Que fait-on lorsqu'on est végétalien et qu'on cherche un bon restaurant à Montréal ?

On choisit un bon restaurant carnivore et on appelle assez à l'avance pour avertir le chef qu'on aimerait un repas végétalien, donc sans aucun produit d'origine animale. Si c'est un bon chef, il vous préparera d'excellents plats (j'ai fait l'expérience chez Decca 77 et ce fut un grand succès). Si c'est une sandwicherie comme Olive + Gourmando, elle aura peut-être déjà une option végétalienne, comme son excellent sandwich Viva Las Vegan, avec tofu et salsa maison piquante et acidulée.Mais si vous tenez à trouver un vraiment bon restaurant végétalien, style Millenium à San Francisco, bonne chance. Car mis à part le végétarien Fuchsia (ou Crudessence, pour ses excellents laits frappés), ils sacrifient à peu près tous la saveur au nom de principes. Dommage.

Le premier restaurant végétalien que j'ai essayé s'appelle Chuch. On le trouve rue Saint-Denis, à côté de son grand frère Chu Chai, un peu au sud de Rachel. Comme Chu Chai est un restaurant extrêmement populaire qui était plein à craquer le soir où j'aurais voulu y aller, je me suis retrouvée chez Chuch, la version « apportez votre vin » de l'autre, à la porte voisine, où, m'a-t-on assurée, j'aurais droit à la même cuisine, exactement, mais dans une ambiance moins feutrée, plus familiale.

Ce que je ne savais pas, toutefois, c'est que le végétalisme/végétarisme de la cuisine offerte dans ces deux restaurants est essentiellement basé sur le faux. Le faux canard, le faux boeuf, le faux poulet... Que pratiquement tous les plats sont préparés à partir de succédanés végétaux, eux-mêmes conçus avec des protéines hautement transformées et tirées notamment du soja et du blé.

Il y aurait des centaines de lignes à écrire sur les innombrables paradoxes de ces «faux», qui se défendent mal d'un point de vue écologique. Mais disons que pour le moment, d'un point de vue gastronomique, cela ne se défend aucunement. Du moins pour ce que j'ai goûté chez Chuch. La texture d'éponge remplie d'eau du faux canard baigné dans une sauce de style hoisin était rebutante. Celle, plus fondante, du faux poulet inondé par une sauce aux arachides lourde - le genre de sauce qui a absolument besoin d'un contrepoint acidulé ou de la fraîcheur d'un légume cru et croquant - n'était guère plus invitante.

Bref, mis à part les dumplings aux légumes poêlés dodus et savoureux grâce à une sauce au gingembre bien équilibrée et les rouleaux impériaux, impeccables, bien frais et croustillants, ce repas fut une grande déception.

Pourquoi, me suis-je dit en sortant de là, la cuisine végétalienne se tire-t-elle autant dans le pied ?

Le lendemain, c'est chez Lola Rosa, rue Milton, que mes recherches se sont poursuivies. Là, le faux était dans le chili. Du faux boeuf haché fait de protéines végétales, qui avait le mérite, toutefois, de se faire totalement oublier. Dommage que ce plat ait manqué de sel car il avait au moins une qualité pour se faire aimer : il était bien épicé. En revanche, déception du côté du gâteau au chocolat végétalien, qui a confirmé, avec sa texture de gâteau industriel, très rebondissante, ce que j'ai toujours cru : il faut de vrais oeufs et du vrai beurre ou de la vraie crème pour faire de la bonne pâtisserie.

Entre-temps, je me suis même retrouvée à Québec, chez Zen, où la cuisine végétarienne à l'asiatique n'a rien de spectaculaire mais se limite au moins aux légumes et au tofu, ce qui est une bonne idée.

J'étais en train d'abandonner mes recherches quand une copine végétarienne m'a suggéré Fuchsia, à l'angle des avenues Duluth et Coloniale. Je ne connaissais pas ce mini-café que j'ai découvert avec plaisir un samedi matin pour le brunch. On m'y a servi une minestrone savoureuse et costaude, remplie de légumes et de petits haricots, tandis que les autres convives se régalaient d'oeufs brouillés qui ont connu un succès boeuf.

Accompagnant tout cela, les pommes de terre rissolées valaient le détour, croustillantes et généreusement relevées, voire légèrement piquantes, tandis qu'une généreuse salade de mesclun apportait à l'assiette toute la fraîcheur nécessaire. On a avalé le tout avec de grosses gorgées de jus de pomme épicé bien chaud.

Là, j'y retournerai.

Chu Chai et Chuch

4088 ou 4094, rue Saint-Denis

514-843-4194

www.chuchai.com

Lola Rosa

545, rue Milton, Montréal

514-287-9337

Fuchsia

4050, rue Coloniale, Montréal

514-842-1232

www.epiceriefleur.com