Écarté par le gouvernement du Parti québécois, le Plan Nord renaît aujourd'hui de ses cendres. Sa deuxième mouture, moins ambitieuse en terme de financement gouvernemental, garde toutefois l'essence de sa première version, soit le développement du nord de la province grâce au levier des ressources naturelles.

Le gouvernement du Québec compte redonner vie au Plan Nord en misant sur les infrastructures et la logistique liées aux secteurs de l'énergie et du transport. Les ministres Pierre Arcand et Jacques Daoust font le point.

Il n'est pas question pour le gouvernement de s'étourdir de prévisions. «Ça va dépendre, évidemment, de ce qui va se dérouler sur le plan économique au cours des prochaines semaines, des prochains mois et des prochaines années», dit Pierre Arcand, ministre des Ressources naturelles et responsable du Plan Nord.

Il est ainsi plus réservé dans ses promesses que ne l'était Jean Charest lorsqu'il annonçait, en 2011, l'investissement de 80 milliards au cours des 25 prochaines années et la création de 20 000 emplois.

«En 2010 et 2011, on a réagi à ce qui était un certain boom minier; les prix [des métaux] se sont envolés. Mais c'est justement pendant que nous sommes dans une période où les prix sont un peu plus faibles que nous avons le temps de mieux planifier nos affaires», dit-il.

Et le gouvernement tire des leçons du Plan Nord précédent. «Une des choses qui ressortaient alors, c'est que ce n'était qu'un développement minier alors que pour nous, c'est un développement qui est à la fois environnemental, social, touristique.»

Actuellement, le gouvernement planche sur un plan d'action quinquennal ainsi qu'une planification plus générale qui s'étend sur une période de 20 ans. Le projet de loi 11 qui donnera vie à la Société du Plan Nord devrait, quant à lui, être adopté «d'ici Noël»; l'organisation devrait être en activité dès le mois d'avril.

Le gouvernement poussera à la roue en pilotant des projets de développement d'infrastructures liés aux transports et à l'acheminement d'énergie.

Le train du Nord

À la fin octobre, le gouvernement s'est associé aux sociétés minières Mines de fer Champion et Exploitation Minière Lac Otelnuk afin de mener une étude de faisabilité pour un nouveau lien ferroviaire rendant plus facile l'accès à la fosse du Labrador depuis le port de Sept-Îles.

Le gouvernement investit 20 millions dans cette étude qui devrait coûter de «35 à 40 millions». Outre les deux partenaires déjà annoncés, Adriana Ressources serait intéressé par le projet.

Parallèlement, le gouvernement est en discussions avec le géant indien Tata Steel.

Rappelons que deux chemins de fer existent déjà sur le territoire, soit ceux d'Iron Ore du Canada (IOC) et d'Arcelor Mittal. «Le problème, c'est que ce sont des chemins de fer privés et des gens se plaignent des coûts lorsqu'ils décident de les emprunter. Et l'accès est difficile», dit-il.

La troisième voie de chemin de fer se voudra multi-usager.

Du gaz naturel par bateau

Autre enjeu de taille: l'accès au gaz naturel. Investissement Québec a conclu, en septembre, une prise de participation de 50 millions dans une filiale de Gaz Métro spécialisée dans le marché du gaz naturel liquéfié.

L'objectif: tripler la production de gaz liquéfié à Montréal et faciliter l'approvisionnement des entreprises du Nord québécois.

«Nous allons acheminer [le gaz] par camion et par bateau éventuellement», précise Pierre Arcand.

À ce sujet, des intervenants du milieu ont indiqué à La Presse que des réservoirs de gaz pourraient bien être installés au cours des deux prochaines années dans les villes de Sept-Îles, Port-Cartier, Baie-Comeau.

Un autre réservoir pourrait ultérieurement être installé à Havre-Saint-Pierre.



La chute des prix, une occasion

Le contexte a bien changé depuis le premier Plan Nord, souligne Jacques Daoust, ministre du Développement économique.

En effet, au cours de la seule dernière année, les prix du fer ont chuté de près de 40%, plombant les activités minières dans le nord de la province.

À l'instar de son confrère des Ressources naturelles, il souligne qu'il ne faut pas attendre la reprise pour préparer le terrain, rappelant que l'industrie minière est cyclique. D'autant plus que le Plan Nord est une excellente carte de visite à l'étranger, particulièrement en Asie, indique-t-il.

Certes, la croissance de la Chine a quelque peu ralenti au cours des dernières années, mais l'empire du Milieu se montrerait toujours intéressé par les projets miniers dans le nord de la province. Qui plus est, d'autres marchés ont augmenté leur consommation. C'est le cas de l'Indonésie et du Vietnam, indique-t-il.

Outre le fer, «nous avons du cuivre, de l'or, de l'apatite. Nous avons différents métaux d'intérêt pour eux», dit-il.

Si l'approvisionnement en gaz naturel est finalement assuré, la Côte-Nord peut-elle espérer accueillir de réelles activités de transformation? Rien n'est moins certain, admet Jacques Daoust.

Dans la chaîne d'approvisionnement mondial, comme établie à l'heure actuelle, la transformation se fait près des usines qui produisent. Jacques Daoust indique toutefois qu'il espère la venue «d'usine à extrusion» et qu'il prêche auprès des grandes entreprises en ce sens.

PHOTO ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Le ministre de l'Économie, de l'Innovation et des Exportations (MEIE), Jacques Daoust.