Les auteurs de ce beau livre collectif ont fait un pari audacieux: représenter 100 figures marquantes de la bande dessinée à partir d'une seule case, agrandie en très grand format, pour en faire apparaître toute la force graphique.

Sorties de leur contexte et de la narration, dont elles sont pourtant indissociables, ces cases connues ou pas du tout, acquièrent une autre dimension. Elles jouent au tableau, comme les toiles de Roy Lichtenstein exagéraient les codes et trames des comics.

En page de gauche, la planche est présentée en entier, accompagnée de l'analyse d'un expert. Une dizaine ont collaboré à l'ouvrage, notamment Jacques Samson.

On s'en doutait: le style dit «bédé» ne veut pas dire grand-chose. De Jack Kirby à Bilal, de Brétécher à de Crécy, il y a autant de variété de visions qu'entre les grands maîtres de la peinture, conclut-on au fil des pages. On pourrait évidemment critiquer le choix des bédéistes: pourquoi celui-ci et pas celui-là?

Les auteurs arrivent toutefois à un panorama équilibré, à tout le moins pour un lecteur francophone: une bonne moitié d'artistes francophones, mais aussi une trentaine d'américains et une poignée de japonais.

Un seul créateur d'ici figure parmi les «maîtres»: Julie Doucet, dont l'esthétique trash et les récits osés, ont inspiré d'autres dessinateurs (trices) «qui vont à sa suite, exhiber leur quotidien ou leurs fantasmes».

Pour le prix de trois ou quatre albums, une belle gâterie pour les amateurs de bédé.

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100 cases de maîtres, un art graphique, la bande dessinée. Gilles Ciment et Thierry Groensteen (sous la direction de). La Martinière, 89,95 $.