Camille Forcherio, designer de la marque de maillots Mimi Hammer, a lancé à l'atelier b. le 2 mai dernier sa collection Pirates of the Soft Waves Sea. Quelques jours plus tôt, elle nous a ouvert les portes de son atelier.

Devant la fenêtre, un bébé bananier se fait dorer au soleil. Sur la table à dessin, Nanette s'étire «comme une chatte» dans un rayon de lumière. Dans la succession de gestes insouciants, elle accroche au passage un bout de bois flotté décoloré par l'eau salée.

Bienvenue à Longueuil-sur-Mer, dans l'antre de Camille Forcherio.

On pourrait filer la métaphore longtemps tant les maillots de bain Mimi Hammer sont une invitation «à berc[er] notre infini sur le fini des mers» (Baudelaire), un appel du large. Le plus joli pied de nez aux hivers qui n'en finissent pas de mourir, pendant lesquels Camille se projette dans une maison de plage, les deux pieds enfoncés dans le sable.

Mimi, c'est le surnom que lui donne son papa depuis son «plus jeune âge» (elle a 23 ans!). Mimi Hammer en est un inventé de toutes pièces, choisi pour sa consonance espiègle, un peu naïve, qui fait penser à un jouet d'enfant. Une image qui convient bien aux maillots joyeux et légers qu'elle crée, ornementés de boucles, de jupettes, de franges, de motifs à fleurs et de volants ondulés.

Fabriquer des costumes de bain au Québec, une drôle d'idée? Pour la demoiselle, il s'agit plutôt d'un appel venu de loin en loin, quelque chose comme une vocation inscrite dans ses gènes. Sa famille du côté paternel, de descendance italienne, vit sur la Côte d'Azur, entre Nice et Monaco. Toutes ses vacances ont été partagées entre la Méditerranée et l'Atlantique à la hauteur de la Floride, où ses grands-parents maternels passent leurs étés. Camille est une fille de soleil.

Sans doute parce qu'elle a souvent l'esprit ailleurs, perdu dans des nuages exotiques, Camille n'a jamais été une élève modèle, à son aise sur les bancs d'école. C'est une solitaire, une intuitive, qui a besoin de tout expérimenter par elle-même avant de se l'approprier. Longtemps, au regard de ses collègues, elle s'en est fait un complexe. Jusqu'à ce qu'un professeur du Collège LaSalle, où elle n'a complété qu'une année, lui apprenne que Georges Lévesque, l'un des grands designers que le Québec ait connus, était lui aussi un autodidacte, qui n'avait jamais donné un seul coup de ciseau avant de se lancer dans la mode.

En 2011, Camille fait une rencontre marquante, fer de lance de sa carrière: Noémie Vaillancourt, designer des bijoux à plumes Noémiah. Une fée marraine, qui devient bientôt une collaboratrice. Cette dernière l'aide à lancer sa boutique en ligne Etsy, l'encourage à renforcer son esthétique, son image de marque, à soigner la présentation visuelle de ses collections. Par son entremise, elle se lie d'amitié avec Manon Parent, photographe et styliste, qui veille aujourd'hui à la «mise en beauté» de ses maillots.

Pour l'instant, sa clientèle vient surtout des États-Unis, où «la culture du soleil» est mieux ancrée. Au Québec, le marché est plus limité, mais pas seulement en raison de ses courtes saisons. Ici, le costume de bain est considéré comme un bout de tissu fonctionnel, moins comme un vêtement à part entière, qui prolonge la personnalité de celle qui le porte, explique Camille. Des petits paquets contenant des jolis bas de maillots taille extra-haute Mimi Hammer s'envolent tous les jours au sud de la frontière. Pendant qu'ici, on les trouve encore audacieux et un peu artsy.

Mais Camille ne se décourage pas. Elle compte bien nous rendre moins frileux, un maillot à la fois.

En quelques mots

Nom : Camille Forcherio

Profession : Designer pour Mimi Hammer

Lieu de naissance : Longueuil

Sources d'inspiration : Le temps des fleurs printanières, les plages du sud de la France et la route de la soie au Vietnam

Plaisir coupable : Le chocolat belge qui vient vraiment de Belgique!

Ses maillots, en trois mots : Féminins, confortables et originaux

Points de vente à Montréal : Les Coureurs de Jupons, atelier b.

En ligne : mimihammer.com

Le lookbook de la collection printemps-été 2013, une collaboration entre Noémiah (bijoux) et Manon Parent (photos). Sa direction artistique est poétique et particulièrement astucieuse: silhouettes, coquillages, galets et étoiles de mer ont été découpés et collés sur fond de dunes de sable, de plages et de paysages marins. Autrement dit, si vous ne vous rendez pas à la mer, amenez la mer jusqu'à vous...

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE