(Québec) Québec solidaire (QS) demande au gouvernement Legault d’invoquer sans plus tarder l’article 33 de l’Accord Canada-Québec de 1991 sur l’immigration afin de provoquer une nouvelle ronde de négociations avec Ottawa pour réparer un système qui « ne convient plus aux Québécois ».

Dans une lettre qui a été acheminée mardi à la ministre de l’Immigration, Christine Fréchette, que La Presse a obtenue, l’ancien président de l’Association des avocats en droit de l’immigration et actuel député solidaire Guillaume Cliche-Rivard affirme que Québec a « toute la légitimité nécessaire pour revendiquer l’ensemble » des pouvoirs en immigration.

« L’accord dit que chaque partie peut invoquer l’article 33 dans un préavis de six mois et que l’accord actuel continue de s’opérer tant qu’il n’y a pas la signature d’un nouvel accord. Je ne comprends pas pourquoi la ministre Fréchette n’a pas encore écrit à [son homologue fédéral] Marc Miller pour invoquer l’article. Elle passe les derniers mois à dire qu’il y a un blocage avec Ottawa, mais elle n’a pas encore invoqué le mécanisme juridique prévu, légal, qui lui permet d’agir. Ça me dépasse », dit-il.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Christine Fréchette, ministre de l’Immigration

Dans sa lettre, M. Cliche-Rivard identifie des exigences minimales que Québec doit obtenir en immigration. D’abord, il doit convaincre Ottawa d’être contraint à obtenir l’accord de la province « lorsqu’il établit ses propres niveaux d’immigration pour l’ensemble du pays ». L’objectif de cette demande est d’assurer le poids démographique du Québec dans l’ensemble canadien.

« Sans le consentement du Québec, Ottawa ne pourra pas hausser ses seuils au niveau national », explique le député solidaire. En entrevue, il n’a pas répondu si une telle demande était réaliste, ni pourquoi le fédéral accepterait de négocier un tel droit de veto pour le Québec dans le contrôle des seuils fédéraux en immigration.

Tout le monde au Québec est d’accord que les cibles fédérales ne sont pas raisonnables. Si le Québec pouvait jouer son rôle formel et ferme, la politique fédérale serait plus raisonnable.

Guillaume Cliche-Rivard, porte-parole de QS en matière d’immigration

Dans un deuxième temps, le député solidaire presse la ministre Fréchette de rapatrier au Québec tous les pouvoirs pour sélectionner l’ensemble de son immigration, incluant le volet du regroupement familial, le volet refuge et le volet humanitaire.

« Le Québec doit également pouvoir régulariser et pérenniser le statut de toutes personnes sur son territoire si l’intérêt public le justifie. […] Quant à l’immigration temporaire, le Québec doit également pouvoir sélectionner l’ensemble de ses travailleurs étrangers temporaires, ce qu’il ne fait pas actuellement avec le Programme de mobilité internationale », dit-il entre autres.

Quoi faire des demandeurs d’asile

Dans le contexte où le gouvernement Legault presse une fois de plus Ottawa de répartir équitablement les demandeurs d’asile qui arrivent au pays d’un océan à l’autre, M. Cliche-Rivard joint sa voix aux demandes portées par la ministre Christine Fréchette pour que la province soit remboursée pour les frais encourus au cours des dernières années.

Comme on ne possède pas les leviers sur les visas, comme on ne contrôle pas les frontières, il faut à tout le moins qu’on obtienne un mécanisme de répartition [des demandeurs d’asile] à travers le pays, comme ça se fait dans l’Union européenne. On doit faire la même chose à l’intérieur du Canada, de manière volontaire et bienveillante.

Guillaume Cliche-Rivard, porte-parole de QS en matière d’immigration

« Au Canada, les autres provinces doivent faire leur juste part. […] Il va falloir que le Canada reconnaisse enfin les efforts du Québec, les dépenses du Québec, et assure le remboursement plein et entier des frais d’accueil générés par les dernières années et pour les demandeurs à venir », a ajouté le député.

Dans sa lettre à la ministre Fréchette, M. Cliche-Rivard lui demande aussi d’obtenir le pouvoir de « régulariser et pérenniser le statut de toutes personnes sur son territoire » et de « réaffirmer son droit de déterminer qui peut travailler sur son territoire et sous quelles conditions, nonobstant l’émission ou non d’un permis de travail par le fédéral ».