Le Port de Montréal pourrait être « pris en otage » et devenir le théâtre de manifestations quotidiennes en raison d'un différend au sujet de l'interprétation de la convention collective entre les débardeurs et l'Association des employeurs maritimes, prévient le syndicat.

Selon André Racette, conseiller pour le Syndicat des débardeurs, l'employeur contrevient à la convention collective en engageant de nouveaux travailleurs sur appel sans recourir à une liste fournie par le syndicat.

« Je suis convaincu que si le litige ne se règle pas, les compagnies d'arrimage seront prises en otage. Si [les débardeurs] se promènent sur le port tous les jours pour manifester et se rassembler, ça va perturber les activités, c'est certain », a-t-il déclaré en entrevue avec La Presse.

Furieux, le Syndicat des débardeurs a déposé deux plaintes au Conseil canadien des relations industrielles pour « pratique déloyale » et tente d'obtenir une ordonnance forçant l'employeur à cesser cette pratique. Une assemblée générale doit se tenir ce matin, où on mettra sur pied un mouvement de contestation.

« Nous avons réitéré à plusieurs reprises à l'Association que nous étions en mesure de fournir une liste [de travailleurs disponibles sur appel] aussi longue que nécessaire. Mais quand on leur a remis notre liste, ils l'ont déchirée et ont dit qu'ils n'avaient pas besoin de consulter le syndicat », a dit M. Racette.

UNE « MAUVAISE INTERPRÉTATION »

L'Association des employeurs maritimes croit toutefois que le syndicat fait fausse route et que les débardeurs ne saisissent pas certaines nuances de leur convention collective.

« Ça fait 40 ans que nous travaillons ainsi. Quand les employés permanents ne suffisent pas à la tâche, pour plusieurs raisons, nous faisons venir d'autres employés », a expliqué Gilles Corriveau, porte-parole de l'Association.

Selon lui, l'Association des employeurs maritimes est tenue de choisir ses travailleurs à partir d'une liste préparée par le syndicat uniquement lorsqu'il est question d'embauche pour des postes permanents.

« Et quand nous lui avons demandé une liste, le syndicat nous a envoyé 60 noms, dont 44 étaient des proches ou des membres de la famille de nos employés. De notre côté, quand est venu le temps de nous constituer une banque [de travailleurs sur appel], une simple annonce sur internet nous a permis de récolter plus de 600 candidats », a dit M. Corriveau.

Entre-temps, des manifestations sporadiques éclatent au Port de Montréal. Une centaine de débardeurs bloquent parfois l'entrée sur le site aux travailleurs sur appel choisis par l'Association, ce qui a mené, affirme le syndicat, à des suspensions et des renvois.

« J'ai même des gens qui travaillent sur l'exécutif du syndicat qui ont été suspendus, qui ont vu leur salaire coupé. C'est complètement abusif », martèle le président du Syndicat des débardeurs, Christian Beaudin, qui entend proposer à ses membres qu'ils paient collectivement les salaires suspendus.