(Québec) Gabriel Nadeau-Dubois met son statut de co-porte-parole en jeu : les militants devront démontrer qu’ils ont confiance en lui pour qu’il reste en poste.

« Il y a deux conditions qui doivent être réunies pour que je continue d’être co-porte-parole de Québec solidaire. Que j’aie confiance dans le parti, et que le parti ait confiance en moi », a affirmé M. Nadeau-Dubois en entrevue avec La Presse, 24 heures avant le début du Conseil national du parti, qui se déroule à Saguenay jusqu’à dimanche.

La première condition est « remplie », il a toujours confiance en Québec solidaire. « Ce qui s’est passé cette semaine avec le dépôt d’une modernisation de la loi Françoise David en est une démonstration éclatante. On est plus utiles que jamais, et déjà dans l’opposition, on est capables de changer la vie des gens. Imaginez si on était au gouvernement », explique-t-il.

Mais la deuxième condition ne l’est toujours pas, malgré un vote de confiance qu’il a remporté haut la main à Gatineau en novembre.

Est-ce que le parti a confiance en moi ? Ça, c’est une question à laquelle les membres et les militants de Québec solidaire doivent répondre.

Gabriel Nadeau-Dubois, co-porte-parole de QS

Le parti est secoué par une crise interne depuis la démission d’Émilise Lessard-Therrien de son poste de co-porte-parole de Québec solidaire. À la suite de ce départ, Gabriel Nadeau-Dubois a proposé à QS de prendre un virage « pragmatique » et de revoir les responsabilités des leaders du parti.

Le premier test : le Conseil national qui se déroule en fin de semaine, où les militants se prononceront sur la Déclaration de Saguenay, une proposition politique qui découle d’une tournée des régions de l’aile parlementaire du parti, ainsi que sur la nécessité d’alléger le programme de QS.

M. Nadeau-Dubois n’a toutefois pas souhaité indiquer quel sera l’étalon de mesure de l’appui des membres. « Il n’y a pas de vote en particulier prévu pour ça. Mais moi, je demeure toujours à l’écoute de ce que les gens me disent, que ce soit dans les débats ou les corridors », a-t-il soutenu.

Le député de Gouin invite « les observateurs à ne pas se focaliser sur un indicateur en particulier ». Il s’attend à ce que la Déclaration de Saguenay soit « bonifiée » par des amendements. Il y aura également débat sur « comment on améliore notre programme ».

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

La co-porte-parole par intérim de Québec solidaire, Christine Labrie

Co-porte-parole par intérim, la députée Christine Labrie affirme de son côté qu’il n’y a pas « de vote pour lequel ça passe où ça casse ». Si l’ensemble de la Déclaration de Saguenay était rejeté, ça « serait un message important », reconnaît-elle. « Mais j’en serais fort surprise, parce qu’il y a plusieurs suggestions d’amendement pour la bonifier », a-t-elle expliqué.

Transition juste

Les deux co-porte-parole veulent mettre de l’avant le concept de transition juste qui se trouve dans la Déclaration de Saguenay, le fruit de la tournée régionale que le parti a tenue après sa défaite électorale de 2022.

Le principe n’est pas nouveau : en 2018, Québec solidaire promettait déjà « un fonds de transition pour la requalification de la main-d’œuvre des secteurs touchés […], par exemple pour l’industrie pétrochimique ».

Mais avec la Déclaration, M. Nadeau-Dubois et Mme Labrie veulent aller plus loin en mettant de l’avant « le principe du zéro perte d’emploi nette à l’intérieur de chaque région », et l’implantation « des comités paritaires sur la transition dans les milieux de travail ».

« Une des choses qu’on a constatées abondamment durant la tournée des régions, quand on parle de transition écologique, c’est qu’il y a des gens inquiets pour leur emploi », a expliqué Mme Labrie.

Le principe de zéro perte nette d’emploi dans chacune des régions, c’est pour répondre à cette préoccupation pour que chacun trouve sa place dans cette transition.

Christine Labrie, co-porte-parole par intérim de QS

Un gouvernement de Québec solidaire mettrait en place des « conseils régionaux de développement et de transition » pour que « dans chacune des communautés, les acteurs puissent s’asseoir ensemble et réfléchir à comment opérer la transition », a affirmé la députée de Sherbrooke.

« Guerre culturelle »

Ce que QS veut éviter : que la question de la lutte contre les changements climatiques se transforme en « guerre culturelle », comme c’est le cas aux États-Unis, et que la transition écologique « soit perçue par certains travailleurs et travailleuses comme une attaque contre leur emploi, leur communauté, voire contre leur style de vie », a ajouté M. Nadeau-Dubois.

Ils visent l’ex-président américain Donald Trump et le chef du Parti conservateur du Canada, Pierre Poilievre, qui « instrumentalisent » la politique environnementale pour « diviser les travailleurs ».

Ils voient leur proposition, où les travailleurs font partie de la démarche de transition, comme un « antidote à cette logique » et pour permettre au Québec d’atteindre ses cibles climatiques.