Si quand vous entendez le mot coop la seule image qui vous vient en tête est vieux hippies et patchouli, vous pourriez bien être très éloigné de la réalité. De plus en plus de jeunes choisissent la coopérative comme modèle d'entreprise.Portrait de quatre innovateurs qui évoluent dans le milieu coopératif.

Mélodie Martin-Couture, membre et cofondatrice de Cirquantique compagnie de cirque burlesque, Montréal

C'est au cours de ses nombreux voyages à l'étranger que Mélodie Martin-Couture découvre l'univers du cirque. Le virus circassien est vite attrapé. De retour à Montréal, alors âgée de 20 ans, elle s'inscrit à des cours du soir à la Caserne 18-30, un centre communautaire dédié aux Arts du cirque. Spécialisée en trapèze fixe, elle se produit à travers le Québec, mais aussi au Mexique et participe à des créations de Cirquantique en tant qu'artiste.

Quand la compagnie se forme en coop de travail en février 2014, elle en devient l'une des trois membres fondatrices et agit à titre de vice-présidente et directrice générale. « Pour nous, le modèle de la coopérative était une évidence. Nous voulons que tout le monde puisse avoir son mot à dire », explique Mélodie Martin-Couture aujourd'hui âgée de 26 ans. Un peu à l'image des spectacles de Cirquantique. « Nous mettons en scène des spectacles-cabarets, un peu coquins, multidisciplinaires et immersifs et le public est invité à participer. Nos thèmes ont tous un pied dans le passé comme les années 1920 ou la Grèce antique tout en abordant des sujets de société actuels comme les problèmes de corruption. S'il existe de nombreuses compagnies de cirque et des compagnies de burlesque, Cirquantique est la seule à mêler les deux genres. »

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Mélodie Martin-Couture

Elsa Poulin, membre de Cultur'Innov, entreprise de services-conseils spécialisée en cultures émergentes, Saint-Camille

Le monde des coops, c'est un peu par hasard qu'Elsa Poulin, 23 ans, est tombée dedans. Finissante d'un programme en techniques de bioécologie de l'Université de Sherbrooke, elle décroche son premier emploi chez Cultur'Innov. « Les emplois dans mon domaine sont assez rares en Estrie et ce qui n'était qu'un emploi d'été est finalement devenu un poste permanent. J'ai été accrochée par le domaine de travail innovant, mais aussi le fonctionnement de la coop : avoir l'opportunité de siéger au conseil d'administration, participer activement à la prise de décision, pouvoir partager ses idées », explique Elsa Poulin.

Cultur'Innov est une coopérative de solidarité formée en 2009 qui offre des formations et des services-conseils aux propriétaires fonciers et aux producteurs agricoles ou forestiers en matière de diversification et de développement du potentiel horticole de leur terrain. « Ils font appel à nous pour faire autre chose que du bois ou de la culture de champs. Nous voyons ce qui pousse déjà et ce qu'ils pourraient planter », poursuit-elle. Cultur'Innov est spécialisée dans les petits fruits émergents, les plantes médicinales, les produits forestiers non ligneux (PFNL) c'est-à-dire tous les produits de la forêt autres que le bois d'oeuvre. « C'est encore un marché de niche, émergent, c'est assez nouveau, mais les gens découvrent peu à peu ces plantes. » Et de plus en plus de cuisiniers audacieux utilisent ces plantes indigènes oubliées ou nouvellement introduites.

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Elsa Poulin 

Julien Lamarche, membre cofondateur de La Fabrique, atelier collectif, Sherbrooke

L'histoire de la Fabrique a commencé dans un garage, mais l'atelier collectif est sur le point de prendre de l'ampleur. Officiellement coopérative depuis le début du mois de septembre, le projet développé par des étudiants de l'Université de Sherbrooke mûrit depuis deux ans. « Nous étions tous étudiants en ingénierie, mais nous avions une idée plus large du génie. Nous avions un côté artiste/artisan », raconte Julien Lamarche, 26 ans et président de la coop de solidarité. L'idée est d'offrir aux membres un local, un lieu d'échange de connaissances, des outils et des formations pour « patenter » des objets. L'inspiration vient du concept des makerspaces de plus en plus populaires aux États-Unis. « Il y a un mouvement mondial tourné vers le DIY (Do It Yourself, ou Faites-le vous même) qui émerge. Au Québec, le mouvement s'organise et plusieurs organisations de ce genre ont vu le jour récemment. Les gens veulent garder le contrôle sur les objets qui les entourent, fabriquer ou réparer les objets du quotidien », constate-t-il.

Les membres, qui sont actuellement une vingtaine, viennent maintenant de tous les milieux et sont de tous âges. « Ils s'approprient l'atelier, tout le monde en est propriétaire et tout le monde est responsable de la réussite du projet. »

Si la Fabrique est toujours dans le garage des débuts, un déménagement vers de plus grands locaux est prévu pour janvier 2015.

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Julien Lamarche

Marc Pelletier, membre cofondateur de On est 10, entreprise de production cinématographique et audiovisuelle, Montréal

Originaire d'Halifax, Marc Pelletier est installé depuis 8 ans à Montréal où il a étudié la production cinématographique à l'École de cinéma Mel Hoppenheim. « À la sortie de l'école, en 2011, je n'avais que quelques petits contrats et j'ai dû travailler pendant un an dans un supermarché. Le domaine est bouché, raconte Marc Pelletier, 26 ans. La coop a été une porte d'entrée sur le marché du travail. » Avec sept autres finissants, il forme la coopérative de solidarité On est 10 qui fêtera ses 2 ans à la fin du mois d'octobre. L'idée de départ est de faire entrer sur le marché du travail et de soutenir les projets personnels de 10 artistes - d'où le nom - qui oeuvrent dans tous les domaines. Du documentaire au cinéma expérimental en passant par la fiction et la vidéo corporative et qu'ils soient monteur, réalisateur ou éclairagiste. Depuis, le mandat a évolué. « Nous sommes maintenant 35 membres et nous visons la centaine à la fin de notre troisième année. Nous voulons aider la relève, créer un réseau de contacts et contrer l'isolement des travailleurs autonomes. Nous offrons un service clé en main, où tous les services que d'autres coops pourraient offrir sont centralisés : location d'équipement, développement de projets de la conception à la postproduction, aide pour l'obtention de subventions... »

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Marc Pelletier