Les Érotisseries sont de retour sur les planches d’Espace Libre, avec une création qui a fait salle comble l’an dernier, mettant en scène des performances uniques en leur genre, qui se veulent libératrices, transformatives, carrément politiques. Pour un public majeur et averti seulement. Par-dessus tout : pour un public consentant.

Le consentement fait d’ailleurs partie intégrante du programme, ce qui a valu à ce spectacle inédit une place parmi les huit finalistes du 37e Grand Prix du Conseil des arts de Montréal, l’an dernier.

À quoi s’attendre, exactement ? À un spectacle hybride audacieux, ni théâtral ni purement circassien, assurément sensuel, par moments drôle, dérangeant, engagé, voire émoustillant, promet-on. Mais ce n’est pas un numéro de danseuses, au sens où on l’entend communément. Ah oui, et on fait aussi appel à des « volontaires » consentants de temps en temps.

Alors, c’est quoi ? Attendez-vous à de la nudité, mais pas que. Certains numéros seront plus pudiques. Il y aura de la danse à la barre verticale (pole dancing), mais aussi des sangles aériennes, des scènes sauvages, tendres, douces ou encore provocantes.

En gros, il s’agit d’« essais érotiques consensuels » (c’est écrit tel quel dans le programme), qui sont en fait une série de tableaux, inspirés du vécu, des expériences, même des fantasmes des trois artistes sur scène, à savoir Éliane Bonin, Catherine Desjardins-Béland et Marie-Christine Simoneau. Ce sont à elles que l’on doit ici la création, la mise en scène et l’interprétation.

PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

Les artistes Éliane Bonin, Catherine Desjardins-Béland et Marie-Christine Simoneau

Toutes trois issues du monde circassien, les artistes ont donné dans le pur divertissement ou les numéros stéréotypés. Elles se mettent ici à nu (littéralement), dans cette réappropriation philosophique et émancipatrice de leur sexualité, osant l’authenticité, dans toute sa diversité, une proposition qu’on devine à la fois confrontante, mais surtout acrobatiquement et émotionnellement vertigineuse.

Pensez : différentes expressions queers ici, une célébration de l’épanouissement là, ou encore une série de jeux de contrastes entre force et douceur, ici ou là.

Une invitation au « voyage » née en 2005

Ce n’est toujours pas clair ? C’est un « voyage », résume enfin Éliane Bonin, fondatrice des Productions Carmagnoles, à l’origine du projet. Il faut savoir que l’idée de cette proposition audacieuse est née en 2005, et sept éditions distinctes ont été créées à ce jour. Les deux autres artistes (Catherine Desjardins-Béland et Marie-Christine Simoneau) se sont jointes à l’aventure il y a dix ans.

Les différentes relectures avec le temps témoignent d’une recherche artistique en constante évolution, mais aussi de profonds changements sociaux récents. À preuve : en 2005, un personnage de geisha était incarné par un homme blanc, le cirque prenait assurément plus de place, et le tout finissait sur un numéro de « climax ».

Rien de tout cela n’est encore d’actualité. Si la proposition visait à provoquer, on est aujourd’hui d’abord et avant tout dans la « bienveillance ». En début de spectacle, on invite désormais les spectateurs à respecter leurs limites, sortir au besoin, puisque oui, certaines scènes pourraient choquer certains. Un médiateur social est également sur place depuis l’an dernier, pendant chaque représentation.

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Catherine Desjardins-Béland

Il y a eu une grande réflexion, à savoir comment on gère le consentement du public. On cherche à déranger, mais dans les limites du consentement du public.

Catherine Desjardins-Béland

Si tout ce que les artistes vivent sur scène est vrai, que ce soit la peur, la douleur, l’excitation ou le vertige, « le public traverse ces zones-là aussi, et c’est pour ça que quelqu’un est sur place pour faire de la médiation », poursuit Marie-Christine Simoneau.

De l’avis des trois artistes, cette production est la plus aboutie de toutes. « C’est la création dont je suis la plus fière de toute ma vie, reprend Éliane Bonin. Oui, vous serez émoustillés, assure-t-elle, mais en sortant, ce sera peut-être plus profond que ça. Il y a une réflexion transformative qui s’opère », espère-t-elle.

Consultez la page du spectacle
Les Érotisseries : essais érotiques consensuels

Les Érotisseries : essais érotiques consensuels

Création des Productions Carmagnoles

Espace libre, 21 novembre au 9 décembre
18 ans et plus