(Calgary) Valérie Maltais s’est fait passer un savon par son entraîneur après sa prestation à l’épreuve de départ en groupe à la première Coupe du monde de Stavanger, en Norvège, le mois dernier.

Gregor Jelonek ne lui reprochait pas sa septième place, mais la façon dont elle s’était comportée sur la glace. Plutôt que d’user de patience dans le peloton, la patineuse de vitesse de La Baie a mené un petit groupe d’échappée à un moment critique de la compétition.

Au bout du compte, elle n’était plus dans le coup quand les prétendantes au podium se sont départagées dans le dernier tour, au profit de sa compatriote Ivanie Blondin, qui a obtenu la victoire au sprint final.

« Greg était en tab… ! », a raconté Maltais jeudi après-midi à l’Anneau olympique de Calgary, où elle sera en action de vendredi à dimanche pour la troisième Coupe du monde de la saison. « Il m’a dit : “Arrête de tirer des tours en avant si tu veux faire tes courses. Ce n’est pas comme ça que tu vas avoir de l’énergie jusqu’à la fin. » »

La principale intéressée est bien d’accord avec cette analyse, même si, sur le coup, la remontrance l’a un peu secouée.

Pendant quatre ans, Maltais s’est essentiellement mise au service de Blondin, qui lui a appris les rudiments du départ de groupe. Cette façon de procéder la satisfaisait et lui était utile. Aux Jeux de Pékin, l’ex-spécialiste de courte piste a joué ses propres cartes pour la première fois (6e), une attitude qu’elle est déterminée à conserver cette saison.

PHOTO PETER DEJONG, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Valérie Maltais et Ivanie Blondin célèbrent la victoire à la poursuite par équipes en compagnie d’Isabelle Weidemann (à gauche), le mois passé à Stavanger, en Novège.

On voit qu’Ivanie [Blondin] n’a pas besoin de moi pour gagner des médailles. Je ne patine plus pour elle. Je veux patiner pour moi. Mais on patine aussi pour le Canada, au bout du compte…

Valérie Maltais

De là toute la complexité de cette épreuve où des pays ont des stratégies arrêtées de travail collectif. Au Canada, ce n’est pas le cas. Maltais souhaite donc pouvoir tirer son épingle du jeu, tout en s’assurant de ne pas nuire à sa coéquipière vice-championne olympique à Pékin.

En Norvège, elle est retombée dans son vieux schéma de course sans trop y penser. En s’entretenant avec les journalistes québécois peu après l’épreuve, elle a exprimé son amertume par rapport au déroulement des évènements. Elle aurait aimé recevoir une certaine reconnaissance de la part de Blondin.

« [Ma façon de patiner] a manifestement été à son avantage, a souligné Maltais. Sur le coup de l’émotion, j’ai dit que mon travail n’était pas reconnu. Mais pourquoi le serait-il si on ne patine pas ensemble ? »

Trois semaines plus tard, l’athlète de 32 ans tempère donc une situation qui a été un peu inconfortable. La mise au point de son entraîneur n’a fait qu’amplifier sa réaction initiale en entrevue quelques minutes plus tard.

« C’était mon premier feeling, mais comme athlète, tu ne patines pas pour la reconnaissance. Je patine pour moi. »

Et ce, jusqu’à avis contraire… « Peut-être que Patinage de vitesse Canada en reviendra à dire : “OK, on essaie de faire des stratégies collectives.” Mais pour le moment, je pense que tant qu’il y en a une qui gagne des médailles, ils ne s’intéresseront pas trop à l’autre. »

Se rapprocher du podium

Au-delà du départ en groupe, Maltais a d’autres grands objectifs individuels à Calgary, à commencer par le 3000 mètres de vendredi, où elle souhaite se rapprocher des meilleures.

Sa médaille d’or aux Championnats des quatre continents, la semaine dernière à Québec, est un pas dans cette direction.

« C’est surtout la manière dont j’ai patiné. Ça m’a tellement fait de bien. Quand j’ai fini ma course et que j’ai vu mon temps, je me suis dit : “Je viens de pogner de quoi !” »

La quadruple athlète olympique rigole en expliquant ce qui a cliqué : « Ça sonne un peu stupide, mais c’est vraiment comment j’ai trouvé le rythme pour respirer dans les lignes droites. Pour la première fois la semaine passée, j’ai réussi à bien respirer puis à récupérer dans les lignes droites pour réattaquer les virages. Avant ça, j’avais parfois l’impression de suffoquer sous mon capuchon en fin de course. »

Neuvième et dixième aux deux premières Coupes du monde, la Saguenéenne vise maintenant plus haut. « Est-ce que je suis sur le point de gagner une médaille en Coupe du monde ? Je ne pense pas, mais je m’en approche et c’est mon objectif. »

Objectif record du monde

Un autre grand objectif de Maltais à Calgary est le record mondial à la poursuite par équipes avec Blondin et Isabelle Weidemann. Les Japonaises détiennent la marque depuis 2017 et l’ont améliorée deux fois par la suite (2 min 50,76 s). Victorieuses à Stavanger, les Canadiennes pointent à un peu moins d’une seconde et demie, un temps établi l’an dernier en Alberta. « On a le titre de championnes olympiques et de la Coupe du monde, a rappelé Maltais. Tout ce qui nous manque, c’est d’être championnes mondiales et d’avoir le record du monde. C’est une chose qu’on veut atteindre, on ne s’en cache pas et on en a parlé en début d’année. Mais il ne suffit pas de le dire et ça ne se fera pas en claquant des doigts. Il faut tout bien faire et avoir une bonne exécution pour espérer avoir un bon temps. » À surveiller samedi.