Les consommateurs apprécieraient de prime abord les vins dits «issus du réchauffement climatique», plus puissants et alcoolisés, mais s'en lasseraient vite et seraient moins enclins à les acheter, selon une étude de l'Institut des Sciences de la vigne et du vin (ISVV) de Bordeaux.

L'étude, qui sera présentée mercredi à «ClimWine», symposium international sur l'impact du changement climatique sur la vigne et les stratégies d'adaptation, qui se tient à l'université Bordeaux Sciences Agro, visait à cerner quels +vins de demain+ les consommateurs d'aujourd'hui pourraient aimer.

Elle a été menée auprès de 184 personnes, sur un panel de rouges de Bordeaux, certains présentant les caractéristiques présumées d'un vin ayant subi l'impact du réchauffement climatique --plus puissant, plus alcoolisé, forte concentration aromatique -- et d'autres des caractéristiques plus «traditionnelles», a expliqué à l'AFP le responsable de l'étude Eric Giraud-Héraud, économiste à l'ISVV.

L'étude a été menée auprès de consommateurs réguliers de vin rouge qui testaient les vins à l'aveugle en plusieurs fois, chez eux ou à l'ISVV. À l'issue de l'étude, ils avaient la possibilité d'acheter l'un des vins testés.

Résultat: les vins présentant les caractéristiques du réchauffement climatique séduisent davantage à la première dégustation, sont les mieux notés, mais leur attrait est moindre aux dégustations suivantes, et le «consentement à payer» est relativement faible.

«On suspecte un changement d'habitude et de goûts de la part des consommateurs» par rapport à il y a quelques années, estiment M. Giraud-Héraud et un co-auteur argentin de l'étude, Alejandro Fuentes Espinoza. «Il y aurait une tendance à rechercher des vins moins puissants», alors que les vins du réchauffement climatique le sont davantage, ajoutent-ils, soulignant que l'étude reste à approfondir.

ClimWine réunit depuis lundi 150 chercheurs d'une vingtaine de nationalités autour de l'impact du réchauffement climatique sur la viticulture: qualité du vin, évolution des techniques, cépages, etc.

Le symposium a notamment entendu que si toutes les régions viticoles du monde sont affectées par le réchauffement, les effets et les moyens d'y remédier diffèrent fortement.

«La viticulture en Argentine se fait dans des zones désertiques», où l'irrigation est depuis longtemps une obligation, «alors qu'en Europe, on débat beaucoup dessus», explique par exemple Hernan Ojeda, économiste chilien à l'INRA Montpellier. «En Argentine, on développe aussi la "plantation nomade": les vignes sont plantées de plus en plus en altitude, pour rester à une température supportable».

Mais dans toutes les régions, la sélection génétique des cépages les plus résistants à la sécheresse est un enjeu, souligne Kees Van Leeuwen professeur de viticulture à Bordeaux Sciences Agro.