Les Québécois prennent leur retraite trop tôt. C'est mauvais pour les finances publiques... et pour eux-mêmes, puisque 60% d'entre eux ne tirent pas des prestations suffisantes de la sécurité du revenu, estiment Claude Castonguay, le père de l'assurance maladie, et l'économiste Mathieu Laberge.

«Les personnes qui s'engagent dans la voie de la retraite vont devoir compter davantage sur des revenus d'emploi en retardant leur départ du marché du travail», peut-on aussi lire dans le document intitulé La longévité: une richesse, rendu public hier par le Centre interuniversitaire de recherche en analyse des organisations (CIRANO).

En conférence de presse, Claude Castonguay s'est désolé hier de ce que les Québécois soient poussés si tôt à la retraite par les conventions collectives et les régimes de retraite.

Qu'on en juge: en 2008, selon Statistique Canada, 39,7% des Québécois de 60 à 64 ans travaillaient encore. En Ontario, la proportion était de 51,4% et la moyenne canadienne, de 48,1%.

Élever l'âge de la retraite à 67 ans? Claude Castonguay ne le préconise pas. Il croit plutôt qu'il faut garder au travail les gens de 60 à 64 ans dans les mêmes proportions que les gens de 50 à 55 ans.

Pour ce faire, il ne propose pas le goulag mais des modifications au régime fiscal et aux régimes de retraite pour rendre plus avantageux le fait de travailler.

C'est d'autant plus urgent que 700 000 postes seront à pourvoir d'ici à 2012 au Québec, avec une population vieillissante et un gouvernement aux prises avec des déficits structurels, signale M. Castonguay.

Il presse donc le gouvernement Charest de mettre sur pied une véritable politique du vieillissement actif.

Prêcher par l'exemple

Michel St-Germain, actuaire chez Mercer, s'inquiète lui aussi de la décroissance annoncée de la population active en 2013, dans un paysage où tant de gens, à 60 ans, peuvent prendre leur retraite avec 70% de leur salaire.

Oui, le gouvernement doit agir, mais pas nécessairement au sens interventionniste où M. Castonguay l'entend. Il doit d'abord cesser d'être lui-même le champion de la mise à la retraite hâtive, fait observer M. St-Germain. Il cite le cas célèbre des infirmières, mais aussi, de façon générale, la règle qui veut que tout fonctionnaire qui a 35 ans de service ait tout intérêt à cesser de travailler.

Autrement, M. St-Germain croit que la vieille règle de l'offre et de la demande prévaudra dans les domaines où il y aura effectivement pénurie ou quand il s'agira de retenir les plus compétents. «On proposera peut-être à certaines personnes 50% de leur rente de retraite et 70% de leur salaire», avance-t-il.

«On verra aussi peut-être plus de gens près de la retraite continuer à travailler, mais à temps partiel», avance Yves St-Maurice, économiste en chef adjoint au Mouvement Desjardins.

Pour garder plus de gens sur le marché du travail, il croit, comme M. Castonguay, que des encouragements fiscaux peuvent être envisagés, «comme un taux d'imposition plus bas» pour les gens de 65 ans toujours actifs.

TAUX D'ACTIVITÉ DES 50 ANS ET PLUS

QUÉBEC / ONTARIO / CANADA

50 à 54 ans: 82,9% / 83,5% / 83,7%

55 à 59 ans: 66,6% / 73,0% / 71,5%

60 à 64 ans: 39,7% / 51,4% / 48,1%

65 à 69 ans: 15,9% / 22,4% / 21,2%

70 ans et": 2,9% / 5,9% / 5,2%

Source : La longévité : une richesse, rapport du Centre interuniversitaire de recherche en analyse des organisations. Auteurs : Claude Castonguay et Mathieu Laberge.