En plongeant dans l’univers romanesque de Catherine Mavrikakis, Pierre-Yves Lemieux et Luce Pelletier font jaillir la voix de l’écrivaine sur scène. Mais nous étourdissent avec trop de mots.

Le ciel est une belle ordure porte pour la première fois sur scène l’univers littéraire de Catherine Mavrikakis. À partir de quatre de ses romans (Deuils cannibales et mélancoliques, Le ciel de Bay City, L’absente de tous bouquets et Ce qui restera), Pierre-Yves Lemieux et Luce Pelletier abordent des thèmes chers à l’autrice, comme la relation mère-fille, la mort, la névrose et l’écriture.

Hélas, cette production très attendue n’arrive pas à dégager une théâtralité, une forme scénique, de l’œuvre littéraire. À happer le public au-delà des mots. Et Dieu sait qu’ils sont nombreux, les mots, dans ce spectacle d’un acte de près de deux heures. Au point où ils nous assomment par moments.

Toujours présentes sur la scène, les excellentes Catherine Proulx-Lemay, Isabelle Vincent, Sylvie De Morais-Nogueira et Lou Vincent Desrosiers jouent avec justesse quatre alter ego de Mavrikakis.

PHOTO MARIE-ANDRÉE LEMIRE, FOURNIE PAR LE THÉÂTRE

Le ciel est une belle ordure au Quat’Sous a laissé notre critique sur sa faim.

Elles sont campées chacune dans un espace-temps différent, de 1979 à 2023. Elles partagent leur mère jouée avec brio par Sophie Faucher. Cette actrice est née pour les planches, pourquoi ne la voit-on pas davantage sur nos scènes ? Est-ce la même mère ou une vision fabulée de la figure maternelle, coincée entre générosité et amour, névrose et culpabilité ? On est dans l’ambiguïté, bien que les scènes de dialogues entre la mère et les filles forment les meilleurs moments du spectacle.

Le décor d’Olivier Landreville représente un monticule verdoyant d’où jaillit une immense bibliothèque pleine de livres. La mise en scène de Luce Pelletier est assez statique. L’univers dans lequel les personnages évoluent se veut abstrait. On s’accroche aux mots de Mavrikakis, à défaut d’autre chose…

PHOTO MARIE-ANDRÉE LEMIRE, FOURNIE PAR LE THÉÂTRE

Sophie Faucher est extraordinaire dans Le ciel est une belle ordure !

L’auteur Pierre Yves Lemieux parle de « réécriture », et non d’adaptation, pour qualifier son travail. Sa pièce dresse un portrait global de la puissance féminine, à travers la forte voix de Mavrikakis. La pièce s’inscrit d’ailleurs dans le cycle des territoires féminins de l’Opsis. A-t-il été trop ambitieux en s’attaquant à quatre romans de front ?

Au bout du compte, la proposition colle trop à l’œuvre. On ressort du théâtre avec l’impression que Lemieux et Pelletier ont construit un immense casse-tête, avec des dizaines de milliers de mots, en oubliant d’en dégager une image claire et nette.

Consultez la page de la pièce
Le ciel est une belle ordure

Le ciel est une belle ordure

Création de Pierre Yves Lemieux, d’après les romans de Catherine Mavrikakis. Mise en scène : Luce Pelletier. Une production du Théâtre de l’Opsis.

Au Quat’Sous, Jusqu’au 10 février

6/10