Le départ de Charles Hamelin et la retraite hâtive du champion olympique et quadruple finaliste Samuel Girard, au début du dernier cycle, auraient suffi à déstabiliser n’importe quelle équipe sportive.

Or, la relève a brillamment répondu à l’appel sous l’œil bienveillant du vétéran Hamelin, qui sera absent du circuit de la Coupe du monde de patinage de vitesse sur courte piste pour la première fois depuis la saison 2002-2003, moment où Marc Gagnon venait lui-même de tirer sa révérence.

Aux derniers Jeux de Pékin, Steven Dubois s’est occupé de remplir la boîte à médailles avec l’argent et le bronze au 1500 m et au 500 m, respectivement.

Pascal Dion, déjà médaillé de bronze au relais à PyeongChang, a lui aussi connu une véritable éclosion sur le plan individuel, terminant au premier rang du classement général du 1000 m en Coupe du monde et concluant sa saison comme vice-champion mondial à Montréal.

Au point de vue collectif, Dubois, Dion et Hamelin ont uni leurs efforts à ceux de Maxime Laoun et de Jordan Pierre-Gilles pour remporter l’or olympique au relais, un premier sacre depuis celui de Vancouver en 2010.

Pour la Coupe du monde de Montréal, disputée de vendredi à dimanche à l’aréna Maurice-Richard, les jeunes vétérans – Dion est le plus vieux à 28 ans – accueillent deux nouveaux venus, Félix Roussel (21 ans) et Mathieu Pelletier (16 ans seulement).

Le premier servait de partenaire d’entraînement au groupe féminin jusqu’à récemment tandis que le second ne s’est joint à l’équipe Prochaine génération qu’en mai. Leur acclimatation semble se dérouler en douceur.

« Les quatre qui étaient là l’an passé, on a chacun notre propre énergie, a souligné Dion, mardi, en conférence de presse. On essaie d’inclure tout le monde dans les processus de décision. On va seulement essayer d’intégrer le plus possible les deux nouveaux dans l’équipe. Rien ne va changer par rapport aux dernières années. »

Dubois partage cette vision : « On avait une dynamique inclusive et on était vraiment tous de bons amis. […] On a toujours autant de plaisir. Avec les jeunes, ça va très bien pour l’instant. »

« Des leaders à notre manière »

L’entraîneur-chef Sébastien Cros se réjouit de constater la répartition des responsabilités entre les quatre aînés. « C’est bien d’avoir deux, trois, quatre gars qui arrivent à atteindre des résultats. C’est plus facile à gérer. Tu n’es pas tout seul. »

Le Français d’origine est curieux de voir comment « la dynamique de leadership va s’établir » entre eux : « Est-ce que ce sera un leadership partagé ? Charles n’est plus là. Moi, je m’attends un peu à ça pour ce qui est de l’équipe. Que ce ne soit pas une personne, mais que ce soit plus un groupe, ce qui va être bien. »

Pierre-Gilles, « qui n’a pas tout montré l’an passé », dixit Cros, est l’un de ceux qui auront à un rôle à jouer.

« On a chacun différents traits de personnalité qui font de nous des leaders à notre manière, a soulevé le Sherbrookois de 24 ans. Ce n’est un secret pour personne : Charles était un bon leader qui menait surtout par l’exemple. »

On a tous appris de lui et on essaie de reproduire ça pour faire perdurer cette caractéristique dans l’équipe canadienne.

Jordan Pierre-Gilles, à propos de Charles Hamelin

Incapable de nommer un meneur unique, Pierre-Gilles ajoute que même les recrues Pelletier et Roussel apporteront leur pierre à l’édifice.

« Ils sont déjà des leaders dans leur groupe d’âge. Mathieu va vite en devenir un [avec nous] parce que c’est un exemple. Un jeune qui perce à cet âge, c’est vraiment spécial et impressionnant pour tout le monde. Il va rapidement prendre une place importante à sa façon. »

En s’embarquant pour quatre années supplémentaires en 2018, Hamelin avait fait de cette transmission du flambeau un véritable objectif. Il peut sans doute se dire « mission accomplie », comme le titre de sa récente biographie écrite par Luc Bellemare.

« Je voulais que l’ambiance et l’esprit d’équipe soient là à 100 %, a rappelé Hamelin. Que chacun se pousse l’un et l’autre sans avoir à se forcer. C’était le fun à voir et à vivre pendant la dernière année qui a mené aux Jeux olympiques. Autant Jo, Pascal, Steven que Max mèneront le groupe à un moment ou un autre. Ce sera un groupe de leaders. Il n’y aura pas de chef ou quelque chose du genre, comme je l’ai toujours voulu. »

Renée qui ?

PHOTO MARTIN TREMBLAY, LA PRESSE

Renée Steenge (au centre)

Un peu tout le monde s’est posé la question en entendant le nom de Renée Steenge prononcé dans les haut-parleurs du Centre de glaces de Québec, il y a deux semaines. L’Ontarienne a terminé au troisième rang des sélections nationales derrière Kim Boutin et Courtney Sarault. À 24 ans, elle s’est donc qualifiée pour ses premières Coupes du monde.

Arrivée à Montréal à 16 ans, elle a passé deux ans dans le groupe Prochaine génération, participant aux Mondiaux juniors de 2017 avec Sarault, Alyson Charles et Danaé Blais. Exclue de l’équipe nationale deux ans plus tard, elle s’est expatriée à Calgary pour vivre sa passion. La pandémie de COVID-19 a retardé son retour.

« Sur le plan mental, c’était bien de prendre une pause et de m’éloigner d’un environnement qui est super compétitif. J’ai pu me concentrer sur ma technique, mes bases, moi-même. Mais sur le plan personnel, c’était assurément difficile d’être loin de la maison, de ma famille. Et je n’allais pas à l’école là-bas. »

Une commotion et un carton jaune aux championnats canadiens, en mars, ont ruiné ses chances de réintégrer le groupe national. Connaissant son potentiel, les entraîneurs l’ont toutefois gardée à Montréal comme partenaire d’entraînement.

Elle s’est révélée quelques mois plus tard aux sélections. « Je n’ai jamais été aussi nerveuse de toute ma vie pour une compétition, a confié Steenge. Ça voulait dire tellement de choses pour moi. Je me suis tellement investie pour ça. Après ce qui s’est passé en mars, j’étais un peu anxieuse. Je voulais vraiment réussir. » Dans les circonstances, elle anticipe n’être aucunement nerveuse pour sa première Coupe du monde.

Simon Drouin, La Presse