Cinéaste, auteur, producteur et cofondateur d'Orange Médias, Marc-André Lavoie n'a pas attendu après les autres pour réaliser son rêve: faire des films. Avec la comédie Hot Dog, son troisième long métrage, le réalisateur de Bluff veut divertir le public sans prétention.

À 21 ans, Marc-André Lavoie s'est fait annoncer par un médecin qu'il avait un cancer. Pour dédramatiser la situation, le jeune étudiant sans le sou a dit à la blague: «Mais qu'est-ce que je vais faire de mes placements à la banque?» Le docteur lui a répondu (sérieusement) de les changer en placements à court terme!

Sans le savoir, son médecin lui a transmis une leçon de vie: ne jamais remettre à demain ce qu'on peut réaliser maintenant. «À partir de là, j'ai décidé de toujours faire ce dont j'avais envie, sans me laisser influencer par quiconque.

«J'ai fait des études en communication. J'ai fondé une boîte de production en publicité, puis en cinéma (Orange Médias et Orange Films). Je rêvais de faire un long métrage de fiction. J'ai fait Bluff avec presque pas d'argent. Si j'avais attendu après les institutions pour lancer le projet, je ne l'aurais jamais réalisé.»

Marc-André Lavoie se définit comme «une bibitte noire dans le système» du cinéma québécois. «Je fais du cinéma d'auteur et populaire, des feel-good movies, des drames humoristiques. Mais pourquoi faut-il toujours apposer une étiquette à un film?»

Peut-être parce que son distributeur (Les Films Séville) annonce depuis des mois que Hot Dog sera «la comédie de l'été»?

«Hot Dog est la seule comédie (québécoise) à sortir cet été..., rétorque Lavoie, un peu mal à l'aise avec cette pression. Je trouvais ça drôle. Bien sûr, ça reste du marketing du distributeur.»

La dent dans l'engrenage

Inspiré d'un fait divers lu dans le journal (une Américaine qui a trouvé une dent à l'intérieur d'une saucisse achetée au supermarché), Hot Dog propulse des personnages dans trois univers parallèles, d'une situation incroyable à une autre, pour mieux croiser leurs destins.

Croyant à tort que ses associés (Rémy Girard et Éric Salvail) chez Saucibec veulent le congédier, Paul (Paul Doucet) va tenter de saboter la production de l'entreprise... en mettant une dent dans la viande sur la chaîne de montage. Lorsqu'il apprend qu'il n'est pas celui qui sera licencié, il est trop tard pour réparer son geste. L'engrenage est parti. À travers moult péripéties, Paul et ses associés seront mêlés à un petit couple qui tente de faire de l'argent avec la saucisse en question; à un parrain de la mafia italo-montréalaise; à un hitman hystérique.

«Tous les personnages mentent et manipulent les autres, explique le cinéaste. Ce qui provoque une chaîne d'actions et réactions. Le mensonge est un thème qui revient dans tous mes films. On passe sa vie à se convaincre de tout. On n'a pas le choix. Si on ne fait pas ça, il n'y a plus rien qui existe.»

Ses films précédents - Bluff en 2007 (fait en collaboration avec Simon-Olivier Fecteau) et Y'en aura pas de facile en 2010 - ont été réalisés avec des budgets faméliques. Hot Dog, lui, est doté d'un budget respectable pour le Québec de 1,9 million.

Qu'est-ce que cela a changé dans son tournage? «J'ai pu faire plus de prises, plus de scènes extérieures. J'ai pu compter sur une plus grosse équipe technique. J'ai travaillé avec les acteurs avant le tournage...»

Au bout du compte, estime le réalisateur, Hot Dog ressemble quand même à ses autres films. «Au Québec, tous les films sont des films à petit budget, si on se compare au marché américain. Mes deux premiers films ont généré 1,5 million ensemble, mais ils ont coûté 750 000 $ à produire.»

Refusant les étiquettes, Lavoie estime avoir livré un divertissement honnête et efficace pour le grand public. Et il ne veut surtout pas porter le poids du box-office québécois sur ses épaules.

Hot Dog prendra l'affiche le 9 août.

LES ACTEURS DE HOT DOG

Paul Doucet

C'est le cinéma qui a donné le désir de faire le métier d'acteur à Paul Doucet. Et ce dernier le lui rend bien.

«Marc-André [Lavoie] m'a approché en me disant qu'il avait écrit le personnage de Paul en pensant à moi. Il m'a convaincu tout de suite, seulement avec son pitch, en me racontant son film. Il était si enthousiaste que j'ai dit oui avant même de lire le scénario! J'aime sa manière de voir le cinéma, son côté entrepreneur, sa passion, sa drive et son investissement total dans un projet.

«Le comédien Jean-Louis Millette se posait trois questions avant d'accepter un projet: Est-ce que je vais avoir du plaisir à le faire? Est-ce que je vais apprendre quelque chose? Est-ce que c'est assez payant? Si la réponse était oui aux trois questions, il embarquait tout de suite; à deux, il réfléchissait un peu; à une, il refusait... Je trouve que ça a bien du bon sens.»

Sa comédie préférée au cinéma? As Good as It Gets de James L. Brooks, avec Jack Nicholson, Helen Hunt et Greg Kinnear.

Photo: Olivier Jean, La Presse

Paul Doucet

Rémy Girard

Rémy Girard est le seul interprète de la distribution à avoir joué dans les trois longs métrages de Marc-André Lavoie. Qu'est-ce qui pousse l'acteur vétéran à collaborer à chaque projet du jeune cinéaste?

