Les lecteurs qui engloutissent les pages à un rythme effréné peuvent toujours passer à la vitesse supérieure: une artiste française propose d'ingérer des textes au sens propre.

La «bibliophagie» est centrale dans la démarche de Marie Sochor, qui organise d'insolites performances depuis près de 15 ans. «Elles se présentent de diverses façons, mais la forme la plus courante consiste à circuler dans un public et à distribuer sur un plateau des textes comestibles. Il m'est aussi arrivé de faire des signatures de mes éditions et de les avaler en librairie.»

De quoi s'étouffer? Que nenni, du papier azyme (qui compose aussi les hosties) est employé comme support. Quant aux textes, du cru de l'artiste, ils sont écrits à l'aide d'encre noire alimentaire utilisée en cuisine. En toute logique, ils traitent de langage et de nourriture.

«Sur chaque texte, les ingrédients et la date de péremption sont mentionnés», précise l'artiste établie à Paris. 

Le feuillet remportant le plus de succès? Celui du Texte à chier, lequel devient littéralement ce qu'il annonce, une fois englouti.

«Ces actes bibliophages traversent le lecteur et le transforment en un corps buvard, porte-parole organique et ventriloque», explique l'artiste dans un manifeste, revendiquant un «regard post-dadaïste».

«Mon travail sur la bibliophagie s'est développé avec les performances bibliophages et les éditions comestibles et a pris, il y a deux ans, sa forme dans un livre d'artiste, Insectes bibliophages. Ce livre, percé par un trou évoquant le travail des insectes, dresse un inventaire des espèces qui se nourrissent de livres et vivent dans les bibliothèques», a indiqué Marie Sochor à La Presse

Bien que son film La femme rouge, bougie d'allumage de ses performances, ait déjà été présenté à l'UQAM, l'artiste n'a malheureusement jamais eu l'occasion de se produire au Québec. Dommage ! Il serait peu surprenant que les rats de bibliothèque québécois aient un appétit pour cela.

Eux aussi aiment se mettre un livre sous la dent



Attention à ces insectes et rongeurs friands de littérature, et particulièrement des livres anciens. Un inventaire de ces bestioles se retrouve dans l'ouvrage Insectes bibliophages de Marie Sochor, tiré à mille exemplaires.

> Le poisson d'argent: très répandu, il adore se nourrir de papier et y laisser ses déjections.

> La vrillette du pain: cauchemar des bibliothécaires, sa larve creuse des galeries dans les ouvrages.

> Les blattes: la blatte américaine adore le garde-manger, mais ne rechigne pas devant la bibliothèque.

> Le psoque: aussi appelé «pou des livres», il fait des ravages dans le papier où de la moisissure s'est formée.

> Les mites: leurs larves peuvent s'attaquer aux livres comme aux reliures en cuir.

> Les termites: connues pour attaquer le bois, elles peuvent aussi faire d'un livre un bon repas.

> Les souris: elles n'ingèrent pas le papier, mais adorent le mâchouiller pour en faire un nid.