L'hiver! Les skieurs en rêvent, les automobilistes en font des cauchemars. Alors que les premiers recherchent la glisse, les seconds préfèrent fuir les glissades comme la peste. Existe-t-il une solution? Et doit-on craindre de sortir au volant d'une propulsion (roues arrière motrices)?

L'hiver! Les skieurs en rêvent, les automobilistes en font des cauchemars. Alors que les premiers recherchent la glisse, les seconds préfèrent fuir les glissades comme la peste. Existe-t-il une solution? Et doit-on craindre de sortir au volant d'une propulsion (roues arrière motrices)?

Le retour en vogue de la propulsion fait craindre le pire aux automobilistes d'ici. Synonyme de précarité de comportement dans des conditions de circulation délicates, ce mode d'entraînement n'est pas de nature à nous rassurer, nous qui devons rouler près de six mois par année sur une surface glissante et souvent enneigée. Bien sûr, Mercedes et BMW, pour ne nommer que ces ceux-là, ont toujours été les apôtres de cette solution technique, mais force est de reconnaître que ces deux marques ne sont pas les plus diffusées chez nous. On ne peut cependant en dire autant de la société DaimlerChrysler, qui invite ses clients à se passer de la sérénité que procure la traction (roues avant motrices) en proposant, depuis quelque temps, la 300, la Magnum et autres Charger. Et demain, le groupe germano-américain ne sera pas le seul à faire la part belle aux propulsions qui, depuis près de 30 ans, n'étaient pourtant plus en odeur de sainteté chez les constructeurs.

Même si le comportement des voitures à roues avant motrices (traction) est unanimement reconnu pour son efficacité dans des conditions hivernales, il reste que, par définition, une traction est moins sportive qu'une propulsion qui, de par son architecture, profite d'un meilleur équilibre, d'une meilleure répartition de poids, permet de mieux faire passer la puissance d'un moteur vitaminé et ce, même si elle requiert des qualités de pilotage parfois hors du commun dès lors que l'on conduit à cadence très soutenue ou sur des routes enneigées.

Tout en respectant le dogme de la propulsion, les constructeurs ont pu, grâce aux fabuleuses ressources de l'électronique, compenser une bonne part de leurs faiblesses dynamiques congénitales dans des situations extrêmes. Nous ne ferons pas l'inventaire de tous les systèmes d'antipatinage et correcteurs de trajectoire en tout genre que les ingénieurs ont conçu avec brio, mais à grands frais, pour pallier les lois physiques inhérentes à la propulsion.

Avec l'apport efficace des capteurs et des calculateurs, l'honneur est sauf. À ceci près qu'Audi et Subaru sont parvenus, avec leur rouage intégral, à trouver l'audience qu'elles recherchaient depuis une vingtaine d'années.

Gage de sécurité irremplaçable, la traction intégrale optimise, plus que toute autre solution, la tenue de route sur tous les types de chaussée, quelle que soit la météo. Toujours onéreuse, cette technique n'est plus inaccessible comme elle le fut trop longtemps. Aujourd'hui, le rouage intégral, lorsque celui-ci est offert en option, entraîne un déboursé de plus ou moins 2000$. C'est beaucoup et peu à la fois quand on en connaît les bienfaits, notamment sur le plan de la sécurité.

L'ennui avec ce dispositif, c'est qu'il procure à certains automobilistes une fausse impression de sécurité. En fait, nombre d'automobilistes en oublient l'immuabilité des lois de la physique. Pourtant, les experts s'accordent tous à dire que la traction intégrale ne justifie en aucun cas (cela vaut aussi pour les autres dispositifs d'aides à la conduite tels que le contrôle de stabilité électronique, par exemple) un relâchement de la vigilance au volant. Il s'en trouve plus d'un pour croire qu'avec une traction intégrale, on peut négocier une courbe enneigée à une vitesse supérieure que s'il était au volant d'une traction (roues avant motrices). Erreur. Il s'agit d'un faux sentiment d'invulnérabilité.

Pis encore, plusieurs automobilistes considèrent que la traction intégrale peut aisément se passer de pneus d'hiver. Erreur. Aussi efficace soit-elle, la traction intégrale ne s'avère pleinement efficace que lorsque le véhicule qui en est équipée est parfaitement chaussé.

À quelques exceptions près, tous les constructeurs proposent aujourd'hui un rouage intégral sur l'un de leurs produits. Toutefois, contrairement aux assertions de certains publicitaires, l'efficacité d'une traction intégrale diffère d'un constructeur à l'autre. En d'autres mots, les différentes solutions «intégrales» proposées par les constructeurs diffèrent entre elles et n'ont, conséquemment, pas la même efficacité.

Permanent ou temporaire?

Pour les départager, un mot, un seul: permanence. Le rouage à quatre roues motrices est-il permanent ou temporaire? Là est toute la question. Comme son nom l'indique, le dispositif intégral permanent permet de distribuer équitablement la puissance aux trains avant et arrière. Au moment des accélérations, par exemple, le transfert de poids n'affecte pas la motricité, et l'efficacité de ce dispositif saute aux yeux dès que le coefficient d'adhérence est limité. Mais rien n'est parfait. Toute cette quincaillerie entraîne un excès de poids et une hausse de la consommation d'essence. Cette solution exige, par ailleurs, une plus grande complexité mécanique, qui se traduit forcément par des frais d'entretien et de réparation accrus.

La tendance actuelle est plutôt vers un dispositif intégral «temporaire» ou «sur demande». C'est-à-dire? En cas de pertes de motricité, une partie du couple est envoyée aux roues en manque d'adhérence. Ce dispositif géré électroniquement est économique (à la pompe, comme à l'entretien), mais ne peut rivaliser en efficacité avec un dispositif dit permanent. Le «temps de réaction» variant d'un dispositif à l'autre, il arrive parfois que cette fraction de seconde nécessaire à la gestion électronique pour diriger puissance et couple aux roues «en détresse» annihile les bienfaits du système. Résultat: vous risquez, vous aussi, d'avoir recours à des plaques antidérapantes.

Si la traction intégrale représente pour plusieurs l'antidote miracle pour se déplacer sur nos routes enneigées, vous ai-je dit qu'avec quatre bons pneus d'hiver, vous pouvez aussi rouler l'esprit tranquille?

Pour joindre notre chroniqueur: eric.lefrançois@lapresse.ca