«J'aime la passion du cinéma de Marc-André, dit-il. Sa folie, son imagination, ses idées. Il me sort de mon univers cinématographique, de ma zone de confort comme acteur.

«De plus, il a un sens de l'humour très particulier, unique. Il n'a pas peur de l'absurde. Il envoie ses personnages dans des directions qu'on ne devine jamais. Il carbure aux rebondissements. Et c'est un excellent conteur d'histoires, dans la vie comme au cinéma.»

«J'ai beaucoup appris en jouant du burlesque, des variétés, au théâtre. J'ai travaillé avec Gilles Latulippe. On partait d'un simple canevas et on se lançait sur scène. On jouait la situation comique sans trop savoir comment ça allait se passer vraiment. Quand Gilles Latulippe fait ses entrées, tu ne sais jamais comment il va débarquer sur scène! Tu as toujours des surprises...»

Sa comédie préférée au cinéma? «De père en flic, avec le duo Michel Côté et Louis-José Houde. Il y a des répliques comiques mémorables dans le film d'Émile Gaudreault. Ixe-13 avec Les Cyniques, un classique de la comédie québécoise. Et j'ai aussi joué dans une comédie pas pire du tout: La Florida

Photo: Olivier Jean, La Presse

Rémy Girard

Éric Salvail

Le réalisateur Marc-André Lavoie a offert le rôle à Éric Salvail après l'avoir vu animer un gala sur scène. Sans lui demander de passer une audition!

«Je croyais que je passais à Surprise sur prise quand il est venu me voir en me disant qu'il voulait que je joue dans son prochain film», dit l'animateur, producteur et désormais acteur de cinéma.

«Le premier jour du tournage, en me rendant sur le plateau, j'ai failli rebrousser chemin dans ma voiture, se souvient-il. Je me disais: «Mais qu'est-ce que tu as pensé, Salvail, d'aller donner la réplique à Rémy Girard et Paul Doucet (deux acteurs chevronnés) dans un film?!»»

De l'avis du réalisateur, Éric Salvail n'avait pas à douter de lui. Il est arrivé sur le plateau hyper préparé, fin prêt à rendre son personnage de dirigeant de la firme Saucibec. Le (jeune) comédien a vu le film il y a quelques jours, et il est content du résultat. D'ailleurs, il n'a pas à rougir de sa performance. Il se voit même faire un prochain film, voire une comédie romantique (son genre de prédilection).

Ça tombe bien... Il semblerait que Julia Roberts cherche un nouveau partenaire à Hollywood!

Sa comédie préférée au cinéma? Quatre mariages et un enterrement de Mike Newell, avec Hugh Grant et Andie MacDowell.

Photo: Olivier Jean, La Presse

Éric Salvail

Pierre-François Legendre

«Le casting, c'est la clé du métier. Dès que j'ai lu le scénario et que j'ai vu que mon personnage se qualifiait de loser, je me suis dit: voilà un rôle pour moi! François Pigeon est une bonne pâte, comme Carlos», raconte l'interprète de l'inoubliable homme mou des Invincibles.

Dans Hot Dog, Legendre incarne le chum de Sonia (Édith Cochrane). Un homme au foyer qui se fait entretenir par sa blonde (il n'a jamais travaillé de sa vie!). Il cache son manque d'envergure sous le vernis de fausses valeurs.

Quand il découvre un corps étranger dans une saucisse en mangeant son repas à la maison, il va d'abord refuser de poursuivre la société fautive. Par principe. Mais sa copine et lui vont vite changer d'idée et profiter de l'occasion pour faire un coup d'argent.

Sa comédie préférée au cinéma? Le dîner de cons de Francis Veber, avec Jacques Villeret et Thierry Lhermitte.

Photo: Olivier Jean, La Presse

Pierre-François Legendre

Édith Cochrane

Elle joue donc Sonia, la blonde de François Pigeon. Actrice comique d'instinct, autodidacte, Édith Cochrane a été amenée à la comédie par la voie des ligues d'improvisation depuis son adolescence. Championne de la LNI, elle déplore que celle-ci soit menacée de disparaître.

«L'impro [la LNI] m'a tout appris, dit-elle. Un acteur d'impro doit tout faire sur scène: il joue, signe la mise en scène, le texte, les costumes... Et si ça ne marche pas, il le sait tout de suite. Je n'ai pas fait d'école de théâtre. J'ai fait mes classes à la LNI, devant le public et mes collègues.

«L'impro développe l'instinct de survie d'un acteur, poursuit-elle. Elle te permet de sortir de ta zone de confort, de tester plein de choses qui vont améliorer tes réflexes de jeu.»

Sa comédie préférée au cinéma? «Le père Noël est une ordure. Je le revois chaque année et ça me fait rire à chaque fois.»

Photo: Olivier Jean, La Presse

Édith Cochrane

Daniel Lemire

Il est Gilles Langevin, l'associé trouble et retors de la société Saucibec. Pour son premier rôle au grand écran, l'humoriste joue un rôle qui peut faire penser aux personnages qu'il a incarnés sur scène.

Sa comédie préférée au cinéma? «Les bronzés. J'ai bien aimé les trois versions, même si le dernier n'a pas fait l'unanimité. C'est un casting d'acteurs comiques de rêve. La gang de la troupe du Théâtre du Splendid, c'est difficile à battre.»

Photo: Olivier Jean, La Presse

Daniel Lemire