L'entreprise K.L. Mainville, qui exécute le plus grand nombre de contrats de déneigement pour le ministère des Transports du Québec (MTQ) dans la grande région de Montréal, a reçu un montant record d'amendes, totalisant 76 315 $ depuis le début de l'hiver, pour des manquements aux exigences de ses contrats.

L'entrepreneur est responsable de 9 des 35 circuits routiers sous l'autorité du MTQ dans la région métropolitaine, principalement des autoroutes, ce qui peut expliquer en partie qu'il reçoive les pénalités les plus importantes. C'est K.L. Mainville qui s'occupe notamment, depuis novembre, de déneiger l'autoroute 13, lieu du cafouillage monstre où des centaines d'automobilistes ont été coincés pendant plusieurs heures, lors de la gigantesque tempête du 14 mars 2017.

Mais le patron, Serge Mainville, estime être visé de façon exagérée par les surveillants du Ministère. « Ils ont des exigences abusives envers nous, ils nous demandent, par exemple, de dégager les entrées et sorties d'autoroutes et de faire le chargement et le transport de la neige usée, alors qu'ils ne le font même pas pour les secteurs déneigés par leurs propres équipes », dénonce l'entrepreneur.

Les données fournies par le MTQ font état des pénalités infligées en date du 24 janvier. Depuis, Serge Mainville révèle avoir reçu encore deux amendes totalisant 12 400 $. « On est rendu à près de 90 000 $ et il reste encore la moitié de l'hiver, ça n'a aucun bon sens ! », dit-il.

À titre de comparaison, l'entrepreneur le plus puni au Québec au cours des deux derniers hivers (2015-2016 et 2016-2017) a été Excavation Loiselle, avec des sanctions totalisant 56 600 $.

DEUX POIDS, DEUX MESURES ?

Furieux, Serge Mainville a documenté ses assertions en prenant des photos du travail des déneigeurs du MTQ et de celui d'autres entrepreneurs, pour montrer que les surveillants tolèrent ailleurs des situations pour lesquelles il a été sanctionné.

Il a l'intention de contester plusieurs réprimandes.

Pourquoi croit-il être visé plus sévèrement ? « J'ai entendu dire que les gens du Ministère n'aiment pas avoir un seul entrepreneur qui détient beaucoup de contrats », avance Serge Mainville.

L'entrepreneur de Mirabel a en effet décroché plusieurs nouveaux contrats, en soumissionnant à des prix plus bas que ses compétiteurs. Il entretient notamment des tronçons des autoroutes 20, 40, 440, 640 et 25.

Il a acheté pour 35 millions de dollars de nouveaux équipements pour réaliser ces contrats. Aujourd'hui, il s'en mord les doigts. 

« Je vais terminer la saison en cours, mais après je me retire, je ne travaillerai plus jamais pour le MTQ », dit Serge Mainville, patron de K.L. Mainville.

Il dit avoir aussi des réclamations à l'endroit du Ministère, pour environ 125 000 $, parce que ses équipes de soufflage de la neige ont été retardées par des fermetures de routes, en raison de travaux, ce qui l'a obligé à payer plus d'heures de travail et l'a empêché de respecter les délais.

SILENCE AU MTQ

Au MTQ, on indique ne pas pouvoir commenter les doléances de Serge Mainville. « La surveillance est la même pour tous les entrepreneurs à contrat pour le Ministère », affirme Martin Girard, porte-parole du MTQ.

Le MTQ refuse de préciser les motifs des sanctions imposées aux entrepreneurs.

Pour la grande région de Montréal, le Ministère a reçu 178 plaintes au sujet du déneigement depuis le début de l'hiver. Au total, 22 avis de réprimande, avec ou sans retenues financières, ont été distribués aux entrepreneurs qui travaillent pour le MTQ.

Serge Mainville se plaint d'avoir été mis à l'amende avant même l'arrivée des premiers flocons, en octobre, parce que son nouvel entrepôt à sel tout juste achevé n'était pas encore recouvert d'une toile.

Il donne d'autres exemples : les patrouilleurs du MTQ n'auraient pas « vu » ses camions, une nuit où du déneigement était nécessaire, mais ses équipes étaient bel et bien à l'oeuvre, affirme-t-il. On lui reproche aussi d'avoir soufflé de la neige près d'une voie ferrée, à un endroit pourtant hors d'atteinte de ses équipes, dit-il.

Il aurait de plus été sanctionné parce qu'une voie sur trois n'était pas assez bien dégagée sur l'autoroute 25 le matin de Noël, confie-t-il.

Aucune des fautes qui lui sont reprochées n'a compromis la sécurité des automobilistes, soutient l'entrepreneur. « C'est seulement parce qu'ils nous cherchent des bibittes », déplore-t-il.