Dany Garand: Un Sherbrookois chez Audi

Dany Garand est de ces personnes discrètes qui oeuvrent dans l'ombre sur un produit qui se retrouvera tôt ou tard sous les projecteurs des grands salons automobiles. Celui qui tient à préciser qu'il est un styliste extérieur compte à son actif les Audi A8, Q7 ou encore A1. Il est aujourd'hui de ceux qui conçoivent la prochaine A3. Rencontre avec un... Sherbrookois.

Pourtant disert, Dany Garand est peu loquace au sujet de la nouvelle version de la compacte identifiée par le numéro 3. «Il est possible que la A3 arrive en 2013», confirme-t-il dans un premier temps. Avant d'ajouter quelques instants plus tard: «Les gens vont retrouver une A3 qui devrait toucher l'aspect émotif, qui brise cette froideur, sans être trop jazzée. Ça reste très rigoureux, très rigide, mais plus chaud. (...) Il faut aller chatouiller la corde sensible, mais sans perdre ses valeurs de base.»

Le designer de projets aux styles extérieurs - son titre chez Audi - n'en dira pas plus sur cette future A3 qui devrait devenir une berline aux dimensions légèrement plus grandes. La motorisation n'est évidemment pas son domaine même si les contraintes techniques s'imposent de plus en plus dans son travail. «Il y a un côté technique qui exige de plus en plus d'homogénéité stylistique. Il est de plus en plus important de comprendre l'aspect technique. La voiture est soumise aux protections, senseurs, et restrictions d'homologations, ce qui nous rend la vie difficile. Cela nous dicte par exemple la conception du pare-chocs. (...) Les produits deviennent de plus en plus internationalisés et la gamme de produits s'agrandit. Chez Audi, on fait un design pour le marché mondial, on essaie de faire un design qui englobe toutes les homologations mondiales. On a moins de jeu stylistique entre une A4 et une A6 aujourd'hui qu'on en avait auparavant.»

Dany Garand reconnaît qu'Audi n'a pas la réputation de faire dans l'extravagance. «C'est très progressif et très sophistiqué, dit-il. Une attention incroyable est portée aux détails. Mais on reste très sobre. On essaie aussi d'être intemporel, de traverser le temps.»

Actuellement responsable des projets qui concernent les A1, A3 et TT, ce natif de Sherbrooke n'hésite pas à affirmer que «faire une belle voiture, ce n'est pas si difficile que cela. Par contre, pour faire une Audi, on est dans un monde très restreint de possibilités. Les Audi sont très rigides dans une certaine mesure». Et il n'hésite pas non plus à opposer cette rigueur d'Audi à l'extravagance « émotive» d'une Aston Martin. «Quelqu'un qui est un peu plus latin vibre moins sur une Audi que sur une Aston Martin. Mon travail, c'est d'amener cet aspect émotif chez Audi, mais sans perdre l'identité génétique de base.»

 

Parcours particulier

Ce quinquagénaire a un parcours atypique dans le «petit monde» du design automobile où «la réalité n'est pas aussi grandiose qu'in pourrait le penser «. C'est en 1978 qu'il découvre la fibre automobile après avoir vu la Lotus Esprit version James Bond. Son orientation professionnelle révélée, il entre chez Bombardier au service de design et au développement technique. Durant les années 80, il se fait remarquer auprès de... Lotus qui voit le potentiel de son coup de crayon. Le constructeur britannique l'envoie à Londres parfaire sa formation au Royal College of Arts. Il y fait partie de l'élite mondiale dans le domaine. Ils ne sont que 12 dans sa promotion. À sa sortie, il est recruté par Honda Europe. «Honda, c'est une grosse machine. J'ai fait la connaissance de M. Honda dans sa dernière année. J'ai vécu les belles années de Honda, au niveau de l'ingénierie et du développement.»

Après un intermède au Québec, il retourne en Europe et joint Audi. Un autre grand groupe, une autre approche. «Chez Honda, les voitures sont des produits, chez Audi, ce sont des Audi. Les équipes de travail y sont plus petites, c'est plus personnalisé, l'expression de l'individualisme y est plus marquée», dit celui qui tient à préciser qu'une voiture n'est pas l'oeuvre d'un seul designer.

Dany Garand est un chef d'équipe à la recherche du «juste équilibre» pour qui vivre la création d'une voiture est une expérience fantastique.