Voyage dans le temps la semaine dernière à Milan. Pour la Semaine de la mode, les créateurs semblaient s'être donné le mot pour replonger sans nostalgie apparente dans les décennies passées. Les défilés ont porté aux nues fourrures, cuirs façon python et robes fatales. Retour sur les moments les plus attendus, et parfois décevants, de cinq journées de présentation.

Chez Prada, la collection débute sur des robes rafraîchissantes «très années 60», qui associent plissés asymétriques, boutonnages (clin d'oeil à l'époque) et graphisme en hommage au célèbre modèle Mondrian d'Yves Saint Laurent (l'un porté par Anaïs Pouliot). Ce premier volet fermé, on attaque les modèles plus glamour, comme ces manteaux en peau de reptile à col de fourrure, ces jupes et hauts façon écailles de poisson aux éclats disco et ces ensembles qui combinent étrangement paillettes et fourrure. Très réussi.

Du côté de la maison Gucci, retour dans les années 70. Bien que très en vogue cette saison, elles n'en ont pas moins toujours fait partie de l'ADN de la marque. Frida Giannini y dévoile une femme fatale aux multiples atours de luxe, parfois même un peu tape-à-l'oeil. Il faut ce qu'il faut pour se faire remarquer. On retiendra ces boléros affolants jetés sur les épaules, ces robes longues et enveloppantes au chic impeccable et, partout, beaucoup de fourrure et de cuir façon python. Pas très écolo, tout ça!

Après tout ce faste, marquons une pause vitaminée avec la collection de D&G (la deuxième marque de Domenico Dolce et Stefano Gabbana). Les deux créateurs nous invitent à replonger dans les années George Michael, époque Wham, à coups de microparkas de nylon jaune, de jupes en maille et de superpositions moulantes, souvent en version fluo avec lettres imprimées. Une vraie cure antidéprime.

Les mêmes designers, pour leur marque maîtresse Dolce Gabbana, font cette fois un tour du côté des années 50, des Blues Brother au rockabilly, comme en témoignent ces magnifiques tailleurs-pantalons noirs très masculin-féminin ou encore ces grandes robes en mousseline à blouse cravatée et parsemées d'étoiles. Beau sous toutes les coutures.

Choc des cultures lors de la présentation de la griffe Emilio Pucci. On nous propose de réaliser un grand écart (temporel): fastes du XVIIIe siècle autrichien, lambris versaillais et un gala de charité chic de la fin des années 80. Ambitieux, mais difficile à réaliser et... à digérer (notamment ces imprimés plumes de paon et ces vestes tyroliennes revisitées).

Giorgio Armani verse quant à lui dans l'effet boudoir, avec une collection dominée par les roses poudrés, les pantalons pattes d'éléphant (souvent un peu trop courts, pour faire une jolie jambe), les robes de velours imprimées du portrait du créateur et les faux pyjamas de soie. Dans l'ensemble, c'est un rétro chic réussi.

La maison Missoni, aujourd'hui dirigée par Angela, la fille du fondateur (et légende vivante de la mode italienne) Ottavio Missoni, propose une garde-robe étrangement éclectique... pour ne pas dire un brin ratée. On y trouve quand même l'esprit de la marque, avec le travail souvent remarquable de la laine et des couleurs. Mais le reste n'est pas à l'avenant.

Mieux vaut terminer ce bilan sur deux très jolis défilés, soit ceux de Max Mara et de Versace. La collection de Donatella Versace a de quoi surprendre tant elle est sobre et chic, à la limite de l'austérité. On adore ces robes noires impeccables à découpes géométriques dans le dos, ponctuées de boutons dorés, les mêmes que l'on trouve sur les manteaux, sanglés d'une ceinture en cuir verni. Les seules excentricités à éclairer cette garde-robe ultra-classe: un tour-de-cou en renard coloré ou un serpentin en python de couleur. Sobriété également chez Max Mara, tels ce duffle-coat blanc sans boutons, ces délicieuses robes épurées (en tissu ou en maille), ces manteaux tout simples ceinturés haut sur la taille. Le tout ponctué, ici ou là, de touches de fourrure, comme on en a vu dans tous les défilés.