Âge: 28 ans. Profession: directrice de la station CUTV, la télé communautaire qui attire des milliers d'internautes en diffusant en direct sur le web les manifestations étudiantes.

Son histoire

«Mes parents sont diplomates, j'ai donc beaucoup vécu à l'étranger quand j'étais jeune, et j'ai ainsi appris plusieurs langues. En Amérique latine, où j'ai vécu plusieurs années, j'ai été exposée à des enjeux sociaux comme la pauvreté, l'injustice. Cela a motivé ma volonté de travailler dans le communautaire, dès mon jeune âge. De retour au Canada, je me suis inscrite en études internationales à l'Université de Montréal. Après mon bac, je me suis dirigée dans le domaine communautaire. À cette époque, je suis retournée en Équateur où j'ai travaillé dans une petite communauté isolée de l'Amazonie. De retour ici, j'ai commencé à m'investir dans les médias communautaires.»

Quelles expériences vous ont-elles préparée à devenir directrice de CUTV?

«Pendant mes études en communications à Concordia, j'ai commencé à m'investir dans la réalisation de documentaires. Je me suis alors rendue dans une communauté autochtone, où j'ai fait un petit film sur le diabète. De retour à Montréal, comme j'avais utilisé une caméra de CUTV, je me sentais redevable à la station et j'y ai fait du bénévolat. À cette époque, c'était un peu un «boys club» où l'on y faisait un peu n'importe quoi. Avec des amis, on se disait qu'il y avait quelque chose à faire. Pendant deux ans, on a donc travaillé d'arrache-pied pour en faire une vraie télé communautaire.»

Comment interprétez-vous le succès des dernières semaines de CUTV?

«Cela ne m'a pas vraiment surprise. Cela fait deux ans qu'on travaille pour gagner le respect et acquérir une légitimité. On avait déjà obtenu un certain succès à l'échelle du Québec, notamment par notre couverture du Printemps arabe. Nos images avaient alors été transmises dans le monde arabe. Mais on a encore beaucoup de défis. Et cela prouve que la télé communautaire est nécessaire.»

Que tirez-vous de cet engagement?

«Une des beautés du travail ici, c'est que nous rencontrons des gens des communautés autochtones, artistiques, ethniques. Des individus de partout dans le monde qui viennent donner du temps. Mes deux grandes passions sont les enjeux sociaux et les nouveaux médias. Il est très gratifiant et touchant de voir que les gens reconnaissent notre travail: cela se manifeste par la dame qui nous appelle pour nous demander si on est en sécurité, ou les gens qui nous font des commentaires. Et comme nous sommes dans une phase historique, comme citoyenne, je suis contente d'être sur le terrain. En revanche, on ne veut pas être trop fatigués et on souhaite assumer nos responsabilités. Il y a tellement de choses qui arrivent à la station, il faut tout gérer en même temps...»

Quelle est votre ambition professionnelle?

«Pour l'instant, je me sens super comblée. Mais notre succès est le fruit d'un travail d'équipe et un de mes buts est de ne pas rendre la station dépendante d'individus, qu'il s'agisse de moi ou de quelqu'un d'autre. Je me vois évoluer dans le monde communautaire. J'aimerais aussi retourner aux études, à la maîtrise puis au doctorat. Je crois que CUTV fera toujours partie de ma vie, en raison de ce qui s'y passe en ce moment.»

Quelles sont les personnes influentes dans votre parcours?

«Plusieurs des professeurs que j'ai rencontrés. En particulier, Ryoa Chung, qui m'a enseigné l'éthique en philosophie à l'Université de Montréal. Et Sandra Jefferson, militante anarchiste.»

cutvmontreal.ca