Les mariages célébrés par une «personne désignée», qui peut être un ami ou un membre de la famille du couple, continuent de gagner en popularité, et ont représenté le quart des mariages de couples de sexe opposé en 2015 au Québec.

Ce type de mariage est célébré depuis 2002 au Québec, année de l'entrée en vigueur d'une nouvelle loi, et la courbe est demeurée ascendante depuis ce temps - en nombre et en proportion de l'ensemble des mariages.

«Il s'agit vraiment d'une tendance à la hausse qui n'a jamais ralenti. Cela s'est fait principalement au détriment des ministres du culte, des mariages religieux, qui ont vu leur part diminuer au cours de la même période 2002-2015», a expliqué la démographe Anne Binette Charbonneau, auteure de l'étude de l'Institut de la statistique du Québec (ISQ), en entrevue avec La Presse canadienne.

Selon les données provisoires des mariages et de la nuptialité au Québec, publiées mardi par l'ISQ, environ 22 400 mariages ont été célébrés au Québec en 2015, un nombre similaire à celui de l'année précédente.

La proportion des mariages par une personne désignée surpasse celle des unions officialisées par un greffier au palais de justice (16 %) ou par un notaire (14 %). Quant à la part des mariages religieux, soit ceux célébrés par des ministres du culte, elle diminue de nouveau pour s'établir à 44 %, comparativement à 71 % en 2002.

La démographe n'a pas voulu trop s'avancer sur les motifs de cette tendance lourde, parlant tout de même de la variété de choix pour le lieu de la célébration.

«À ma connaissance, il y a vraiment une variété de choix pour le lieu de la célébration, et peut-être que ça parle beaucoup aux gens de pouvoir choisir leur milieu, un décor bucolique, quoique l'église peut aussi être très belle», a-t-elle laissé tomber.

Chez les couples de même sexe, le choix d'une personne désignée demeure le plus populaire, représentant 37 % des mariages en 2015. Toutefois, le poids des mariages entre conjoints de même sexe demeure faible, soit 3 % de l'ensemble des mariages.

«Si on regarde d'une manière globale, au début, il y avait vraiment seulement un ministre du culte qui pouvait célébrer un mariage. Ensuite, à la fin des années 1960, les greffiers ont été introduits comme type de célébrants possibles, donc on a vu une diminution de la part des mariages religieux, qui s'était ensuite stabilisée à 70 % dans les années 1990. Et en 2002, introduction de nouveaux célébrants, et là, la chute des mariages religieux s'est poursuivie», a indiqué la démographe.

Elle a noté que les notaires avaient aussi connu une certaine progression, moins rapide toutefois que celle des personnes désignées.

Marc Pelchat, vicaire général de l'Archidiocèse de Québec, a dit constater une «certaine stabilité» dans les comportements des Québécois à l'égard du mariage «depuis les grands changements du début des années 2000, ou de la fin des années 1990».

Surtout, M. Pelchat a dit se réjouir qu'avec la variété des approches disponibles, les mariages religieux comptent encore pour 44 % de l'ensemble des mariages.

«Il y a encore beaucoup de couples qui décident de se marier religieusement, et lorsqu'ils le choisissent, ils le choisissent en toute liberté, c'est un choix qui est mûri, ils le font avec un vrai discernement et non par pressions sociales ou par habitude, et on est très heureux de les accueillir. Je dirais qu'on les accompagne encore mieux du fait qu'il n'y a aucune obligation», a poursuivi M. Pelchat en entrevue téléphonique.

Le vicaire général de l'Archidiocèse de Québec a également souligné des changements quant à l'âge du premier mariage.

Le mariage en général demeure non seulement peu fréquent, il est aussi plus tardif, selon l'ISQ. L'âge moyen au premier mariage a augmenté de nouveau en 2015 et atteint 33,3 ans chez les hommes et 31,8 ans chez les femmes. Dans les deux cas, il s'agissait d'une hausse d'environ 8 ans depuis le début des années 1970, indique le rapport de l'organisme.

«On remarque une augmentation du nombre des personnes qui choisissent de se marier religieusement après avoir vécu un certain temps une union de fait. On célèbre de plus en plus de mariages de personnes qui ont déjà des enfants», a-t-il indiqué.

La propension à se marier est par ailleurs très faible au Québec, et ce, depuis plusieurs années, indique l'ISQ.

Une affaire de famille... ou de collègues

Au sein de l'entreprise montréalaise de distribution de fruits de mer Norref, le mariage semble être une affaire qui se joue entre collègues. Le directeur du développement, Hughes Viau, célébrera en septembre le mariage d'une employée, lui qui avait également choisi son patron pour son propre mariage cinq ans plus tôt.

Dans un cas comme dans l'autre, l'homme et la femme sont de confession catholique, mais ne pratiquent plus leur religion. Ainsi, comme pour bon nombre d'autres Québécois, le choix d'un mariage par une personne désignée semble «plus près de leurs valeurs».

«Jean-Roch (Thiffault) est mon patron direct depuis onze ans, c'est devenu un ami très proche et un mentor. Pour moi, c'était naturel de lui demander. Ma conjointe a une relation exceptionnelle avec lui aussi», a expliqué M. Viau.

L'idée était sensiblement la même pour Audrey Gadbois, qui se mariera en septembre et qui a choisi M. Viau comme célébrant.

«Pour l'aspect religieux, nous n'étions pas intéressés à avoir un prêtre qui fait la cérémonie, et je trouve tellement que d'avoir quelqu'un en qui j'ai confiance, quelqu'un que je respecte et qui est de mon entourage et bien plus présent que n'importe quel huissier ou notaire ou autre, je trouve que c'est beaucoup plus représentatif à mon avis que quelqu'un qui ne me connaît pas du tout», a-t-elle fait valoir.

Les mariages de conjoints de sexe opposé selon la catégorie du célébrant

Mariages religieux, c'est-à-dire célébrés par un ministre du culte:

2002: 70 %

2008: 61 %

2015: 44 %

Mariages officialisés par un greffier au palais de justice:

2002: 29 %

2008: 19 %

2015: 16 %

Mariages célébrés par une personne désignée:

2002: zéro

2008: 11 %

2015: 26 %

Mariages contractés devant un notaire:

2002: zéro

2008: 10 %

2015: 14 %