Au-delà des ratios financiers, les investisseurs accordent une grande importance à leur subjectivité pour octroyer des financements. Et la confiance envers les gestionnaires arrive en tête de liste.

«Souvent, les financiers refusent un prêt sous prétexte que l'entreprise ne rencontre pas tel ou tel ratio, constate Gilles Fortin, directeur principal du bureau de Québec pour Raymond Chabot Grant Thornton. En réalité, les prêteurs ne le disent pas, mais l'équipe de gestion est la première chose qu'ils regardent. C'est toujours une question de confiance. Elle est là... ou pas!»

La confiance a pris une importance critique avec la mondialisation. «Aujourd'hui, il est plus difficile pour le financier de passer chaque matin devant l'usine... quand celle-ci est en Chine!», souligne Normand Provost, premier vice-président, placements privés à la Caisse de dépôt et placement du Québec.

«L'investisseur a perdu la proximité qui existait auparavant quand toutes les usines étaient au Québec, en Ontario ou dans le nord-est des États-Unis, dit-il. Mais il est aussi important de savoir ce qui se passe dans une usine, qu'elle soit en Chine ou ailleurs!»

Équipe de gestion

Bien entendu, les données chiffrées ont leur importance. «Mais les états financiers sont un peu le reflet du travail des cadres dirigeants, tempère M. Fortin. Quand on emprunte de l'argent, c'est qu'on a un plan de match, mais qui va le réaliser, si ce n'est l'équipe de gestion?»

Quand l'entrepreneur sollicite une institution financière, il doit convaincre le directeur de comptes, dit Gilles Fortin. «S'il ne passe pas ce test, son dossier n'ira nulle part dans cette institution financière», prévient-il. En effet, le directeur de comptes devra à son tour convaincre ses supérieurs, dont le rôle est de minimiser les risques pour l'institution financière.

Les données financières sont elles-mêmes matière à interprétation, selon le niveau de confiance accordé à l'emprunteur, rappelle M. Fortin. La subjectivité a forcément sa place au moment d'établir la valeur de liquidation des actifs donnés en garantie du prêt, précise-t-il.

Communiquer sur le long terme

Mais la confiance ne s'achète pas, elle s'acquiert avec le temps. "Établissez la confiance en amont, recommande Normand Provost. N'attendez pas d'avoir un projet. La confiance se bâtit au fur et à mesure.»

Souvent, les PME font affaire avec leur banquier principal. Mais cela ne devrait pas les empêcher d'informer régulièrement d'éventuels investisseurs. «Les prêteurs peuvent échanger avec les entrepreneurs même s'il n'y a pas de projet en vue, dit M. Provost. Et ils peuvent vous apporter de l'information collectée dans leurs propres réseaux.»

Le jour où un projet sera envisagé, «la confiance acquise en amont permettra de décider plus rapidement», assure M. Provost. De plus, il sera plus facile de démontrer que, lorsque les difficultés surviennent, on a réussi à les surmonter pour aller de l'avant.

Et quand les choses tournent mal, c'est encore la confiance qui permet d'obtenir du soutien. «Il est possible qu'on ait connu de mauvaises années et que les états financiers en soient touchés, mais que la banque décide de soutenir l'entreprise malgré tout, observe Gilles Fortin. À l'inverse, si les dirigeants se paient de bons salaires alors que l'entreprise ne va pas bien, cela mine la confiance.»

La confiance dans les deux sens

Avant de faire bénéficier un investisseur de sa future réussite, l'entrepreneur doit lui aussi choisir à qui accorder sa confiance. «Vous aussi avez le droit de choisir! lance Normand Provost. Demandez-vous ce que vous attendez des prêteurs. Là encore, réalisez ce travail en amont pour ensuite miser votre énergie sur ceux qui vous apporteront le plus. Aujourd'hui, il y a du financement disponible. C'est aux entrepreneurs d'être sélectifs.»