Sophie, 30 ans, est en amour! Il y a trois mois, une copine lui a présenté son collègue de bureau célibataire, et depuis ils ne se quittent plus... sauf quand Jean-François a son fils Samuel à la maison. Sophie ne veut pas le rencontrer tout de suite, car elle veut s'assurer de la solidité et de la viabilité de sa relation avec Jean-François avant de s'attacher à son fils. Sinon, s'il y avait rupture, elle aurait à faire le deuil de deux personnes plutôt que d'une seule. Et c'est sans compter l'importance qu'elle accorde au fait de ne pas trop s'imposer à Samuel, qui, contrairement à son père, ne l'a pas choisie. De plus, elle se questionne beaucoup sur le rôle d'un beau-parent. Jusqu'à quel point devra-t-elle s'impliquer dans l'affection, les soins et l'encadrement à offrir à Samuel? Il a déjà un père, une mère, une éducatrice, une enseignante, un beau-père... A-t-il vraiment besoin d'une personne supplémentaire pour veiller sur lui? En même temps, est-ce que recevoir trop d'amour et d'encadrement est une chose possible pour un enfant? Peut-être a-t-elle quelque chose de spécial à apporter à Samuel... Peut-être que lui-même apportera beaucoup à sa vie. Jean-François, avec toute sa sagesse, lui dit qu'elle aura une réponse à ses questions seulement lorsqu'elle «plongera». En voyant ses grands yeux angoissés, il ajoute qu'il s'agit d'une adaptation et d'un apprentissage qu'elle pourra faire au jour le jour, et qu'il a confiance qu'elle fera une excellente belle-mère, elle qui adore les enfants. Il faut bien qu'un chum rassure sa blonde!

À une époque où les familles recomposées sont de plus en plus nombreuses, comment savoir quelle est la meilleure façon de jouer ce rôle? La vérité est qu'il n'y a pas de recette toute faite, car de nombreux facteurs varient d'une famille recomposée à une autre :

» cohabitation des conjoints;

» type de garde des enfants (garde partagée, une fin de semaine sur deux);

» âge des enfants au moment du début de la relation de couple;

» implication de l'autre parent dans la vie de l'enfant;

» niveau de conflit entre les parents de l'enfant;

» niveau d'acceptation du beau-parent par l'autre parent.

Tous ces facteurs font en sorte que n'importe quel individu qui s'apprête à devenir beau-parent peut se poser de nombreuses questions : quels rôles appartiennent seulement aux parents et jusqu'où un beau-parent peut-il s'impliquer dans la vie d'un enfant, tant du point de vue de ses besoins primaires, de ses besoins affectifs, que de son besoin d'encadrement?

Je crois qu'il faut adopter le rôle délicat de beau-parent en prenant son temps et, surtout, en étant conscient qu'il faudra s'adapter. En fait, il faut prendre conscience que contrairement à notre conjoint, son enfant ne nous a pas choisi et notre présence dans sa vie lui demandera une période d'adaptation.

Un beau-parent doit d'abord laisser le temps à l'enfant de l'apprivoiser et de développer sa confiance en lui. Pour ce faire, on doit privilégier le jeu, puis les soins avant de s'impliquer dans l'éducation et l'encadrement. Il en va de même lorsqu'un couple devient parent. Avec un tout petit bébé, on ne fait pas tout de suite de l'encadrement et de la discipline... On commence d'abord par lui donner des soins et beaucoup d'affection. Graduellement, la relation d'attachement se développe, et l'enfant apprend à faire confiance à ses parents. Ensuite arrive le «terrible deux ans» durant lequel l'enfant commence à s'opposer. C'est à ce moment que les parents commencent à appliquer l'autorité et la discipline, bien après que leur enfant ait appris à leur faire confiance. C'est dans la nature des choses. Donc, en tant que beau-parent, avant de commencer à se questionner sur jusqu'où on aura à s'impliquer dans la discipline, il faut d'abord se demander comment entrer en relation avec l'enfant, comment le respecter et obtenir sa confiance. Ensuite, à travers le quotidien et avec une bonne communication avec le parent de l'enfant, l'implication du beau-parent dans la discipline deviendra plus claire. Ce niveau d'implication ne sera pas nécessairement la même d'un beau-parent à l'autre.

En effet, si l'autre parent (l'ex de votre conjoint) s'implique beaucoup dans son éducation et n'est pas très à l'aise avec le fait que vous fassiez la discipline auprès de son enfant, peut-être adopterez-vous un profil plus bas. Si, au contraire, l'autre parent est absent dans la vie de l'enfant et que ce dernier vous considère comme un père ou comme une mère, alors peut-être serez-vous à l'aise de vous impliquer comme si vous étiez son parent.

Toutes les familles recomposées sont différentes, et la façon d'appliquer le rôle de beau-parent peut varier d'une personne à l'autre, mais certains principes de base peuvent faciliter l'adaptation à ce rôle :

» commencer par développer une relation de confiance par le jeu avant de s'impliquer dans la discipline;

» développer une bonne communication avec le parent afin de pouvoir s'ajuster et trouver un équilibre dans les rôles de chacun;

» respecter l'enfant;

» et s'attendre à ce que l'enfant nous respecte, même s'il nous dit «t'es même pas ma vraie mère», ou «t'es pas mon vrai père». Après tout, il doit bien respecter son professeur à l'école, même si celui-ci n'est pas son parent!

En respectant ces grands principes de base, non seulement on peut s'adapter à ce rôle parfois ambigu qu'est celui de beau-parent, mais on peut même finir par trouver que c'est le rôle le plus génial qu'on ait jamais eu à jouer.