L’annonce d’une Coupe du monde à Tremblant en décembre 2023 ne pouvait mieux tomber pour Valérie Grenier.

L’athlète de Saint-Isidore, dans l’est de l’Ontario, aura alors 27 ans, la fleur de l’âge en ski alpin si l’on ne s’appelle pas Mikaela Shiffrin. La spécialiste du slalom géant aura deux épreuves pour s’illustrer sur la montagne qui l’a vue grandir.

La connaissance de la piste Flying Mile, qu’elle a dévalée des milliers de fois dans sa jeunesse, ne la favorisera pas vraiment, parce que cela remonte à loin et que les tracés sont très variables en géant. Mais elle compte sur l’appui de la foule pour offrir le meilleur d’elle-même.

« Ça peut être un stress comme un avantage », a-t-elle observé mardi matin, encore emballée par la nouvelle dévoilée par Canada Alpin (ACA) et la station des Laurentides. « Tu sais que tout le monde est là pour toi aussi. C’est toujours une bonne chose. »

Si son développement se poursuit comme prévu, Grenier pourrait très bien s’installer dans le portillon de départ avec le statut de prétendante au podium. Son potentiel et celui de quelques coéquipières plus jeunes ne sont d’ailleurs pas étrangers au choix d’ACA de se tourner vers cette discipline technique féminine dans sa demande à la Fédération internationale de ski.

Sans des problèmes aux tibias, des opérations, une grave blessure et un hiver à l’écart, l’ex-championne mondiale junior de la spécialité serait déjà probablement parmi les meilleures de sa profession à la veille de la nouvelle saison qui s’ouvrira samedi à Sölden, en Autriche.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

Valérie Grenier

L’an dernier, Grenier s’est blessée aux deux genoux en plein cœur de l’hiver, ce qui lui a fait manquer trois départs en Coupe du monde et l’a plongée dans une course contre la montre pour arriver prête à ses deuxièmes Jeux olympiques, à Pékin. Piégée par une neige capricieuse comme bien des concurrentes, dont Shiffrin, elle est sortie de piste en fin de première manche.

Avec le recul, Grenier constate qu’elle a probablement trop pensé à la médaille.

« On s’impose peut-être de la pression sans même le réaliser. C’est un peu ce qui m’est arrivé avant les Olympiques. Je me sentais bien, il n’y avait rien de particulier. Mais je crois qu’on devient parfois trop excité quand on songe trop aux résultats. Dans le fond, on pense qu’on ne se met pas de stress, mais inconsciemment, il y en a. »

Une nouvelle saison

Elle transpose donc cette réflexion à la saison 2022-2023, déjà sa septième sur le grand circuit malgré une année blanche après une grave blessure aux Championnats du monde de 2019.

Le premier podium est tout près, elle le sent, elle le souhaite, mais elle refuse de s’y attarder. N’empêche, elle ne se rebiffe pas quand on lui suggère que ce n’est qu’une question de temps.

« C’est ce que je me dis aussi et c’est ce que je veux continuer à viser. Je suis passée très, très, très proche et d’autres fois assez proche. Je crois vraiment que c’est une possibilité, mais je ne veux pas me dire : ‟Ah, c’est ce que je vais faire en fin de semaine.” Ça peut te jouer dans la tête. »

Douzième au classement de la discipline, même en ratant le tiers des départs, la Franco-Ontarienne a fini quatrième à Kranjska Gora, à seulement sept centièmes de la boîte. À part une sortie de piste à Lenzerheide, son pire résultat a été une 13e place.

Elle se fait un peu tirer l’oreille parce qu’elle « n’aime pas dire un chiffre », mais sa volonté cet hiver est manifestement de se glisser parmi les sept premières, groupe à qui les meilleurs dossards sont réservés en première manche.

Sa santé est enfin excellente et elle retire une grande confiance d’un stage de trois semaines durant l’hiver austral chilien. La station de Portillo a été une découverte. « C’est juste vraiment magique comme endroit. L’entraînement était super productif avec de la belle neige. »

Avec sa compatriote Marie-Michèle Gagnon, Grenier a skié avec les hommes de l’équipe canadienne de vitesse ainsi qu’avec des descendeuses américaines et norvégiennes. Elle a enfin réussi à passer par-dessus un « blocage mental » qui l’avait éloignée du super-G depuis sa quadruple fracture à une jambe subie aux Mondiaux de 2019.

« Mon but cette saison est vraiment de faire mon retour en super-G, a-t-elle annoncé. Je veux faire toutes les courses. Ça s’est super bien passé au Chili et je n’ai pas eu peur une seule fois. »

Je me sentais juste très bien, je m’amusais et je reprenais confiance. Ça regarde donc bien.

Valérie Grenier

En ce début de cycle olympique où les portes tournantes sont presque inévitables, elle s’estime choyée de pouvoir toujours compter sur son entraîneur italien Laurent Praz, un francophone qui l’accompagne depuis son retour de blessure.

L’équipe féminine est maintenant dirigée par Karin Harjo, seule femme à occuper ce poste en Coupe du monde. Grenier est élogieuse au sujet de l’Américaine qui a travaillé avec Lindsey Vonn et Shiffrin dans le passé.

« Je suis extrêmement contente de l’avoir avec nous. C’est un changement qui fait du bien. Elle est tellement incroyable. Tu vois qu’elle est là pour nous écouter, elle veut faire le mieux possible et en même temps, elle est vraiment comme une girlboss. Elle est inspirante, elle sait ce qu’elle fait et elle est très cool en même temps. C’est le mélange parfait. »

Après de derniers ajustements en Italie cette semaine, Grenier s’estime fin prête à attaquer la saison sur le glacier Rettenbach, où elle a fini septième il y a un an.

« C’est une piste qui me convient habituellement bien. J’espère que ça peut continuer comme ça. Je me sens super bien, en fait. Honnêtement, j’ai juste vraiment hâte de commencer les courses… »