À 56 ans, Hélène s'ouvre aux finances personnelles.

Elle avait lu dans La Presse un article sur les régimes de retraite d'employeurs et a écrit pour savoir si les institutions bancaires offrent un programme équivalent. «Je verse chaque semaine quelques dollars dans un REER, mais s'il existait un fonds destiné à la retraite, je pourrais dès maintenant y contribuer, a-t-elle expliqué. Je commence à peine à m'intéresser au dossier, les chiffres ayant toujours été un casse-tête pour moi.»

Le REER est ce qui s'en rapproche le plus. Hélène y dépose déjà 8400$ chaque année. De son côté, son employeur verse pour elle 1056$ à un fonds de travailleurs.

 

Hélène gagne un salaire de 60 000$. Elle vise la retraite à 65 ans mais soupçonne que sa situation financière sera plus avantageuse si elle la retarde à 67 ou 68 ans. «J'habite en milieu rural, relativement loin des services, relate-t-elle. Je souhaite m'autosuffire plutôt qu'être à la remorque financière d'un conjoint ou de sa voiture.» Elle veut donc que les calculs soient réalisés comme si elle vivait seule. Pour être autonome, il lui faudra une auto. Elle prévoit changer la sienne en 2019, au moment de sa retraite.

Elle possède un duplex qui lui laisse un revenu après dépenses de 2800$. Mais des difficultés avec des locataires récalcitrants la privent de 3200$ en loyers impayés.

«Étant donné mon arrivée tardive sur le marché du travail, est-il préférable d'y rester afin d'améliorer ma mobilité, mon autonomie?» s'enquiert-elle.

Un exercice plein d'enseignements

Notre planificateur financier invité, Denis Bellemare, de Desjardins, a pu le constater: «Hélène s'intéresse très peu à la gestion de ses finances personnelles.» Son conjoint, avec lequel elle vit depuis 30 ans, avait pris en main la gestion du ménage. Hélène l'évoque avec humour: «Quand M. Bellemare m'a demandé combien je gagnais, j'ai réalisé que je ne le savais pas. Je me suis dit: mon Dieu, que l'ai l'air tarte!»

En rassemblant ses documents pour les besoins de l'exercice, elle a constaté qu'elle possédait 80 000$ en REER et 15 000$ en placements non enregistrés.

Denis Bellemare lui a demandé d'estimer son budget de retraite. Sa première estimation était particulièrement basse. «Inouï, j'ai oublié que, actuellement, mon conjoint paie le loyer, la nourriture, les assurances et l'entretien général de la maison!» raconte-t-elle. Un deuxième essai plus réaliste lui a permis de fixer la cible d'un revenu de retraite net de 35 000$ à 65 ans.

Son second objectif a lui aussi été précisé. Elle achètera en 2019 une voiture de 12 000$ en dollars actuels, financée sur 60 mois.

Le planificateur a dressé différents scénarios de retraite. Tous ont une base commune - une inflation de 2,2%, un horizon de décès à 90 ans et un rendement moyen de 4,64%, en accord avec son tempérament prudent.

La première projection est celle du statu quo. Si Hélène continue de verser 700$ par mois dans son REER, elle ne pourra maintenir à la retraite qu'un revenu net de 25 400$. Il lui faut faire un effort supplémentaire.

En consacrant à son REER 512$ de plus par mois, afin de rattraper et de combler ses droits de cotisation inutilisés, elle hausse son revenu de retraite à 27 200$, soit 78% de son objectif.

Pour atteindre les 100%, il faudrait qu'elle accumule en plus 26 300$ en épargne hors REER d'ici à 2019. «Ce scénario n'est pas réaliste et aurait des conséquences trop importantes sur le budget actuel», commente Denis Bellemare.

Si Hélène retarde sa retraite à 68 ans, un effort d'épargne REER supplémentaire de 450$ par mois l'amène à 91% de son objectif. «Cette stratégie d'épargne REER étalée dans le temps permet d'aller chercher le maximum de droits REER inutilisés», commente Denis Bellemare. C'est le scénario le plus probant.

Ces projections n'ont pas tenu compte des deux terrains qu'Hélène possède. «Elle aurait avantage à procéder à une juste évaluation de leur valeur marchande et de leur potentiel de croissance», avise le planificateur. Dans un dernier scénario où elle disposerait de ces terrains à 74 ans, une épargne supplémentaire de 512$ par mois lui permettrait de prendre sa retraite à 65 ans, avec un revenu net de 29 000$, soit 87% de son objectif.

Puisque Hélène compte garder son duplex aussi longtemps que possible, elle tirerait sans doute avantage à demander une déduction fiscale pour amortissement sur la propriété, suggère encore notre conseiller. Comme dans un REER, l'impôt est alors reporté à plus tard. Mais il faut impérativement qu'Hélène réinvestisse chaque année les économies d'impôt dans un compte non enregistré - un compte d'épargne libre d'impôt (CELI), par exemple.

Sinon, ses 15 000$ d'épargne hors REER pourraient être transférés dans un CELI, à raison du maximum de 5000$ par année.

Notre scénario serait encore plus profitable si Hélène réussissait à régler, peut-être avec l'aide de la Régie du logement, les loyers en souffrance récurrents de ses locataires. Mais comme il s'agit d'un ménage avec six enfants, notre lectrice au grand coeur ne veut pas les soumettre à trop de pression.

Hélène a découvert un monde. «M. Bellemare a eu la gentillesse de me tenir par la main et de me guider, confie-t-elle, enchantée de l'expérience. À la limite, c'est thérapeutique.»

 

Les chiffres

Hélène, 56 ans

Salaire: 60 000$

Autres revenus: 10 900$

Actifs

Placements non enregistrés: 15 121$

REER: 80 238$

Droits inutilisés: 17 400$

Duplex: valeur de 180 000$

Hypothèque: 80 500$

Deux terrains d'une valeur totale de 55 000$

«Elle est très consciente qu'il s'agit d'un premier pas et qu'elle devra rencontrer un planificateur financier afin d'apporter les changements souhaités pour plus de justesse.» - Denis Bellemare, planificateur, financier et représentant en épargne collective pour Desjardins Cabinet de services financiers