Aux yeux de la communauté gaie, les entreprises n'ont plus le choix: pour l'emporter sur leurs concurrentes, elles doivent démontrer de manière concrète leur ouverture à l'égard des homosexuels, qu'il s'agisse de leurs employés ou de leurs clients.

«On manquera bientôt de main-d'oeuvre, alors pour attirer et garder ses employés gais, il faut leur offrir un environnement invitant et les valoriser, pour qu'ils se sentent à la bonne place», argue Marc-Antoine Saumier, qui travaille aux ventes à Xerox et préside la Chambre de commerce gaie du Québec.

Quand les employés se sentent bien, cela améliore le climat de travail et, du même coup, leur motivation et leur productivité, souligne de son côté Martine Roy, gestionnaire de situations critiques à IBM Canada. «On perd du temps quand on est tout le temps préoccupé», dit-elle.

Depuis 2008, ces deux Québécois et leurs partenaires ont convaincu 32 grandes entreprises (dont Xerox, IBM, Telus, Bell, Desjardins, la Banque TD, Home Depot) de s'associer à Fierté au travail Canada. L'objectif de cet organisme à but non lucratif: «rendre plus inclusifs les lieux de travail de la communauté lesbienne, gaie, bisexuelle et transgenre».

«Les entreprises doivent encourager leurs cadres gais à être visibles. Ça nous donne des modèles, ça montre que la réussite est possible», illustre M. Saumier.

À IBM, le directeur du développement des affaires, Sylvain Hogue, l'a fait. «Avoir des gens différents dans une organisation a une valeur économique, dit-il. Une entreprise qui mise sur l'innovation a plus de chances de réussir avec des gens qui ont des points de vue diversifiés. Il faut faire plus que les accepter, il faut les valoriser.»

Comme une quarantaine d'autres entreprises, le Groupe Banque TD subventionne ainsi les Célébrations de la fierté Montréal (et 13 autres festivals du même genre au Canada et aux États-Unis).

Les clients conservateurs n'ont apparemment pas bronché en apercevant le char coloré de TD au défilé de l'an dernier. Et ils ne se seraient pas plaints davantage lorsque la Banque a lancé une campagne publicitaire qui mettait en vedette des couples, dont certains de même sexe. «La communauté gaie était heureuse. Les non-gais étaient neutres ou positifs. Et les employés se sentent beaucoup plus inclus», résume David Pinsonneault, l'un des vice-présidents du groupe.

Bref, appuyer la communauté gaie peut être payant. Il y aurait 2 ou 3 millions de Canadiens homosexuels ou bisexuels, ce qui représente un marché de plusieurs milliards de dollars. «Le quart des entreprises sont très heureuses lorsqu'on leur demande de s'associer aux Célébrations de la fierté. Elles ont compris l'argent rose», souligne Éric Pineault, président fondateur de la manifestation.