Alex Bellemare a voyagé à travers le monde en tant que skieur professionnel pendant des années. Aujourd’hui, il est complètement ailleurs, mais il reviendra à ses anciennes amours le temps de quelques heures, ce week-end, au Quartier latin…

La rue Saint-Denis, à Montréal, se transformera de vendredi à dimanche afin d’accueillir la deuxième édition de l’évènement hivernal et sportif Apik. Un parcours de ski et de planche à neige y sera aménagé. Une centaine d’athlètes d’ici et d’ailleurs prendront part aux compétitions, dont Alex Bellemare, qui a été invité par un de ses amis, Xavier Mayrand, lequel sera un des juges de la compétition.

« L’année passée, j’ai regretté un peu [de ne pas y aller] parce que le parcours est vraiment cool, raconte-t-il au téléphone. Au Québec, on n’a pas nécessairement les plus gros parcs à neige, donc de skier en ville sur un parcours qui est bien construit, c’est le fun. J’ai dit oui sans trop y penser. »

L’année dernière, l’évènement a réuni quelque 47 500 festivaliers dans le Quartier latin. Côté ambiance, donc, « c’est pas mal optimal, comparativement à quand tu es tout seul sur une montagne et il n’y a que des juges qui te voient sur une télé », lâche Bellemare.

PHOTO FOURNIE PAR LES ORGANISATEURS

Photo prise lors de la première édition de l’évènement hivernal et sportif Apik, l’an dernier

Même si son côté compétitif devrait ressortir au moment où il s’élancera sur le parcours, le natif de Shawinigan sera présent avant tout pour le plaisir, lui qui s’est éloigné de son sport silencieusement il y a quatre ans.

Parlons-en, de cette retraite discrète.

« Ouin, scusez… »

Alex Bellemare a connu beaucoup de succès aux X Games. Initialement, il souhaitait prendre part aux Jeux olympiques de 2014, à Sotchi, sauf qu’une déchirure du ligament croisé antérieur l’avait empêché de se qualifier. Il y est finalement arrivé en 2018, mais il se savait, à 24 ans, incapable de tenir tête à ses adversaires.

« J’étais en fin de carrière, j’y suis allé pour dire que j’y allais, mais je savais que je n’allais pas gagner », relate-t-il.

Il a pris le 22e rang en slopestyle à ces Jeux.

PHOTO SYLVAIN MAYER, ARCHIVES LE NOUVELLISTE

Alex Bellemare en 2018

[De 2014 à 2018], c’est juste quatre ans, mais en quatre ans, j’ai remarqué que c’était dangereux. Et je n’avais juste plus le goût de me lever à 7 h du matin pour aller faire des descentes dans le froid.

Alex Bellemare

En novembre 2019, Bellemare s’est rendu en Autriche pour la première Coupe du monde de la saison. Dans sa tête, l’idée de la retraite prenait déjà beaucoup de place. Ce matin-là, lors des qualifications, le temps était froid, gris et venteux.

« Moi, je suis là et je skie à peine, juste pour dire que je passe de haut en bas pour m’échauffer. Et puis il y a les jeunes pour qui c’est la première Coupe du monde, qui sont affamés. Ils font déjà leur descente de compétition, se souvient-il. Je les regarde skier et je me dis : je ne suis aucunement à ce point-là dans ma vie. C’est pas mal le bout où je me suis dit : je n’ai pas le goût de faire ça, donc je vais arrêter.

« J’ai regardé mes coachs et j’ai dit : ouin, scusez… »

Plutôt que d’accrocher radicalement ses skis, il a décidé l’année suivante de se lancer dans un projet vidéo avec Xavier Mayrand. « Il a été débile ; il m’a filmé pendant un an. On skiait dans les villes – Shawinigan, Trois-Rivières, Montréal… –, sur des modules urbains qu’on pouvait trouver. On a fait ça pendant tout un hiver. Je le voyais un peu comme mon au revoir. »

Aujourd’hui, un peu par écœurement et par manque de sauts d’envergure internationale dans les stations du Québec, il ne skie plus qu’une dizaine de fois par hiver.

Rouillé, mais heureux

Bellemare devrait obtenir son diplôme d’études collégiales en technologie du génie civil au cégep de Trois-Rivières en 2025. Il ignore encore s’il travaillera dans le domaine à temps plein, lui qui « trippe » sur son emploi estival en revêtement extérieur.

« [Le sport] m’a aidé, je vois que je suis pas mal plus en forme que les autres, note-t-il. Quand on est en hauteur et qu’il faut grimper sur des échelles, ça me stresse pas mal moins que d’autres. »

Pendant plusieurs années, Alex Bellemare a gagné sa vie en vivant son rêve. Ses commandites lui ont permis de faire de l’argent, ce qui lui a permis de bien vivre et de s’acheter son propre duplex, dans lequel il habite aujourd’hui. Mais quand il a accroché ses skis, la vraie vie l’a un peu « effrayé ».

Ç’a été rough, un peu épeurant parce que je ne savais pas quoi faire de ma peau. Mais c’est ce que je voulais, aussi.

Alex Bellamare

« Moi, je me suis toujours fait payer à mettre des photos sur Instagram et à faire du ski la fin de semaine dans des compétitions. Après ça j’ai travaillé au RONA, j’ai travaillé dans la construction. Je me suis inscrit à l’école. La vraie vie m’a comme effrayé au début, mais ça va super bien. »

Ce week-end, il profitera de son bref retour dans les modules. Sera-t-il rouillé ? « Il y a de fortes chances ! »