(Bromont) Inquiets de l’état des finances publiques, les libéraux réclament un nouveau plan de « rigueur » budgétaire, au même moment où ils célèbrent ce week-end en Estrie l’héritage de l’ancien premier ministre Philippe Couillard, qui refuse toujours l’étiquette d’austérité qui a été accolée au gouvernement qu’il a formé de 2014 à 2018.

Réunis en conseil général samedi et dimanche à Bromont, les militants du Parti libéral du Québec (PLQ) ont voté une résolution-cadre qui place la hausse de la « productivité » en priorité, mais aussi l’assainissement des finances publiques dans le contexte où le dernier budget du Québec prévoit un déficit record de 11 milliards pour l’année 2024-2025.

François Legault est quelqu’un qui est absolument incapable de faire des choix difficiles. Il ne les [prend] pas, ces décisions difficiles là. Il garroche de l’argent à gauche et à droite sans avoir de réelle vision.

André Fortin, député de Pontiac

En fin d’après-midi samedi, les libéraux ont souligné au cours d’une longue cérémonie parsemée de discours le mandat de premier ministre de Philippe Couillard, qui avait limité la croissance des dépenses de mission à 1,4 % et 1,1 % lors de ses deux premières années au pouvoir. Tour à tour, les anciens premiers ministres Daniel Johnson et Jean Charest ont souligné les bons coups de M. Couillard, notamment la mise en chantier du REM qui relie Montréal à la Rive-Sud. Tous les anciens chefs libéraux toujours vivants étaient présents.

PHOTO CHARLES WILLIAM PELLETIER, COLLABORATION SPÉCIALE

Le Parti libéral rendait hommage à son ancien chef Philippe Couillard

« La saine gestion des finances publiques, c’est important », a clamé Philippe Couillard dans son discours très largement prononcé en français, mais avec quelques passages en anglais. Il a fait un appel à l’ouverture et à l’inclusion pour combattre la division qu’encouragent à ses yeux les politiciens qui montrent du doigt les immigrants et les non-francophones pour les défis économiques ou identitaires de la province.

« La carte de crédit est pleine »

À l’aube d’une course à la direction déterminante pour l’avenir du PLQ, André Fortin croit que les électeurs ont tourné la page quant aux frustrations qui se sont exprimées après le mandat du gouvernement Couillard. « Dès qu’on quitte une fonction comme celle de premier ministre, il y a toujours une petite période où les Québécois veulent tenter quelque chose d’autre, [et] c’est arrivé à M. Couillard comme c’est arrivé à beaucoup de premiers ministres dans l’histoire du Québec », a-t-il dit.

Philippe Couillard est allé encore plus loin. « Le Parti libéral est de retour ! », a-t-il clamé malgré les sondages toujours difficiles qu’accumule la formation politique.

Le leader parlementaire de l’opposition officielle, Monsef Derraji, croit également que les citoyens ne gardent pas un mauvais souvenir du gouvernement de Philippe Couillard, qui a perdu le pouvoir en 2018 en subissant une défaite écrasante après un seul mandat. « Vous manquez aux Québécois », a renchéri la députée Madwa-Nika Cadet dans son discours, s’adressant à l’ancien premier ministre.

On créait de la richesse et on gérait bien les finances publiques. Les services publics, fin 2018, [comparativement] à aujourd’hui, étaient en bien meilleure position. Regardez le temps d’attente aux urgences et l’accès à la première ligne [en santé]. Personne aujourd’hui ne va me dire que l’accès à la première ligne s’est amélioré avec François Legault.

Monsef Derraji, député de Nelligan

En proposant à ses membres qu’un éventuel gouvernement libéral présente « au cours de la première année de son mandat un plan de retour à l’équilibre budgétaire », le PLQ prépare-t-il une nouvelle période d’austérité ?

« Le Parti libéral a toujours été le parti de la rigueur et de la bonne gestion des finances publiques. Ce qu’on va promettre aux Québécois, c’est de prendre au sérieux les finances publiques. […] La carte de crédit est pleine », a-t-il dit.

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Marc Tanguay

Pour le chef par intérim Marc Tanguay, « la rigueur est le maître mot ». « Équilibrer les finances publiques, il n’y a rien de mal à ça ! On doit en être fier », a ajouté le président du parti, Rafael Primeau-Ferraro.

Sur le réseau social X, l’ancien directeur des communications de l’ex-cheffe libérale Dominique Anglade, Jeremy Ghio, ne s’est pas montré séduit par ce qu’il a entendu du conseil général du PLQ à Bromont. « J’ai vraiment du mal à comprendre la stratégie du PLQ aujourd’hui. Les libéraux promettent de ramener l’austérité, alors que c’est précisément ce qui les a poussés vers la sortie en 2018. Drôle de façon de se tourner vers l’avenir », a-t-il écrit.

Démonstration de force pour Milliard

Plus tôt samedi, en matinée, une vingtaine de jeunes supporters de l’actuel président-directeur général de la Fédération des chambres de commerce du Québec, Charles Milliard, issus d’un « mouvement » rassemblant près de 80 personnes, comme La Presse le révélait samedi, ont fait une démonstration de force afin de l’inciter à se lancer dans la course à la direction du parti.

Il y a quelques mois, lors d’un conseil général libéral à Drummondville, Frédéric Beauchemin, qui ne cache pas son intérêt pour la direction du parti, était accompagné dans tous ses déplacements d’une horde de jeunes qui l’appuyaient. Où sont-ils aujourd’hui ?

« Il y a 1,1 million de jeunes entre 16 et 25 ans au Québec. Si on applique le pourcentage [des intentions de vote] qu’on a eu dans le dernier sondage, ça fait 185 000. Il y a des jeunes en masse pour tout le monde », a-t-il dit à son arrivée au conseil général, samedi.