Première nuit, premier repas, premiers mots. La vie de bébé est jalonnée de ces « premières fois » qui soulèvent bien des questionnements et des inquiétudes pour ses parents. Pause rencontre parents et experts autour de ces moments mémorables.

La nuit précédant l'entrée à la garderie de leur fils, Mélanie Bergeron et Sylvain Bertrand ont peu dormi. L'inquiétude marquait leurs traits au réveil, mais c'est tout sourire qu'ils ont accompagné leur petit Ludovik, 8 mois, vers cette nouvelle grande étape.

« Le premier matin avant de partir, c'était épouvantable !, s'exclame Mélanie Bergeron, chargée de cours en soins infirmiers. Je me sentais coupable de le laisser, j'étais stressée et anxieuse. »

« J'avais un peu peur qu'il se sente abandonné, avoue son conjoint, Sylvain Bertrand. Je viens d'une famille abitibienne tissée serré. Mes grands-parents me gardaient quand j'étais petit, alors ce n'était pas naturel pour moi d'inscrire mon enfant à la garderie. »

Devant leur petit, toutefois, les parents affichaient un air joyeux, soucieux qu'ils étaient de ne pas influencer son humeur. « Tu vas bien t'amuser et te faire de nouveaux amis ! », répétaient-ils, avec entrain.

Au moment de le laisser, la maman a mis Ludovik dans les bras de son éducatrice et a commencé à décrire la routine des boires et des siestes. 

« J'ai soudain perçu dans son regard qu'il se demandait ce qui se passait. J'ai fondu en larmes et je me suis retirée pour éviter qu'il me voie ainsi. Son père a terminé les explications et a salué Ludovik de la main en souriant. »

- Mélanie Bergeron, maman de Ludovik

INTÉGRATION EN DOUCEUR

Des trois demi-journées de sa première semaine de garderie, Ludovik n'a pas bronché. Les parents s'en étonnent, d'autant plus qu'il ne s'était jamais fait garder auparavant. « Il semble très à l'aise et devient enjoué dès qu'on arrive à la garderie », raconte la maman de 35 ans.

Petit garçon aura 10 mois lorsque sa maman reprendra le travail. Cela laisse donc deux mois pour une intégration graduelle durant laquelle Mélanie Bergeron se remettra dans le bain de l'enseignement. Entre-temps, la maison lui paraît bien vide. « Depuis qu'il est né, Ludovik est le centre de mon univers. Je le ressens comme une déchirure, comme si on m'enlevait une partie de moi-même. C'est difficile de le confier à des inconnus, mais la communication avec les éducatrices est bonne. Ça m'aide à m'apaiser. »

Ludovik aura-t-il des réactions à retardement lorsqu'il constatera que le scénario se répète et qu'il est permanent ? « Ça me fait un peu peur, avoue-t-elle. Ce qui me rassure, c'est que mes amis parents me disent que les pleurs ne durent pas longtemps. J'espère tellement qu'il sera bien lorsque je reprendrai le travail afin d'y retourner la conscience tranquille. »

CONSEILS DE LA PSYCHOÉDUCATRICE

Passage obligé pour plusieurs familles, l'intégration à la garderie est souvent une période d'émotions intenses tant pour les parents que pour les enfants. Notre petit trésor va-t-il s'adapter ? Va-t-il pleurer toute la journée ? Prendra-t-on bien soin de lui ? Selon Corinne Ste-Marie, psychoéducatrice au CIUSSS de l'Est-de-l'Île-de-Montréal, le meilleur moyen de passer au travers ce processus d'adaptation, c'est de bâtir un lien de confiance avec le milieu de garde basé sur une bonne communication.

« Plus le parent va se sentir en confiance et plus il va transmettre ce sentiment à son bébé, précise-t-elle. Dès les premières visites, les parents se donnent le droit de poser toutes les questions qui les préoccupent. Ensuite, les échanges positifs et répétés entre les parents et les éducatrices/responsables du service de garde sont très profitables. »

Si papa et maman anticipent pendant des semaines l'entrée à la garderie, qu'en est-il de leur poupon ? « Les parents sous-estiment l'importance de préparer leur enfant, sous prétexte que leur bébé ne les comprend pas encore. Or, il est très favorable de lui parler positivement de ce qu'il vivra, de ce qu'il fera de ses journées, de son éducatrice, de ses petits amis, afin de rendre le tout moins mystérieux. » 

« Ça peut être une bonne idée de se servir de livres d'histoires sur le sujet. »

- Corinne Ste-Marie, psychoéducatrice

Une intégration progressive sur une période d'un mois est suggérée afin d'habituer graduellement l'enfant à son nouvel environnement. « L'enfant a une routine bien établie et cela vient tout chambouler, rappelle la psychoéducatrice. Un objet de la maison, comme une peluche ou un toutou qui a une odeur connue, peut faciliter la transition. »

Corinne Ste-Marie recommande d'instaurer un rituel d'arrivée et de départ en répétant les mêmes gestes simples afin de donner des repères rassurants à l'enfant. « Le matin, on ne s'attarde pas trop pour ne pas envoyer de message contradictoire à l'enfant. Et s'il pleure à notre arrivée, on met des mots sur ses émotions : tu es triste parce que tu as passé la journée à la garderie, mais voilà, je suis arrivé ! »

Et pas de panique si l'enfant montre des signes de régression les premières semaines, c'est normal, rassure la psychoéducatrice. « Il refuse de manger ou de dormir, redemande le biberon, le sein ou la suce ? C'est sa façon de manifester son insécurité et son inconfort par rapport au changement. On ne s'en inquiète pas trop. Dans peu de temps, il trouvera une stabilité dans sa nouvelle routine. »

POUR EN SAVOIR PLUS

Services de garde du Québec - Mieux vivre avec notre enfant de la grossesse à deux ans, de l'Institut national de santé publique du Québec (INSPQ)

Garderie (enfant de 1 à 3 ans) - Naître et grandir