L'amour sans la folie

Une histoire où, comme le lui a dit le scénariste Elan Mastai, «les gens ne se mettent pas à agir comme des psychopathes dès qu'ils tombent amoureux. Et c'est vrai, dans les films, ils se trompent, ne pensent pas aux conséquences, prennent soudain des décisions qui ne collent pas avec leur personnalité! D'accord, ça arrive dans la vie aussi, mais peut-être pas aussi facilement».

Une histoire que, au bout du compte, Daniel Radcliffe voit comme «vous savez, ce moment dans les comédies romantiques, ce montage où on les voit, elle et lui, se rencontrer, s'ouvrir l'un à l'autre, se faire rire, partager un repas? Ce moment où ils sont si heureux qu'ils rendent les spectateurs heureux? The F Word, c'est ce moment, que l'on a étiré». Et exploré.

Le jeune acteur s'est ainsi glissé dans la peau de Wallace, «un garçon drôle, brillant, qui a été tellement blessé par sa rupture amoureuse qu'il est devenu cynique et s'est convaincu qu'il ne croit plus en l'amour», fait celui qui, au cours des trois dernières années, s'est graduellement dépouillé, professionnellement, des attributs de Harry Potter.

«C'est vrai que pour certaines personnes, je serai toujours Harry Potter, et c'est correct. Jusqu'à un certain point, je le serai toujours. Mais je pense aussi que les gens se font à l'idée que je suis un acteur et non juste «Harry Potter qui fait autre chose».»

Ainsi, on pourra enfin le voir, pour Halloween, dans Horns, adaptation par Alexandre Aja du thriller d'horreur de Joe Hill. Un autre film indépendant. Un choix conscient afin de prendre ses distances de la franchise qui l'a fait naître au grand écran? «Disons plutôt que je cherche à faire de bons films et que la plupart de ceux-là sont indépendants. Bien sûr, occasionnellement, des choses formidables sortent des studios, mais souvent, ce sont les projets plus compliqués à produire qui m'intéressent... et il se trouve qu'ils sont du domaine de l'indépendant.»

Et qu'ils ne sont pas dénués de risques: «Il y a deux films que j'ai presque faits cette année et qui ne se sont pas concrétisés.» Mais bon, il ne s'en fait pas pour autant. Il croit en la magie. Celle du travail et de l'investissement personnel. Ça l'allume. Le «F word», pour Daniel Radcliffe, c'est aussi «flamme». Celle qui l'habite.

Changement de titre

Lancé l'an dernier au Festival international du film de Toronto, The F Word conserve son titre au Canada, mais s'intitule What If aux États-Unis et en Grande-Bretagne.

Chez l'Oncle Sam, la Motion Picture Association of America n'était en effet pas enthousiaste (un euphémisme) à l'idée de donner de la visibilité à cette expression née pour «camoufler» un mot-que-l'on-ne-peut-prononcer (non, pas Voldemort).

Bref, le F en question a beau ici être celui de friend, le concept subversif n'a pas plu. Dommage.

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The F Word (Et si jamais) prend l'affiche le 22 août. Les frais de voyage ont été payés par Les Films Séville.