(Québec) Au printemps dernier, Laurent Dubreuil a croisé Régis Labeaume dans la salle de rédaction de La Presse quand l’ancien maire de Québec est venu prendre sa photo de nouveau chroniqueur. Le patineur de vitesse lui a présenté sa médaille d’argent des Jeux olympiques de Pékin, que l’ex-politicien avait trouvée bien lourde.

« Il y a une bonne partie du Centre de glaces là-dedans », a affirmé Dubreuil, bien au fait que le nouvel édifice était la première promesse électorale de M. Labeaume en 2007.

Quelques mois plus tard, le Centre de glaces Intact Assurance, gros ovni argenté qui trône en bordure de l’autoroute Henri IV à Québec, servira de théâtre aux tout premiers Championnats canadiens combinés de patinage de vitesse longue piste et courte piste. De jeudi à dimanche, les meilleurs patineurs à longues lames au pays se disputeront les places disponibles pour les Coupes du monde de l’automne.

Pour Dubreuil, préqualifié en vertu de ses résultats aux Jeux olympiques, l’affaire est déjà réglée. Si la compétition avait eu lieu à l’Ovale olympique de Calgary, comme ce fut toujours le cas depuis le début de sa carrière, il n’y aurait tout simplement pas participé.

C’est que l’athlète de 30 ans est devenu père pour la deuxième fois il y a deux semaines. Comme Nathan est né un peu plus tôt que prévu, Dubreuil profite de l’occasion pour briser la glace devant parents et amis jeudi (500 m) et vendredi (1000 m), courtes nuits ou pas.

Le vice-champion olympique au 1000 m et gagnant du classement général de la Coupe du monde au 500 m n’est pas là pour faire acte de présence. Sa fille Rose, maintenant 3 ans et déjà initiée au patin, s’attend maintenant à ce que papa lui rapporte des médailles.

Laurent Dubreuil vise surtout à enregistrer des temps rapides après un entre-saison mouvementé – et pas que pour des raisons familiales.

« De mai à la fin juillet, ça a été mon pire début depuis des années ! », s’est-il exclamé après avoir geint en posant son « vieux dos d’athlète » dans un siège des gradins surplombant le Centre de glaces, mardi après-midi.

Une imagerie par résonance magnétique lui a appris qu’il souffrait de deux hernies discales. La douleur irradiait jusque dans un pied. Rien d’étonnant pour celui qui avait subi un tel mal entre sa quatrième place crève-cœur au 500 m à Pékin et sa renaissance surprise six jours plus tard au 1000 m.

Grâce à des anti-inflammatoires, à une injection de cortisone et à de la physiothérapie, Dubreuil a pu reprendre un entraînement « adapté ». Fini, donc, les squats avec une barre de près de 400 lb qui lui ont causé des douleurs.

« Mieux que l’an passé »

Curieusement, ce changement de régime ne l’a pas ennuyé pour un sou. « Depuis deux mois, deux mois et demi – depuis que j’ai arrêté les squats, en fait –, ça va super bien. C’est mieux que l’an passé à pareille date, surtout au 1000 m. C’est dur à comprendre parce que ça avait été un été pas mal de rêve. Aussi proche du parfait que ça n’avait jamais été. Cette année, c’était vraiment catastrophique. Puis à un moment donné, on s’est ajusté, ça s’est mis à bien aller et les sensations sont revenues… »

La naissance de son deuxième enfant lui a également « rafraîchi la mémoire » et rappelé que le patinage de vitesse, une obsession depuis sa prime jeunesse, n’était plus un absolu dans sa vie.

Et encore moins depuis qu’il a décroché cette médaille olympique, un an après son titre mondial au 500 m dans la bulle d’Heerenveen.

« J’ai réussi deux des grands objectifs qui m’étaient chers. Maintenant, j’ai une carrière dont je peux être fier, peu importe ce qui arrive. Ça me permet juste d’être plus équilibré que jamais dans ma vie. La pression n’est plus là, mais ma soif de gagner n’a pas disparu. Je veux encore en gagner plein des médailles. En fait, ça va tellement bien que si je n’en gagne pas cette année, je vais être de mauvaise humeur… »

Au-delà de titres nationaux qui n’ont aucune signification à ses yeux, Dubreuil cible des objectifs de temps précis cette semaine, soit 34,5 s ou 34,6 s au 500 m et 1 min 08,5 s au 1000 m.

De tels chronos lui indiqueraient qu’il pourra rivaliser pour le podium le mois prochain aux Coupes du monde de Stavanger (Norvège) et d’Heerenveen (Pays-Bas).