Pour faire face à la surpopulation carcérale, le ministère de la Sécurité publique a prévu cet automne loger temporairement des prisonniers dans des bâtiments sur pieux qui ressemblent à des maisons mobiles. Les gardiens de prison craignent pour leur sécurité.

Pour faire face à la surpopulation carcérale, le ministère de la Sécurité publique a prévu cet automne loger temporairement des prisonniers dans des bâtiments sur pieux qui ressemblent à des maisons mobiles. Les gardiens de prison craignent pour leur sécurité.

Ces «installations modulaires», annoncées en février par le ministre Jacques Dupuis, seront ajoutées dans les prochains mois aux prisons de Québec, d'Amos, de Trois-Rivières et de Sherbrooke, en attendant la construction de prisons neuves, promises d'ici cinq ans.

Établis dans l'enceinte des centres de détention, ces bâtiments sur pieux sont physiquement séparés des prisons. Au lieu de rester dans des cellules avec des barreaux, les prisonniers habitent des chambres avec des murs de gypse et une fenêtre.

«Pour des raisons de sécurité», le ministère de la Sécurité publique refuse de donner plus de détails. Mais selon ce qu'a appris Le Soleil, les détenus sont logés dans une sorte de «maison mobile, mais en plus gros», décrit un gardien de prison (qui préfère garder l'anonymat) du centre de détention d'Amos, en Abitibi, le seul établissement carcéral provincial qui possède déjà deux de ces installations modulaires.

En principe, seuls des prisonniers coupables de délits mineurs doivent y demeurer. Or, comme les prisons débordent, des détenus plus dangereux s'y retrouvent - c'est-à-dire que les administrateurs «vont prendre le moins pire des pires, et ils vont l'envoyer au pavillon», décrit le gardien de prison.

La sécurité compromise

Ses collègues de Québec, de Trois-Rivières et de Sherbrooke appréhendent l'arrivée des installations modulaires à l'automne. Ils craignent d'être agressés par des détenus et de devoir contrer plus de tentatives d'évasion, explique le président du syndicat des agents de la paix en services correctionnels, Stéphane Lemaire.

Il y a environ deux ans, trois prisonniers dans la même semaine se sont évadés en partant des bâtiments sur pieux de la prison d'Amos. Depuis, des détecteurs ont été installés pour avertir les gardiens lorsque l'ouverture des fenêtres dépasse un certain point. Un signal d'alarme retentit également lorsque les portes de secours au bout des couloirs sont franchies.

Nouvelles places

Malgré ces dispositifs, les installations modulaires d'Amos restent toutefois beaucoup moins sécuritaires que des prisons, souligne M. Lemaire. «Ce qu'on craint, dit-il, c'est que ces installations temporaires deviennent permanentes.»

En construisant ces bâtiments sur pieux, le ministère de la Sécurité publique prévoit ajouter 338 places dans les prisons provinciales cet automne.

Dans son rapport publié en mai dernier, la protectrice du citoyen Raymonde Saint-Germain estimait que cet ajout «ne permettrait vraisemblablement pas de combler les besoins actuels».

Alors que la capacité d'accueil des 17 prisons du Québec est de 3721 détenus, la moyenne de prisonniers était de 4200 en 2006-2007. En date du 19 août, huit prisons avaient une population supérieure à leur capacité. Au centre de détention de Québec, par exemple, on comptait 634 détenus pour 614 places.

mallard@lesoleil.com

Illustration(s) :

Le centre de détention d'Amos est le seul à avoir déjà deux installations modulaires. Sur la photo, on peut voir la plus récente, construite en 2004, dans laquelle les prisonniers ne sont pas détenus dans des cellules, mais dans des chambres avec des murs de gypse et une fenêtre.